Tonr a écrit:
Sur les électeurs en proie à ces difficultés diverses et pour la plupart bien réelles, le discours moralisateur et diabolisant habituel des élites bobos vues comme nanties et à l'abri dans leurs beaux quartiers fait l'effet d'une provocation et induit maintenant l'effet opposé: plus on joue le couplet "peste brune, bruit de bottes et bête immonde", plus ces électeurs ont l'impression que les élites se contrefichent de leurs problèmes, plus MLP engrange.
Absolument. On voudrait faire monter MLP qu'on ne s'y prendrait pas autrement.
http://www.rue89.com/2011/03/25/pourquo ... ree-196951Tonr a écrit:
La plupart de ces électeurs tentés par le FN savent bien que MLP ne sera jamais présidente et n'ont qu'une idée assez vague du programme de ce parti, mais beaucoup semblent penser qu'un FN fort forcerait les partis de gouvernement a enfin les "écouter" et à prendre la mesure de leurs difficultés.
Cela vous rapproche des théories d'un Todd qui lui aussi espère que les "partis de gouvernement" seront bientôt contraints de réviser leurs postulats fondamentaux.
http://www.marianne2.fr/E-Todd-Face-au- ... 04202.htmlOr ce que l'on constate est précisément l'exact contraire, tant sur la crise des dettes souveraines induites aussi par un euro cher comme monnaie unique que sur un libre-échange aux effets dévastateurs concernant des pans entiers de nos économies occidentales: une fuite en avant auto-entretenue des élites et une non prise en compte de ces problématiques qui éclatent pourtant à présent aux yeux de tous (et notamment, vous le rappeliez, depuis l'effondrement des dogmes néolibéraux simultanément que survenait la crise). Je ne partage définitivement pas cet espoir, systématiquement douché depuis 20 ans et l'institutionnalisation poussée de l'Europe.
En fait, en entendant Todd, on croirait entendre Mélenchon vaticiner encore et toujours de la fameuse et dorénavant mythique "autre Europe", sociale cette fois-ci, évidemment. Celle dont j'entends parler depuis vingt ans sur le même mode incantatoire, c'est à dire depuis la soumission des élites à la pensée unique qui acta la victoire définitive des forces libérale-libertaire, et conséquemment l'abandon de toute volonté de transformation des structures sociales. Dont Mélenchon est l'illustration même, lui qui signa des deux mains pour Maastricht (pour faussement s'insurger 15 ans plus tard du traité de Lisbonne qui n'en est que son extension logique et prévisible) et participa au gouvernement Jospin, c'est à dire celui qui privatisa le plus de ces trente dernières années. Et dont Chevènement dans son dernier livre dit explicitement qu'il en démissionna pour la raison principale (l'autre étant la supposée atteinte aux principes de la République lors de l'affaire corse) qu'il ne pouvait cautionner plus longtemps la casse des services publics et le démembrement des entreprises y afférent, voulu par le processus avancé de libéralisation que nous imposait alors (et nous impose toujours, dramatiquement) les directives de la Commission européenne.
Or ce que l'on constate là encore, c'est à présent l'imposition en particulier par l'Allemagne d'un pacte de compétitivité qui en est son exact négatif. Et il n'est jamais sans conséquence de pêcher par naïveté. Ceux qui croient que l'Europe est la solution d'avenir pour ne serait-ce que sauvegarder un tant soit peu nos modèles sociaux en voie de délitement y seront pour leurs frais. Puisque n'ayant pas encore compris - ou voulu comprendre, soit par lâcheté intellectuelle soit en redoutant les conséquences politiques induites par leur subite prise de conscience - que l'eurolibéralisme qui domine outrageusement les mentalités du Berlaymont est précisément le vecteur majeur de la mondialisation et de ses effets résultants. Ainsi donc, et là Todd pose excellemment bien le problème: un critique du mondialisme qui refuserait par principe un protectionnisme à l'échelle européenne en accord avec nos partenaires, ou à défaut (ce qui est le plus probable) une sortie programmée de la zone euro, est au mieux un incapable notoire, au pire un grossier imposteur qui sert les intérêts de ceux qu'il prétend combattre.
A présent une anecdote: Jean-françois Kahn il y a quelques jours commentant les résultats des cantonales au micro d'un journaliste et disant que MLP était la seule à avoir réussi la synthèse des solutions aux problèmes les plus graves posés aux français (de mémoire: insécurité, chômage, immigration, etc...). A cet instant, et vue les louanges qu'il venait de tresser à notre "gauloise", une question instantanément méritait d'être posée (et qui bien évidemment ne le fut pas): mais pourquoi diable M. Kahn n'appelez pas vous-même à voter pour Marine Le Pen ?
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