Zadrobilek a écrit:
Les événements récents montrent, pour les gens de Gauche dont je suis, que si une autre Europe est éventuellement possible, une autre Union Européenne ne l'est pas. Pas davantage qu'un autre Euro. Il n'est pas seulement question de souveraineté (ce qui est déjà en soi important), il est aussi question de survie économique
Je suis aussi de Gauche et j'ai une autre analyse. L'exemple grec montre qu'on ne peut pas influer sur grand chose quand on est pris à la gorge et qu'il y a des échéances à respecter. Surtout que le reproche fait à la Grèce est justifié : pour l'instant, les gouvernements précédents n'ont pas fait grand chose pour réformer. Ils ont mené des politiques d'austérité qui ont permit d'éviter de trop creuser les déficits, mais ils n'ont pas fait grand chose pour améliorer la collecte des impôts ou pour limiter la fuite des capitaux. Et c'est un ministre actuel de la Grèce qui le dit mieux que moi :
L'Obs : "Nous sommes le premier gouvernement à pouvoir réformer l'Etat"Citation:
Les Européens, en cas d'accord, devront vous faire confiance pour engager des réformes. Comment se fait-il que depuis des années, voire des dizaines d'années, la Grèce semble incapable de moderniser ses services publics et sa fiscalité ?
- Dans les années 60, Georges Langrod, un professeur français de sciences politiques, était venu en Grèce pour étudier l'administration grecque et proposer des réformes. Ce qu'il a constaté alors n'a pas changé aujourd'hui : une bureaucratie rigide, un système clientéliste... Pourquoi en un demi-siècle n'a-on rien fait ? La réponse est simple : parce que le système politique grec avait l'administration qui lui convenait. Il reflétait l'alliance entre les élites politiques et les oligarques.
Dans un tel système, basé sur la distribution de la richesse publique aux oligarques, via les contrats publics, on ne veut pas d'administration légale et rationnelle. Car avec une administration rationnelle, les contrats publics sont accordés selon les lois, celles du Parlement et celles du marché.
Nous sommes le premier gouvernement en position de faire la réforme de l'Etat, car nous voulons briser ce système de pouvoir des oligarques.
Et je considère que faire payer à tous le juste impôt est bien une politique républicaine. Elle ne devrait pas être de droite ou de gauche : quand on aime son pays, on fait ce qu'il faut pour que son administration fonctionne du mieux possible.
Le problème de la Grèce est d'avoir menti pour accéder à l'euro (et le gouvernement Tsipras a annoncé vouloir finalement poursuivre la banque Goldman-Sachs pour avoir aidé le gouvernement de l'époque à tricher.
Zadrobilek a écrit:
Comme je l'ai écrit cette nuit, les prédictions les plus pessimistes des eurosceptiques des 90s se sont révélées justes. Les opinions publiques ne sont évidemment pas dupes de la servilité de leurs gouvernants à l'égard de l'Allemagne, et dans un pays tel que le nôtre, ce stade supérieur de déconnexion entre les élites politico-médiatiques et le reste de la population aura plusieurs conséquences regrettables. Concrètement, si l'Allemagne ne se comporte pas comme un partenaire équitable et respectueux, alors il est (et sera de plus en plus) considéré comme un adversaire, voire pire. En outre, l'Euro et même le projet européen subiront une perte de crédibilité telle que les partis qui en tireront les bénéfices électoraux seront les plus eurosceptiques. Et parmi eux, bien entendu, le FN.
L'accord est dur, mais la Grèce a déjà eu 2 plans d'aides qui n'ont pas servi à grand chose, du moins pas à relancer l'économie grecque comme c'était prévu. Il est donc logique que les créanciers se soient montrés fermes. D'ailleurs, en France les sondages reflétaient bien cette dualité, si ma mémoire est bonne, des sondages récents ont montré que 64% des français voulaient que la Grèce reste dans l'Union Européenne et dans l'euro et qu'on fasse le max pour cela. Dans le même temps, un sondage montrait que les français ne voulaient pas payer un centime supplémentaire pour aider la Grèce ...
Car le fond du problème est là: pour que la Grèce sorte de la crise il faudrait injecter dans son économie de 100 à 200 milliards d'euros (et c'est la fourchette basse de l'estimation). Les européens étaient presque d'accords pour injecter une grande partie de cette somme, mais ils ne voulaient pas être une 3ème fois les dindons de la farce. Même les plus optimistes et les plus pro-grecs doutent de la capacité de Tsipras a réussir à mener au bout les réformes. Ils pensent que sa base va l'abandonner et que les partis traditionnels joueront la montre pour ne pas contrer les intérêts qui les financent. Les conditions de l'Allemagne étaient destinées à faire participer l'économie grecque à son sauvetage. Par exemple, les privatisations, si elles sont menées à bien devraient permettre de mener de gros projets industriels qui profiteront aux grecs. Certaines îles pourraient être rattachées au continent par des ponts ce qui changera notablement la situation de ceux qui y habitent en diminuant les coûts des marchandises importées ou exportées.
Les réformes, si elles sont menées à bien, devraient permettre d'augmenter les rentrées d'argent et diminuer les dépenses. Ce qui permettrait de diminuer l'augmentation du déficit. Notez bien que je parle de "diminution de l'augmentation du déficit" et non pas de sa diminution ... Dans un second temps, la relance de l'économie devrait entrainer une augmentation du PIB et donc une diminution du poids relatif de la dette et donc une augmentation des capacités de remboursement. Une relance de l'économie devrait aussi entrainer une diminution du chômage, ce qui devrait permettre d'améliorer la situation des grecs.
Et pour ceux qui sont attentifs aux faits plus qu'aux mots, la Grèce est de nouveau en croissance depuis environ 3 mois. Son PIB a légèrement augmenté le trimestre dernier. Si la saison touristique est bonne, bien qu'il sera trop tôt pour crier victoire, la situation devrait s'améliorer. Si vous désirez aider la Grèce : allez passer vos vacances en Grèce.