Barns a écrit:
ce débat est un énorme leurre lancé par l'UMP, pour tirer à lui la couverture des droites nationales.
Ce débat sur l’identité nationale est décidément impossible…Ouvrez-le à n’importe quel moment et il y aura toujours quelqu’un pour hurler à la manœuvre politicienne. Trente ou 40 ans de silence sur la question…Non je corrige : trente ou quarante ans de discours ambigus entre lieux communs « enricomaciesques » de la gauche ("On est tous frères") et rejets xénophobes de la droite….Le mieux étant de ne rien aborder du tout mais de n’en penser pas moins. Ou de dire tout en précisant qu’on ne peut pas le dire sinon on dit que tu es raciste (vous suivez ?
).
Avant-hier à la télé Martine Aubry affirmait que les Français se fichent de ce débat et que ce qui les intéresse, « c’est de remplir leur caddie à la fin de la semaine ». La pyramide de Maslow s’invite en politique; tout est bon pour évacuer le débat par la petite porte: circulez il n’y a rien à voir.
Pourtant l'identité nationale est un sujet passionnant. On sait tous que nous sommes travaillés par de multiples identités : par exemple étant montpelliérain je m’affirmerai plus volontiers de cette ville chez les voisins nîmois, rivalité de clochers oblige, mais qu’un montpelliérain et un nîmois seront « du Sud » à Paris ; bien sûr en Angleterre, je serai Français, aux USA européen, en Chine occidental. Les choses sont toutefois plus compliquées que cela et en Suède, la rencontre avec un Marocain peut être l’affirmation d’une identité méditerranéenne qui prime sur l’aspect européen du pays visité…A ces considérations géographiques peuvent se superposer d'autres: je me sentirai "athée" au sein d'une cérémonie de Témoins de Jéhovah, "riche" en visitant un village en Afrique noire etc.
Je simplifie grandement car à ces affirmations positives ("ce que je suis"), on se doit de rajouter ce qui nous définit tout autant, les affirmations "négatives" (ce que je ne suis pas"): je vois bien que je ne suis pas un Espagnol, qui lui-même n'est pas Anglais etc.
Mais aujourd'hui, on nous demande de réfléchir à un niveau précis de cette espèce de poupée russe qu'est le sentiment identitaire: le niveau national. Rien de scandaleux dans la démarche et à d'autres moment on nous a demandé de réfléchir à l'aspect européen. Certes l'Histoire a montré que cet étage identitaire est responsable de pas mal de dégats, mais bon...ce n'est pas une raison pour l'évacuer. Surtout que notre population a changé assez considérablement en 40 ans...
La présence musulmane est à la base de ce débat : le nier est une des tentatives d’évitement favorite d’une partie de l’opinion, qui au lieu de convaincre l’autre partie, la renforce dans ses convictions que « nous sommes de moins en moins maîtres à bord ». Le bateau prend l’eau et les capitaines continuent à dire « Mais non tout va bien…on a juste embarqué un peu trop de passagers mais ça flotte ! ».
Rendons grâce aux Musulmans: un des grands avantages de l’immigration maghrébine, c’est qu’elle a transformé tout le monde ou presque en spécialiste du monde arabo-musulman : « Qui veut mon avis sur la question ? Que je garantie que c’est le plus beau, le plus lucide, le plus pertinent de tous les avis !! ».
Il est bon de faire un rappel historique et de revenir à 1789: un député, Clermont-Tonnerre dit des choses qui sont une "feuille de route" face au communautarisme: " Il faut tout refuser aux juifs comme nation, et accorder tout aux juifs comme individus. Il faut qu'ils ne fassent dans l'État ni un corps politique ni un ordre ; il faut qu'il soient individuellement citoyens ".
Remplacer "juifs" par "musulmans" et vous aurez un programme qui conviendrait à beaucoup de Français...
Je reviendrai sur ce point qui mérite d'être débattu, mais c'est dimanche, presque 10 heures du matin et je n'ai toujours pas pris de douche et mon identité "hygiéniste" semble prendre le pas sur toutes les autres...