Le salon géopolitique de Passion-Histoire

merci - votre point de vue est clair.

mais je pense que chez sarkozy le sentiment "antichiracien" soit une clef importante : il a pris beaucoup de positions en 2007/8 par esprit de contradiction, non ?

vous êtes plus dans la politique intérieure que dans la diplomatie. Cela dit dans les deux cas, les sentiments d'un chef d'Etat ne sont qu'un élément parmi d'autres - je pense entre autres au poids des lobbies internes à la sphère gouvernementale (quai d'Orsay, états-majors, CEA ...) ou externes (grandes entreprises semi-publiques comme AREVA ou EADS).

Plutôt la période excitante de la prise de pouvoir s'éloigne et plus ces appareils pèsent dans des décisions - qui sont toujours délicates à prendre tant les paramètres à apprécier sont nombreux et difficiles à pondérer.

La facilité est de faire aboutir ce qui a été lancé (car il y a de bonnes chances que ça marche) et de s'approprier le succès (comme Mitterrand avec le TGV !). Prendre le contre-pied du prédecesseur c'est devoir assumer la responsabilité d'un changement de cap erronné en cas d'échec ...

je remonte ce fil.

Comment comprendre certains choix récents de notre président: vendre des navires militaires aux Russes ? refuser d'envoyer des troupes en afghanistan ?

est-ce un retournement ? ou bien un signe de mauvaise humeur suite aux divers gestes peu amenes d'Obama à l'égarde des européens ?

je suis encore plus perplexe quand je vois par exemple :

a - le "guardian" anglais annoncer que Sarko a proposé à HM Government une coopération nucléaire militaire ! c'est un signe tres positif si c'est vrai pour la construction d'une defense de l'UE : s'agit il d'une tentative de séparer les anglais des usa ? ou d'une façon habile pour la france de placer sa force nucleaire dans un cadre atlantique (avec "special relationship" à 3 usa+uk+f ?)

b - sarko accueil medvedev comme un tsar : non seulement il lui vend des navire (des mistrals : vend il du vent ?) mais en plus il lui cede un palais à côte de la tour eiffel et france-soir en gage ! ca doit faire plaisir à poutine - mais peut-être pas à washington ...

Ou un effort pour que le prochain porte avion franco-anglais soit propulsé par un réacteur nucléaire français à la place d'une turbine à gaz d'une autre origine.

Cette première sortie, si elle se révèle authentique, est invraisemblable du point de vue de la crédibilité de notre capacité de dissuasion nucléaire. En effet, comment peut-on raisonnablement concilier le maintient de notre souveraineté quant à la mise en oeuvre et la doctrine d'emploi de nos forces stratégiques dès lors qu'elles seraient mise en commun avec celles d'un pays étranger, fusse-t-il notre allié ?

je vous propose d'en débattre dans le chapitre "force de frappe" de la section "défense" de ce salon (j'y ai indiqué la référence du guardian).

je continue : sarkozy à washington pour une grande reconciliation avec le couple obama ! c'est de plus en plus clair...

A mon avis, la politique étrangère de la France en 2010 sera plus intense que les années précédentes. C’est pas compliqué à comprendre, puisque sous la présidence Chirac il ne sortait pas beaucoup le vieux monsieur et sous la présidence Sarkozy…il s’est davantage préoccupé de la politique intérieure. Normal, c’est le premier ministre président.
Plus sérieusement, je pense que le gros des réformes et des stratégies de communication est passé. C'est-à-dire qu’il y a du temps qui se dégage pour communiquer avec l’étranger. Cela peut sembler bizarre comme raisonnement mais je la trouve bien cette analyse.

Après, cette façon de mener la politique étrangère est …étrange. Je ne vois pas de logique, pas d’ancrage, pas de certitude. En ce sens de l’interprétation, l’attitude internationale s’est traduite par un léger recul, une prise de distance. L’attitude américaine conforte cette idée. On note régulièrement qu’Obama çi, qu’Obama ça. Cependant, les américains sont sûrement mieux renseignés que nous-même sur notre propre pays. La distance qu’ils ont prise lorsque Obama est arrivé à la Maison Blanche et les mois qui ont suivis est une source d’inquiétude. N’oublions pas la forte poussée nationaliste, la « crise identitaire »… Nous n’avons qu’1 actif pour 3 qui ne le sont pas, et, on s’est cru à l’époque napoléonienne ou de louis XIV, alors que s’est tout l’inverse ! Cette prise de distance n’est donc pas qu’un simple fait de personnalité, il y a très probablement du rapport détaillé derrière tout ça. Quant au rapprochement, je l’estime davantage lier à une obligation diplomatique. « On ne laisse pas un allié (nucléaire) qui cherche sa route ».
De toute façon, avec la mondialisation, cela va être compliqué pour comprendre la politique étrangère. Je l’a perçois de moins en moins fondé sur un marchandage économique. Le contrôle économique de la population… une idée ? réalité ? fantasme ? Bref, la France a perdu beaucoup de temps à se replier sur elle-même. Elle a laissé des gros pâtés dans plein de coin du globe, fragilisant par la même occasion ses positions extérieures et depuis l’intérieur…elle n’est pas radieuse. Pour la note positive, espérons que l’année 2010 soit une bonne année pour le vignoble.

Je trouve le point de vue de Ménandre très instructif et je compléterais ainsi : la politique étrangère de N Sarkozy obéit certainement pour une large part à des objectifs d'ordre interne et doit être resituée dans un contexte mondialisé dans lequel les "camps" n'ont pas de frontières bien tracées. A la limite revenir dans l'OTAN en 1980 aurait eu un sens clair (faire face à l'URSS, rejeter la détente giscardienne) mais en 2010, l'OTAN n'a plus d'ennemi, alors à quoi bon y entrer ? la question est différente pour l'Estonie, j'en conviens.

Quant à l'éloignement des Etats Unis, est -il si vrai et si grave ? ne peut on pas penser que l'Europe ne représente aucun enjeu pour Washington de nos jours ? En effet, sur le plan stratégique nous sommes suffisamment amicaux pour ne pas inquiéter les E-U et insuffisamment courageux pour répondre à leur unique question (envoyer des renforts aux côtés de l'US army). Nous ne sommes plus sérieusement menacés par l'URSS. Donc ni crainte ni intérêt pour eux du fait de l'UE.

Sur le plan économique, nous avons parfaitement admis (sous le concept menteur de marché unique européen) l'ouverture de nos frontières aux capitaux et aux produits des multinationales (je n'ose pas parler d'industrie américiane - ce serait absurde). En plus la BCE veille à maintenir la parité €/$ à un niveau très favorable à la zone $ ! Donc là aussi Wall street est satisfaite et n'a rien à nous demander de plus.

Dès lors Obama (où les think tanks qui préparent ses décisions), sûr de ces arrières "européens" peut se tourner vers la Chine, la Russie et le reste du Monde - là où il y a des enjeux stratégiques et économiques, des pays qui hésitent à s'aligner sur les demandes américaines - voire qui auraient des véléités hostiles.