Le salon géopolitique de Passion-Histoire

Je trouve qu'il y a une cacophonie médiatique. De plus j'ai comme tous les gens confinés beaucoup de temps à consacrer aux informations, et j'ai du mal à me faire une opinion précise de ce qui se passe.

Absolument. C'est ce qu'a dit hier le Pr Axel Kahn: il a été très mécontent que lors de la prise de décision de maintenir le premier tour des élections municipales, on ait dit que ce sont les scientifiques qui ont dit de maintenir ce premier tour. Ce n'est pas du tout le cas. Quoi qu'aient dit les onze scientifiques qui conseillent le Président, ce ne sont pas ces 11 personnes qui ont pris la décision politique, ils n'ont fait qu'émettre leur avis (qui n'était pas l'avis de bien d'autres scientifiques). C'est une décision politique.

J'ai retrouvé son intervention, ici à 3:10:
https://www.youtube.com/watch?v=VW2oJiWuUzk

"Lorsqu'on a décidé de maintenir le premier tour des élections municipales, là, on le sait bien, tout le monde le sait: c'était une décision politique avec de très nombreux paramètres. Il y avait les oppositions, les négociations, etc. Dire qu'on le fait car ça nous a été imposé par les experts scientifiques, ça je n'ai pas beaucoup apprécié. Parce que: que fait un politique? Il se saisit des éléments d'expertise, politique, scientifique, économique, que sais-je, puis il prend une décision politique. (...) Un expert n'est pas un décideur politique, c'est extrêmement important de le rappeler."

Dans l'article du CNRS, j'ai relevé ce passage sur l'inexistence de l'unanimité des scientifiques face à la crise:
"il est important que l’on ne donne pas aujourd’hui l’illusion d’une unanimité. Laisser entendre que tout le monde serait d’accord ou détiendrait une vérité scientifique, c’est courir le risque d’alimenter des déceptions, des critiques vives et aussi des discours complotistes dans six mois, quand la crise sera derrière nous. "


Pour ceux qui lisent l'anglais, je conseille vivement la lecture du New York Times, qui offre depuis le début de la pandémie en Chine des articles d'excellente qualité,

On change d'équipe (enfin!) Et on la corse. Il est très intéressant d'analyser l'évolution de l'entourage d'experts autour du gouvernement en France.

Un Conseil Scientifique de l'Elysée de 11 personnes fut mis en place en hâte le 11 mars, soit la veille de la décision de fermer les écoles (effective le 16 mars) et la veille de la décision de maintenir le premier tour des élections municipales. Ce conseil était formé de:
1. Laetitia Atlani-Duault, anthropologue qui a fait une thèse sur la prévention du VIH,
2. Daniel Benamouzig, sociologue spécialisé en politique et économie de la santé
3. Simon Cauchemez, modélisateur
4. Bruno Lina, médecin virologue et directeur du Centre national de référence de la grippe à Lyon, excusé des 3 avis ci-dessous
5. Arnaud Fontanet, médecin épidémiologiste
6. Lila Bouadma, médecin (réanimation)
7. Pierre-Louis Druais, médecin de ville
8. Yazdan Yazdanpanah, chef du service des maladies infectieuses et tropicales à l’hôpital Bichat de Paris
9. Didier Raoult, infectiologue, professeur de microbiologie, a mené le premier test clinique à l’hydroxychloroquine contre le coronavirus à Marseille. Il s'est mis en retrait du conseil scientifique le 24 mars: « Il ne correspond pas à ce que je pense devoir être un conseil stratégique ». Sur les deux premiers avis (datés du 12 et 14 mars) de ce conseil, rendus publics par le ministère de la Santé, le nom du professeur Raoult figure avec la mention « excusé ». En revanche, son nom ne figure pas dans la liste des membres sur le troisième avis, daté du 16 mars.
10. Denis Malvy médecin des maladies tropicales à Bordeaux
11. François Delfraissy, 71 ans, préside ce conseil, Spécialiste de l’immunologie est président du Comité consultatif national d’éthique (CCNE) depuis 2016

Il est très intéressant de noter la forte dissidence de Didier Raoult, qui demande à cor et à cri depuis le début une politique de backtracking, c'est-à-dire d'identifier les personnes quji ont été en contact avec les malades, de les rechercher, et de les tester en priorité pour pouvor les isoler et les traiter. C'est la voie suivie en Chine, en Corée, à Singapour, dans toute l'Asie du Sud-Est (Vietnam, etc), et qui a fait ses preuves y compris dans des pays à infrastructure médicale plus faible que la nôtre.

Il a décidé de ne plus s'associer à ce Comité, préférant garder une voix indépendante pour s'adresser à l'exécutif. Dans la foulée de cette mise en retrait, hier le gouvernement a décidé de changer de conseil -officiellement d'ajouter un nouveau comité, chargé notamment d'explorer -enfin- l'option préconisée par Raoult. Ce nouveau comité, cette fois bien plus "muclé", puisque présidé par la prix Nobel Françoise Barré-Sinoussi. La première réunion de ce nouveau comité s'est tenue mardi 24 mars.

Le nouveau Comité d'Analyse Recherche et Expertise (Care) réunit 12 chercheurs et médecins pour conseiller le gouvernement, officiellement "en appui du Conseil scientifique" (je lis: remplace). Le CARE est présidé par Françoise Barré-Sinoussi, virologiste à l’Institut Pasteur-Inserm, Prix Nobel 2008 pour la découverte du virus du Sida. Dans le communiqué de l'Elysée, le CARE "accompagnera la réflexion des autorités sur la doctrine et la capacité à réaliser des tests ainsi que sur l’opportunité de la mise en place d’une stratégie numérique d’identification des personnes ayant été au contact de personnes infectées "

Outre Françoise Barré-Sinoussi, le Care sera composé de Jean-Philippe Spano (cancérologue), Yazdan Yazdanpanah (infectiologue-épidémiologiste, déjà membre du Comité scientifique, donc maintenu), Franck Molina (chercheur au CNRS), Dominique Valeyre (professeur de pneumologie), Bertrand Thirion (chercheur à l’Inria), Sylviane Muller (chercheuse au CNRS), Laetitia Atlani-Duault (chercheuse à l’IRD et anthropologue), Marie-Paule Kieny (chercheuse à l’Inserm, infectiologue), Muriel Vayssier (Directrice du département Santé animale de l’Inra), Marc Lecuit (professeur d’infectiologie) et Christophe Junot (chef du département médicaments et technologies pour la santé du CEA).



http://www.leparisien.fr/societe/corona ... 287122.php
https://www.lesechos.fr/idees-debats/sc ... on-1188372
https://www.20minutes.fr/societe/274710 ... heurs-care

Il est utile de lire attentivement les avis des 12, 14 et 16 mars, très intéressants:
https://solidarites-sante.gouv.fr/IMG/p ... s_2020.pdf
On y découvre notamment la recommandation des masques chirurgicaux pour la population.
https://solidarites-sante.gouv.fr/IMG/p ... s_2020.pdf
https://solidarites-sante.gouv.fr/IMG/p ... s_2020.pdf

Les pays arabes et Israël.

La douceur de l'hiver sous les Tropiques n'épargne pas à l'Orient la pandémie de Covid-19. Avec la jeunesse des populations, le bilan en sera-t-il amoindri ?

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Israël compte un mort avéré (20 mars, 0,00001 %) au 24 mars. Après quelques quarantaines individuelles, le pays l'a imposé à toutes les personnes arrivant de l'étranger le 10 mars. Écoles, théâtres et hôtels sont fermés le 13. Le confinement est proclamé le 19 mars.

La Palestine, coupée en deux territoires ennemis (Gaza, administrée par le Hamas, et la Cisjordanie régie par le Fatah), pourra difficilement suivre et contrôler l'épidémie. Elle ne compte aucun mort avéré au 24 mars. Gaza est atteinte le 22 mars, ses écoles sont fermées, ainsi que sa frontière avec l’Égypte ; le Hamas est assez totalitariste et brutal pour imposer le confinement à toute la population mais celle-ci, dense, peu éduquée et rompue aux activités clandestines et de contre-bande, semble très exposée à l'épidémie. La Cisjordanie est confinée depuis le 22 mars, son gouvernement travaille avec Israël pour suivre l'épidémie.

La Jordanie est atteinte, sans mort avéré au 24 mars.

Le Liban déploie ses forces de sécurité pour confiner la population le 22 mars et compte 4 morts avérés (0,0007 %) au 24 mars.

La Syrie est atteinte, sans mort avéré. Ses frontières sont officiellement fermées mais, avec son conflit interne opposant au moins quatre factions (loyalistes, Kurdes, rebelles arabes sunnites et rebelles arabes sunnites alliés à la Turquie (y compris les résidus d'Al Qaeda et Daesh), il sera impossible de distinguer les morts de cette épidémie de celles de la guerre civile, qui inclura les personnes affaiblies mortes de maladies.

L'Irak, avec son conflit interne apaisé depuis l'effondrement de Daesh, compte 20 morts avérés (0,00005 %) au 24 mars. Il établit un couvre-feu depuis le 22 mars mais le pays souffre d'une anarchie chronique et semble peut en mesure de contrôler l'épidémie, en dehors des civismes individuels.

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Les pétromonarchies suivantes sont policées et recrutent des personnels de santé de qualité. Elles sont en revanche majoritairement peuplées d'immigrés très peu éduqués et qui risquent d'être peu suivis sanitairement.

Le Koweït, atteint, ne compte pas de mort avéré. Il a suspendu les vols commerciaux le 13 mars et annonce un couvre-feu le 22.

Le Bahreïn compte 2 morts avérés (0,0001 %) au 24 mars. Le pays semble touché en raison de ses relations avec l'Iran.

Le Qatar est atteint, sans mort avéré au 24 mars.

Les Émirats arabes unis (EAU) comptent 2 morts (0,00002 %) au 24 mars.

L'Oman, atteint, ne compte pas de mort avéré au 24 mars.

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Le Yémen est frappé par une guerre intestine avec intervention armée de l'Arabie saoudite, qui s'y empêtre (et s'y ruine et ridiculise ?) avec quelques alliés arabes. Quelques associations tentent d'y suivre et de prévenir l'épidémie mais celle-ci n'y sera probablement pas surveillée et ses victimes se confondront avec les victimes civiles du conflit, notamment les autres malades affaiblis. Aucun mort avéré au 24 mars.

L'Arabie saoudite enregistre son premier décès prouvé (un Afghan) le 23 mars. Elle risque de pâtir de la présence de main-d’œuvre issus de pays très pauvres et peu éduqués. Le pèlerinage de La Mecque, débutant le 23 juillet, pourrait être suspendu, ce qui constituerait une catastrophe économique pour cet État qui déjà endetté par son intervention militaire au Yémen et dont les ressources pétrolières tarissent avec la baisse du prix du pétrole due à la baisse des activités industrielles mondiales à cause du Covid-19.

Pays arriéré, toujours en proie aux conflits civils et à une prédation esclavagiste au Darfour (depuis 2003...), sans moyens sanitaires fiables pour suivre l'épidémie, le Soudan compte un mort avéré (le 14 mars) au 24 mars. L'épidémie le frappera sans suivi réel.

L'Égypte, sous-développée et ne pouvant suivre l'épidémie dans sa population anarchique, est atteinte depuis le 14 mars (par ses activités touristiques, aéroports et croisiéristes) et compte 14 morts avérés au 24 mars. Le régime despotique s'inquiète (ou pas ?) de l'épidémie dans ses prisons (100.000 détenus dont 60.000 politiques)...

La Libye paiera son conflit interne par des morts supplémentaires qui seront comptabilisés dans les victimes civiles et resteront, hors estimations, invisibles pour le suivi de l'épidémie.

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Les pays maghrébins souffrent d'une anarchie civile (incivismes individuels) larvée et peineront à juguler l'épidémie.

La Tunisie compte 3 morts prouvés (0,00003 %) au 24 mars, son premier cas détecté étant un Tunisien rentrée d'Italie. Le stade 2 est proclamé le 13 mars, lieux publics et frontières sont fermés le 18, couvre-feu le même jour et confinement de la population le 20.

L'Algérie totalise 19 morts avérés (0,00004 %) au 24 mars. Sa première détection du 18 février est un Italien, rapatrié en Italie. Les cas sont aussi bien des Marocains ou des Algériens rentrés d'Europe ou restés au pays. Le stade 3 est annoncé le 22 mars et le confinement, le 24. Des dérapages xénophobes, dont le pays est coutumier, sont envisageables.

Le Maroc compte 4 morts avérés (0,00001 %) au 24 mars. Le gouvernement a suspendu ses vols et liaisons maritimes avec quelques pays européens touchés (9 mars), fermé ses crèches et établissements scolaires et universitaires (13) et de lieux publics (16).

La Mauritanie, pays très arriéré, peu susceptible de suivre quoi que ce soit dans ses frontières, est atteinte, sans mort avéré au 24 mars. Un couvre-feu est décrété le 19 mars.

Bonjour,

Au hasard, en regardant votre liste, je relève à nouveau qu'elle est en retard Quelle source utilisez-vous?
-etc.
Israel: 5 morts
Egypte: 20 morts
Chiffres du 24 mars publiés sur Worldometer.

Pour garder votre tour du monde à jour, car il devrait être actualisé tous les jours, et ne pas courir derrière les chiffres ou énumérer les 200 pays, il est utile de se référer aux sites que j'ai mentionnés plus haut, vous avez toutes ces statistiques par pays, en temps réel, et avec un historique précis, et des courbes utiles:
https://www.worldometers.info/coronavirus/
et la carte de l'Université Johns Hopkins:
https://coronavirus.jhu.edu/map.html

Le tableau worldometer permet également de classer les pays par nombre de cas, date, nombre de décès, nombre de guérisons, cas critiques, proportion de la population touchée, etc.


Pays maghrébins anarchiques (tous dans le même sac, Tunisie à égalité avec la Libye ou l'Egypte?), inciviques, emploi du futur... Ces appréciations proviennent-elles d'une source, ou sont-elles personnelles?

C'est aussi la politique préconisée par l'OMS. Mais depuis que le "cluster" de Mulhouse a éclaté, cette politique est difficilement tenable. Car actuellement la disponibilité des tests est limité, et il faudrait en faire des millions. Donc, le gouvernement tente de reprendre la main. Mais, peut-être qu'il ne communique pas assez là-dessus. Oui, la première priorité c'est les soignants et le nombre de places en réanimation. À Colmar, c'est plus de 30 ambulance qui viennent chaque jours. Parfois, elles repartent avec leur patient, car il n'est pas suffisamment malade. Et parfois parce qu'il est trop tard. Hier, j'ai vu un médecin urgentiste qui expliquait comment se fait le tri pour l'accueil en réanimation. Et il insistait sur le fait que c'était déjà le cas AVANT, même si la plupart des gens n'en ont pas conscience.

Il y a d'abord le patient dont le médecin réanimateur estime que les techniques très invasives de la réanimation vont apporter une grand inconfort et une grande souffrance pour une bénéfice nul ou trop faible. Survivre quelques heures de plus en étant branché à une machine, intubé et dans un coma artificiel n'est pas forcément la meilleure chose quand on vit les derniers moments de sa vie.

Il y a une seconde catégorie, ceux qui sont admis en réanimation, mais dont on sait qu'on ne va pas tout tenter. Car s'il réagit mal cela voudra dire que plus rien ne sert.

La troisième catégorie sera celle où on va se permettre d'utiliser toutes les techniques, mêmes les plus invasives, même celles qui peuvent créer le plus de dommages, car le médecin pense que l'enjeu en vaut la peine.

A Colmar, ils ont réussit à doubler le nombre de lits de réanimation. Ils savent que ce ne sera pas suffisant et il faudra continuer à faire des efforts. Malgré les absents : confinés, malades, et les premiers morts. Donc, la stratégie actuelle semble de créer un premier cercle : les soignants. Ce sont eux qui auront en priorité les gels, masques, gants, sur-tenues, et tests. Le second cercle sera sûrement constitué des métiers qui doivent "rester sur le pont", la liste et longue, mais surtout chez certains de ces métiers, on sait déjà que le virus circule. Le reste de la France fera sûrement partie du 3ème cercle.

Et puis, il y a les Ehpad. On sait que dans de nombreux Ehpad le virus circule : parmi le personnel, mais aussi parmi les résidents. Et on commence à voir les dégâts. Mais, il y aura aussi des dégâts à cause du confinement. Puis aussi parce que les personnels soignants sont accaparés par la lutte contre le coronavirus. Dans le Haut-Rhin, tous les pneumologues ne travaillent plus que sur le Covid. Ils ont une boite vocale, sauf urgence c'est : recontactez-nous plus tard.

Je me range à l'avis de Dupleix et me mets un peu en retrait, le temps de l'analyse viendra après.

Je prends Wikipedia citant les bilans OMS, ça suffit à mon suivi superficiel. C'est davantage l'évolution dans le temps qui m'importe.

Égypte et Libye ne sont pas dans le Maghreb ("Occident" en arabe, Tunisie, Algérie, Maroc et Mauritanie).

C'est une opinion toute personnelle. Tenteriez-vous de m'en culpabiliser ? Vous échoueriez car la géographie réside dans la comparaison. Par exemple, les pays occidentaux, qui ont exporté le virus de Chine et l'ont répandu dans le reste du monde, valent-ils mieux en terme de civisme et de discipline ?

Les pays subsahariens à majorité musulmane.

L'épidémie s'empare du continent africain, dont les systèmes de santé ne peuvent ni suivre, ni limiter les bilans. De toute manière, et dans l'ensemble des pays du monde, la mortalité réelle sera estimée dans plusieurs années à partir des surmortalités.

Les Sénégal, Guinée-Bissau, Guinée, Mali, Tchad, Somalie, Érythrée, Djibouti sont atteints et ne comptent aucun mort avéré.

La Gambie enregistre son premier décès prouvé le 20 mars, tout comme le Nigeria au 23 mars et le Niger.

Le Burkina Faso compte 7 morts (0,00003 %) avérés au 26 mars.