Nous l'avions déjà écrit dans les pages précédentes Caesar Scipio.
La seule différence entre Narduccio et moi-même à ce sujet se fondait sur la place de la Commission dans le cheminement législatif de l'Union (règlements, directives, décisions). Il la présentait comme subordonnée - en honnête courtière pourrait-on dire

- au Conseil européen, au Parlement et au Conseil de l'Union, ce qui n'est pas le cas.
Une fois nommés les commissaires sont pratiquement intouchables et ne dépendent plus de personne pendant 5 ans. C'est pour moi tout le problème des carences démocratiques qui s'observent dans la gestion de cette boutique, le plus souvent entre les mains de lobbys, technocrates et autres groupes de pression (on ne fait jamais rien de bon avec pareil système !).
Narduccio avançait que la Commission suivait forcément un "programme" donné par le Conseil européen - chose qui n'est pas exacte, la "feuille de route" n'est pas un programme précis -, puis que le Conseil de l'Union et le Parlement pouvaient retoquer toute proposition de la Commission. C'est vrai en théorie - surtout concernant des points très techniques sur des compétences partagées (Narduccio avançait surtout des exemples dans l'énergie qu'il avait suivi), mais je nuançais (et vous aussi) en cas d'absence de majorités nettes (au Parlement - pas forcément consulté d'ailleurs - et au Conseil de l'Union), en avançant que la Commission et sa bureaucratie pléthorique l'emportaient souvent, rendant, au final, ce processus législatif oligarchique, bien éloigné des préoccupation des citoyens européens.
Voilà pour le résumé de ces longs échanges - sous le contrôle de Narduccio, bien entendu.
Nous en étions demeurés là, l'un n'étant pas parvenu à convaincre l'autre.
Cela dit, ce "machin", par de multiples dilutions de souverainetés, s'accompagnant d'une organisation alambiquée et poussive, n'apparaitra jamais légitime aux yeux des populations européennes, qui, aujourd'hui, s'interrogent également, à juste titre, sur la légitimité de leurs propres élus nationaux (la plupart du temps totalement soumis à des décisions prises à 27).
Bref, dans un système conçu comme fédéral depuis Maastricht, mais qui comporte encore un mode de fonctionnement confédéral - les institutions nationales ne sont pas pleinement hors-jeu - on s'y perd.
Face à ce constat, certains (Narduccio l'a fait plus haut) expliquent qu'il "faut plus d'Europe" pour sortir de ce système plein de contradictions et, très souvent, inopérant au final. D'autres - comme moi - pensent qu'il en faut justement moins. Car l'organisation de ce système est fortement coûteux et empêche toute politique souveraine et libre dans le pays-membre.
Les Norvégiens, Suisses, Anglais, Islandais, entre autres, sont-ils plus bêtes que d'autres de ne pas vouloir faire partie de cette organisation politique particulièrement critiquable ? Je ne le pense pas. En France cela est devenu un véritable dogme, dont le maintien inéluctable nous entrainera dans les abîmes profonds de la dépendance et de la stagnation.
Car en observant leur richesse ou leur degré de développement, on ne peut pas dire qu'ils soient à la traine dans le contexte de la mondialisation.
En France - pays spécialiste des fables

- "on" nous sort les mêmes boniments depuis 1992 : "à plusieurs, entourés par nos partenaires, on sera plus fort que les Etats-Unis ou la Chine". Foutaises et histoire pour faire dormir les enfants que cela.
Car depuis 30 ans, à part avoir permis la suprématie allemande sur le continent (véritable cause du départ des Anglais), en quoi la situation économique et sociale de la France est meilleure ?
Elle est pire comme nous le savons malheureusement : les industries françaises ont été taillées en pièce sous couvert d'une UE - n'ayant plus à rien à voir avec la CEE (qui protégeait les économies des pays-membres et promouvait la solidarité d'économies proches) - instaurant la concurrence déloyale et le moins-disant social et environnemental, le modèle social français a été dépecé progressivement depuis 1995, le chômage de masse est devenu la règle (que plus personne ne prétend changer), les fractures sociales ont, forcément, progressé.
Bref, l'heure du bilan a peut-être sonné.