Le salon géopolitique de Passion-Histoire

J'avais du Président de la République française l'image d'un "europhile" : il avait défendu le oui aux referendums de 1992 et 2005, il s'est battu pour faire passer la mini-constitution, il a été un Président de 2008 très actif.

Cela étant, 30 mois après son élection, je serais porté à tempérer ce jugement en soulignant notamment
- la volonté de l'Elysée d'exister sur la scène internationale sans se préoccuper de ce que pensent les institutions communautaires (dont la BCE) ou les Etats partenaires ;
- le soutien apporté à H Van Rompuy et à la Baronne Ashton - ce qui signifie clairement le choix d'un "profil discret"
- l'attention portée à des schémas bilatéraux (Paris-Londres; Paris-Berlin; Paris-Washington; Paris-Pékin)
- la motivation commerciale (et commercialo-militaire) d'une diplomatie axée sur les ventes de Rafales ou de centrales nucléaires par des entreprises franco-françaises (et historiquement liées à l'Etat français).

Bref contrairement à ce qui été écrit ailleurs je ne crois pas au changement de posture avec le temps qui passe mais plutôt à un décalage : discours europhile pour faire plaisir aux élites europhiles - et actions très réalistes au quotidien devant les limites opérationnelles de l'UE.

je complète par la vente des Mistral à la Russie et le refus de s'engager en Afghanistan. Dans ces deux cas, il n'y a pas même la tentative de faire croise à une harmonie européenne.

Je n'ai pas d'infos en dehors de ce que dit la presse sur la crise financière grecque : peut-être là y a -t-il un minimum de solidarité européenne ?

Je pense qu'il veut clairement que la France soit une entité à part entière sur la scène internationale. Aux accords bilatéraux sus-cités on pourrait tout bêtement rajouté Paris-Bruxelles, non pas en tant que capitale belge bien sur mais en tant que siège de l'UE.

Après il n'est un secret pour personne que:

1_ Nicolas Sarkozy est quelqu'un d'ambitieux.
2_ L'UE repose en bonne partie sur l'entente Franco-Allemande, entente quelque peu entachée par une coopération - à titre individuelle - difficile entre les deux chefs d'état, au début du mandat de Sarkozy.

L'engagement de Sarkozy dans le projet de l'UPM est également symptomatique de ce que vous soulevez. Je ne vais certainement pas lui reprocher de vouloir redorer le blason de la France. Je craints cependant que la multiplication des projets ne se fasse au détriment de leur qualité ce qui pourrait se retourner contre nous à moyen terme. (Instabilité des accords sur l'armement par exemple avec le Brésil, la Libye, etc).

Lord_Akhen@ton

je vais tenter une reflexion historique : l'UE c'est un peu le saint empire romain germanique. On a quelques cérémonies symboliques, un drapeau, des réunions régulières, un vaste territoire... mais à part cela chaque Etat membre (enfin chacun des grands Etats membres) fait à peu pres ce qu'il veut comme il le peut ...et chaque Etat choisit des alliés privilégiés hors de l'Empire/union pour renforcer sa position au sein de l'Empire/union.

On est parvenu aux antipodes du modele carolingien de 1957 qui consistait à réunir un petit nombre d'Etats voisins et étroitement solidaires.

Que faisait la grenouille encore, assise à côté de ce Boeuf???

dans l'affaire grecque il semble que sarkozy ait plutot adopté une position europhile en essayant de se passer de l'aide du fmi et en cherchant à creer et faire travailler un embryon d'un gouvernement economique de l'ue (ou de la zone euro) - avec un succès limite du fait de la rigidite allemande.

comment comprendre cela ?

le monde de ce weekend a fait un article court mais instructif sur les effets de la crise de l'euro sur l'ue.

1 - il y a au moins un perdant : la commission baroso en premiere ligne qui est completement absente du debat
2 - il y a des gagnants :
a - la france qui est au centre de tout (ou "serait" plutot à mon avis)
b - le president du conseil (van rompuy qui aurait pris la place de baroso pour "presider" les seance préparées en coulisse par sarkozy), SUR CE POINT LA je suis guere convaincu
c - les americains qui par la bouche de leur secretaire au tresor auraient lourdement pese sur les instances europeennes (et berlinoises)
3 - ceux qui sont en position incertaine :
a - les allemands incontournables mais dont la position est purement defensive (et qui au passage ont recuperé la pdce de la bce pour un des leurs)
b - la bce qui a ete active mais dont l'independance et la rigueur monetariste ont ete ecornees ...

je suis ok pour dire que la crise pourra pas rester sans effet sur la complexe organisation des pouvoirs au sein de l'ue et qu'actuellement c'est plutot la dimension interetatique qui semble renforcee...plus que le federalisme.

Je le trouve plutot ulta europhile Nicolas Sarkozy. Il à tout fait pour sauver un euro qui est tres largement défavorable à la France. Il ne tente pas de renégocier quoi que ce soit des traités qui tue l'industrie française chaque année un peu plus. En gros il sacrifie la compétitivité et l'industrie française sur l'autel de l'Europe. Que voulez vous de plus ?

A cité de ça les allemands passent pour des europhiles sauf qu'ils détournent les traités pour servir leur propres intérêts au détriment de l'Europe. Mais c'est Sarkozy qui pose problème bien sur...

Son ambition n'est pas démesurée, il n'a pas osé poser un ultimatum pendant la crise grecque pour renegocier les traités pour une plus grande équité. Bref tout est foutu.

Tout le monde sait que personne ne veut de l'Europe fédérale et l'Allemagne encore moins, ils se foutent même d'un quelconque modèle européen. Qu'espérer à partir de là ?

Je pense qu'il faut se méfier de la façon dont la presse rend compte de négociations aussi délicates que celles qui touchent aux devises et aux dettes des Etats. Je n'en ai pas moins noté avec étonnement la spectaculaire intervention des Etats Unis dans l'affaire de l'€- intervention fort peu commentée (un article en page intérieure du monde de jeudi soir) du secrétaire au Trésor des Etats Unis en visite à Berlin - fait pour le moins inhabituel pourtant ! J'ajoute que les tenants et aboutissanst de la position américaine m'échappent entièrement : veulent ils plomber l'UE et l'€ pour éviter qu'il fasse de l'ombre au $ (on évoque en effet des échanges de € contre des $ de la part des Chinois) ? ont ils peur pour wall street qui serait très secouée par un défaut de paiement des Etats d'Europe ?

Je partage la conclusion de Marc 30 et non pas celle de Heu : la gouvernance de l'UE sera sans doute modifiée dans un sens intergouvernemental. En effet la commission peut difficilement s'impliquer davantage : elle n'a a aucune tutelle sur la BCE ni sur les banques commerciales, elle ne peut emprunter et surtout elle est très affaiblie par sa structure même. On ne mesure pas à quel point les commissaires sont aujourd'hui en fait les délégués des Gouvernements qui les ont nommés - loin de défendre l'intérêt général de l'Union, ils défendent leurs Etats d'origine. Or parmi ces Etats on en trouve bon nombre d'"eurosceptiques" ou tout simplement d'Etats exclus de l'€ et donc indifférents à la crise grecque.

cependant je doute que le président du conseil puisse vraiment renforcer son action - il n'a pas vraiment l'étoffe (mais je puis me tromper).

Le plus grave me semble être le fossé franco-allemand qui se creuse avec plus que jamais une Allemagne "fourmi" qui a fait des efforts budgétaires et sociaux énormes (y compris sur l'âge de la retraite) et une France "cigale" qui chante l'air de la rigueur sans aucune vraisemblance (35 heures, RSA, etc ...).

Etre europhile, ce n'est pas forcement tout voir au travers du prisme de l'UE.
Il faut aussi savoir agir pour la France de temps en temps (tant que c'est possible).
Je pense que Nicolas Sarkozy reste très européiste.
Quant au décalage, c'est un peu pareil pour tous les hommes politiques.