marc30 a écrit:
il faut se rappeler le contexte : à ce moment là on croyait bien que les russes allaient marcher jusqu'à tbilissi et que les occidentaux reagiraient pas : les usa englues en irak et discredites de ce fait, les europeens en vacances
Une étude relativement détaillée de Jacques Sapir sur le sujet tend à démontrer que les russes, au plus fort de leur contre-offensive, ont nullement eu l'intention de pousser sur Tbilissi, ni encore moins d'annexer la Géorgie: ils ne faisaient "que" mettre en pratique, à une échelle réelle, l’exercice Kavkaz-2 qui impliqua des déploiements de force très importants dans la région quelque temps auparavant, sans aucun doute en prévision d'un conflit probable puisque dans un contexte de tensions grandissantes avec son voisin géorgien.
L’ampleur de la réaction russe à ce qu'il faut bien qualifier d'agression géorgienne sur l'Ossétie du Sud, puis l'effondrement militaire de l'armée géorgienne qui se profila dans les jours suivants, provoqua stupeur et "panique politique" au sein du pouvoir incarné par un président Saakashvili incrédule et, disons-le, clairement pris au dépourvu devant le peu de réaction autre que diplomatique de son pourtant grand allié (et contributeur) américain.
A cette occasion les autorités géorgiennes ne manquèrent pas de déclencher une guerre de propagande en annonçant à qui veut bien les entendre "que les troupes russes vont prendre Tbilissi dans la nuit". L’ambassade US décida d'organiser d'ailleurs immédiatement un convoi d’évacuation de ses ressortissants.
Extraits:
"Le thème de cet exercice était le déploiement rapide de troupes à haute efficacité opérationnelles pour assurer la protection d’une région menacée par une intervention extérieure. On ne pouvait plus clairement indiquer aux autorités Géorgiennes la volonté du gouvernement russe d’intervenir en cas d’attaque contre l’Abkhazie ou l’Ossétie du Sud.
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Les Etats-Unis ont prétendu que l’objectif ultime de la Russie pourrait être la conquête de la Géorgie, une thèse que les autorités géorgiennes ont aussi reprise et qui a été diffusée en France par certaines personnes dans les médias, en particulier Bernard Henri-Lévy. Du 12 au 18 août le ton des reportages de la télévision (TF1 et A2) a été centré sur « l’avance » des troupes russes vers Tbilissi. Enfin, le Président G.W. Bush a comparé l’opération militaire russe à l’invasion de la Tchécoslovaquie en 1968 par les forces du Pacte de Varsovie.
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Le retrait des troupes à partir du 21 août devient réel, mais l’ampleur des fortifications dans la zone de sécurité réclamée par la Russie est impressionnante. Ceci va d’ailleurs provoquer des tensions entre la Russie et ses partenaires occidentaux quant à l’application de l’accord de cessez-le-feu. Il est indiscutable que la zone de sécurité réclamée par la Russie correspond aussi à une réaction face à la violence de l’attaque géorgienne initiale. L’usage d’une artillerie à longue portée justifie, d’un strict point de vue militaire, une zone de 30 à 35 km de large.
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Les opérations militaires qui se déroulent de la matinée du 8 au 12 août correspondent très précisément aux différents plans élaborés par le commandement russe pour faire face à une situation du type à laquelle il a été confronté. Si l’on compare cette chronologie avec les manoeuvres des forces russes de juin et juillet 2008,(...) , on retrouve les mêmes structures. La manoeuvre russe inclut toujours trois phases, une d’arrêt, une de réaction ou de contre-offensive et une d’exploitation. La manoeuvre est globale incluant non seulement le combat aéroterrestre mais aussi l’enveloppement maritime, comme testé naguère avec les forces chinoises dans le cadre de manoeuvres de l’OCS, et l’usage des forces aéroportées. La destruction des structures de commandement de l’adversaire et de ses lignes de ravitaillement est un « moment » clé du passage de la phase d’arrêt à la phase de réaction. Le succès de cette dernière ouvre toujours la voie à une phase d’exploitation. Ce qui se déroule du 8 au 12 août est donc entièrement conforme au concept des opérations militaires de « sécurité » prévues par la Doctrine Militaire russe et pour lesquelles les forces russes ont été entraînées. On est bien dans le cadre d’opérations strictement limitées dans le temps, l’espace et les conséquences politiques."
http://www.iris-france.org/docs/pdf/for ... ssetie.pdf