Caesar Scipio a écrit:
Vous oubliez d'inclure dans la liste Juppé, ministre des affaires étrangères de Sarkozy à partir de fin 2010 et très offensif sur la Syrie. Un véritable alter ego de Juppé. D'ailleurs, la gémellité entre ces 2 têtes d'oeuf et bêtes de concours est frappante, en termes de positionnement et de comportement au sein de leurs camps respectifs, en termes de conduite politique une fois aux responsabilités, en termes de personnalité et de ressorts psychologiques.
Plus possible d'éditer le message. Quand je parlais de gémellité, je faisais bien sûr référence au couple Juppé-Fabius, caricature du techno-politique formé entre la fin des années 60 et le début des années 70, puis fixé comme modèle indépassable dans leurs camps respectifs où ils sont entrés plus par carriérisme que par conviction.
@ Kurnos : Incontestablement, il n'y a pas de guerre propre. Il y a des victimes collatérales.
A noter que les mesures d'embargo ont fait infiniment plus de victimes dans la population irakienne pendant les 13 années où elles ont été appliquées.
Les bombardements font des victimes dans les populations civiles aussi, c'est vrai. Cela a toujours été le cas. Ne pas oublier que parmi les victimes il y a aussi des gens qui soutiennent, de manière plus ou moins engagée, l'Etat islamique et son projet politique.
Le printemps arabe, en Syrie, cela a surtout été le soulèvement de la majorité ethno-culturelle dans ce pays, à savoir les arabes sunnites, contre le pouvoir détenu par la minorité alaouito-chiito-chrétienne fédérée par les Assad. Soulèvement qui a été préparé, financé, équipé et soutenu par des sponsors saoudiens, qataris et turcs, eux-mêmes fédérés par les USA dans un projet commun de briser l'arc chiite et de contrôler les voies de distribution du gaz saoudo-qatari vers la Méditerranée.
Bref, quand on enlève les lunettes idéologiques et qu'on cesse d'écouter la désinformation de masse, tout cela est très cru. De la bonne vieille realpolitique du cynisme le plus absolu.
Jusqu'à ces derniers jours, sauf à ce que les pilotes et les équipements aériens américains soient devenus les plus nuls du monde développé, on ne peut que parvenir à la conclusion que les USA faisaient semblant de bombarder l'Etat Islamique et tapaient surtout là où ça ne risquait pas de faire mal. Et les plus hautes autorités américaines qualifiaient le front Al Nosra (= Al Qaïda en Syrie) et Ahrar al Sham de "nos gars" quand ils se fichaient en pétard contre les bombardements russes qui, eux, faisaient vraiment mal aux djihadistes sunnites soutenus par les USA, la Turquie, et leurs alliés des monarchies pétrolières sunnites wahabbites.
Pour en revenir à la situation nationale qui est notre sujet de discussion précis, ce que les attentats ont changé, c'est qu'hormis les plus irrécupérables dans la classe politique, c'est-à-dire grosso modo hormis Fabius qui fait le service minimum parce qu'il lui est inconcevable de reconnaître avoir mené une politique désastreuse, mensongère et contraire à nos intérêts les plus fondamentaux, tous ont compris qu'ils n'avaient pas d'autre choix que de changer leur fusil d'épaule. Les sondages d'opinion avant l'attentat montraient déjà que plus des trois quarts de notre opinion publique approuvaient la stratégie russe et souhaitaient que la France s'en rapprochent. Tous avaient fait le lien entre djihadisme en Syrie et tensions intérieures.
Donc, alors qu’ils tiraient à boulets rouges sur les quelques parlementaires qui eux prèchaient dans le désert, l'immense majorité de nos politiques qui étaient sur la ligne Juppé-Fabius-médias, c’est-à-dire la ligne pétro-dollars saoudo-qataris, a opéré un revirement spectaculaire dans son discours.
Juppé a eu le nez quelque peu creux quelques jours avant l’attentat quand il a esquissé un revirement factice. Juppé a expliqué qu’on avait fait une erreur en Syrie. Sauf que quand on le lit, la seule erreur qu’il reconnaît c’est … de ne pas s’être donné les moyens d’atteindre notre objectif de renverser Assad dont il prétend toujours que ce serait lui qui a utilisé des armes chimiques alors qu’il est établi depuis janvier 2014 (étude conduite par un ancien inspecteur de l’ONU et un chercheur du MIMT) que ce sont en fait les djihadistes, à qui la Turquie a fourni le gaz sarin pour mettre cette attaque chimique sur le dos d’Assad afin de provoquer une intervention militaire américaine contre le régime d’Assad, qui ont utilisé des armes chimiques.
Autrement dit, Juppé a fait semblant de faire le service minimum : il ne fait que regretter de n’avoir pas réussi. Comme Fabius, il ne reconnaîtra jamais une erreur de fond. Mais à la différence de Fabius Juppé nourrit de grandes espérances et a besoin de faire croire à son électorat potentiel qu’il se remet quelque peu en phase avec son opinion sur le sujet.
Les autorités actuelles vont faire ce qu’elles savent faire : adopter … des textes. C’est bien connu, gouverner c’est prendre des lois. On n’a jamais voté autant de lois que ces 3 dernières années et demi. Des lois bavardes, inapplicables ou inappliquées. Mais elles auront fait des lois.
Pour elles aussi, il fallait sauver les meubles sinon le risque politique d’être répudié avant même la fin du bail aurait pris une solide consistance. Elles sont bien secourues par les médias officiels qui pratiquent pour certains une propagande de plus en plus grossière, en particulier le journal le Monde.
Bref, dans moins d’un mois, le rideau de fumée des annonces et des discours grandiloquents se sera dissipé. Les réalités de politiques auront repris leurs droits, avec les résultats des élections régionales au lendemain desquelles tous n’auront plus en ligne de mire que la présidentielle de 2017. On va être enseveli sous les sondages d’intentions de vote pour la présidentielle de 2017. Et mon analyse (plus qu’une simple intuition) me conduit à penser que la présidentielle va se jouer principalement non pas sur les questions économiques (parce que plus aucun parti de gouvernement n’est crédible sur ce sujet qui était censé justement en faire des partis sérieux, des partis de gouvernement) mais sur les questions de sécurité, de frontières, de valeurs de la société, d’avenir du pays, d’immigration et d’identité nationale.