Barbetorte a écrit:
C'est vous qui ne voulez rien comprendre. Je n'ai jamais dit qu'il n'y avait qu'un modèle rigide qu'il fallait plaquer partout sans discernement. J'ai dit qu'il y avait un principe absolu et intangible, celui d'égalité en dignité et en droit de toutes les individus et ce principe est foulé aux pieds par les islamistes. Dans le respect de ce principe, on peut très bien laisser en place une organisation sociale et une culture traditionnelle. En Nouvelle Calédonie, par exemple, on a laissé en place des structures traditionnelles en certaines zones. Comme la forme individuelle de la propriété était inconnue, on y adapté la législation applicable localement qui reconnaît un droit de propriété communautaire totalement étranger aux dispositions du code civil. Cela n'empêche nullement que les Canaques vivant dans ces territoires ne soient par ailleurs citoyens à part entière avec tous les droits attachés à cette qualité. On peut aussi rappeler le cas de Mayotte. Non seulement les Mahorais n'ont pas voulu de l'indépendance, mais encore ils ont décidé récemment tout à fait librement l'abrogation du statut spécial qui laissait en place un droit des personnes et des instances judiciaires traditionnels. Visiblement, le système civisationnel de la France métropolitaine convient très bien aux Mahorais.
Ce que vous venez de décrire est typiquement le modèle démocratique colonial, on laisse les indigènes avec leur folklore mais on impose le modèle politique, économique, sociétal, bref le coeur du système civilisationnel reste entre nos mains.
Barbetorte a écrit:
Le califat, tel que vous le présentez, est un régime totalitaire et, à ce titre, inacceptable. Cela n'empêche pas que beaucoup pourraient vivre heureux sous un tel régime. Mais selon ce critère on pourrait aussi fort bien prôner le nazisme. Beaucoup d'Allemands vivaient très heureux sous le nazisme. De nombreuses personnes s'accomodent très bien de la tyrannie. Mais il faut aussi penser à ceux à qui cela ne convient pas. Contrairement à vous, je n'admets pas, par exemple, qu'on puisse sacrifier la minorité copte. Pour ma part, je préfèrerais de loin être musulman à Mayotte que copte en Egypte.
Alors pensez à ceux qui en démocratie veulent vivre sous un
Califat : )) Et votre exemple Copte ne tient pas car il n'y a pas de charia complète en Egypte, qui aurait pu tester le modèle contractuel de protection de la dhimma avec le modèle démocratique laïc actuel qui effectivement ne semble pas très avantageux pour les Coptes.
Barbetorte a écrit:
Déjà, c'est faux pour toute l'Afrique du nord. Ce n'est vrai, et en partie seulement, que pour l'Afrique subsaharienne. Car il semblerait que vous ignoriez que l'Afrique évolue à grande vitesse. Elle s'urbanise et s'industrialise. Les modèles sociaux traditionnels correspondent de moins en moins aux nouveaux modes de vie qu'adoptent de plus en plus d'Africains. Votre vision de l'Afrique est celle d'un colonial de la Troisième République. Il faudrait vous mettre au courant des réalités. Aujourd'hui il y a des usines, des universités, des banques etc où travaillent des diplômés. Et ces diplômés, s'il sont encore plus ou moins attachés par des liens traditionnels à une communauté familiale, villageoise ou tribale se sentent aussi citoyens de leur pays. Il peut parfaitement y avoir coexistences d'institutions traditionnelles au niveau local et d'institutions correspondant aux standards modernes au niveau national : voir ci-dessus ce que je disais au sujet de la Nouvelle Calédonie et de Mayotte. Du reste, si la démocratie d'origine européenne n'est pas adaptée à l'Afrique sub-saharienne, il n'est pas évident que le charia, originaire du monde arabe, le soit beaucoup plus.
C'est encore typiquement ce que je dénonce à savoir l'imposition d'un modèle civilisationnel démocratique contrôlant l'essentiel des rouages sur un tissu traditionnel qui, je vous l'accorde, est de plus en plus agressé par la mondialisation occidentale.
Barbetorte a écrit:
Evidemment, si vous pensez qu'il ne peut y avoir que des rapports de force avec dominés et dominants, vous ne pouvez que rejeter l'idée de démocratie. On peut cependant s'attarder un instant à l'idée de contrat social. Ce n'est pas complètement idiot.
Oui il y a toujours des rapports de force y compris en Occident où les élites politiques et économiques dominent le reste de la population. Ne soyez pas utopiste. Le contrat social est justement issu de l'histoire occidentale qui suite aux guerres de religions ont décidé de substituer les communautés de lignée et de religion par des lois issus de l'Etat monarchique. Je suis d'avis que ce modèle n'est pas forcément adaptable à toutes les sociétés qu'il y a d'autres modèles. Dans un
Califat par exemple, les communautés religieuses sont admises et chacune contracte un rapport de protection et de d'impôt avec l'Etat califal.
Barbetorte a écrit:
Le problème est inverse. L'Afrique souffre d'un manque de démocratie et non d'une démocratie qui serait inadaptée par nature. Mais cela s'améliore doucement. Le Sénégal est un bon exemple à cet égard. Les dernières élections présidentielles se sont, malgré les craintes qu'ont pouvait avoir, bien passées. Il faut en finir avec la mentalité coloniale selon laquelle ce qui convient aux Européens est forcément inadapté aux Africains. Depuis des siècles, le monde est organisé en Etats souverains. On peut le regretter, mais c'est ainsi et ce n'est pas une spécificité européenne. Il en était de même dans l'empire ottoman et en Extrême-Orient. Partout l'entrée des étrangers y était contrôlée et la présence d'étrangers pouvait être, selon les pays, soit totalement interdite, soit tolérée à certaines conditions. Peut-être avez-vous entendu parler de René Caillé, le premier Européen à être entré à Tombouctou. Pendant son voyage d'exploration, il s'est fait passer pour un Egyptien. Car, s'il avait déclaré être français, donc chrétien, il aurait immédiatement été mis à mort. C'était en 1828. Juste pour dire que le monde musulman n'est pas aussi hospitalier que vous voulez le faire croire. Il est faux de prétendre que les non-nationaux en Europe n'ont aucun droit. Les résidents étrangers n'ont pas de droits civiques, mais ils ont exactement les mêmes droits civils que les nationaux. S'ils sont entrés illégalement, ils n'ont, en principe, pas le droit de rester, mais, en attendant qu'on ait statué sur leur cas selon les procédures légales, on ne peut pas les traiter n'importe comment. De plus existe le statut de réfugié politiques qui accorde un droit de résidence à ceux qui sont en danger pour raisons politiques dans leur propre pays. Enfin, pour ceux qui résident depuis un certain temps, il y a possibilité de naturalisation. Dans les monarchies du Golfe Persique gouvernées sous l'empire de la charia, on est infiniment moins respectueux pour les étrangers et la naturalisation est impossible, même pour les musulmans.
Vous admettez donc qu'il n'y a pas d'égalité de droit ABSOLU y compris en démocratie où ces droits dépendent bien de la nationalité, ancêtre du concept de communauté raciale. Quand je parle du
Califat je vous parle de la théorie selon laquelle cela devrait appliquer et comme cela a été appliqué avec plus d'authenticité à l'époque des Califats de l'époque classique, je suis très loin d'idéaliser le monde musulman contemporain. Donc cesser de me donner en exemple l'Egypte ou le Golfe persique qui sont très loin du véritable modèle califale et qui justement reprennent les idées occidentales de nationalités contraire à la charia d'où les problèmes que vous soulignez. Si à Tombouctou on y appliquait réellement la charia au 19ème siècle, il aurait suffit à René Caillé de demander un sauf conduit en tant que visiteur Chrétien pour pouvoir circuler librement.
Barbetorte a écrit:
Ils ont de quoi effrayer. Il suffit de voir comment ils se comportent partout où ils passent.
Ne confondez pas les hommes et les institutions. Laissons ces hommes mettre en place de vraies institutions islamiques au lieu de vouloir imposer les nôtres et peut être que cela se passera mieux.
Barbetorte a écrit:
Est-ce que le califat et la charia peuvent s'adapter pour :
- admettre que la souveraineté appartient au peuple,
- admettre le principe un homme une voix sans distinction de religion,
- admettre la liberté de conscience, à savoir liberté d'adopter la croyance ou le culte de son choix, la liberté d'être athée, la liberté de quitter sa religion,
- admettre la liberté d'expression dans tous les domaines, y compris le domaine d'une autre religion que l'islam ou celui de l'athéisme,
- renoncer à la coercition en matière de moeurs,
- abolir les châtiments corporels,
- reconnaître les mêmes droits civils et civiques aux hommes et aux femmes ?
Je sens un air inquisiteur. Vous voulez un
califat démocrate, or ce sont deux modèles différents. Un partisan de la charia pourrait tout au temps vous demander : admettez vous le droit à la souveraineté divine dans la législation ? admettez vous que tout le monde n'est pas compétent dans tout les domaines et que la science politique doit être laissée aux spécialistes du droit musulman ? admettez vous la liberté aux femmes musulmanes de s'habiller comme bon leur semble ? admettez vous que le blasphème blesse des millions de gens ? admettez vous le fait d'avoir un degré de pudeur vestimentaire élevé ? admettez vous la différence biologique homme-femme et de ce fait des droits différents découlant de cette différence naturelle ?
Barbetorte a écrit:
Pas seulement une frange de la bourgeoisie occidentalisée. Les Tunisiens dans leur majorité, toutes classes confondues, ont adopté la démocratie sans aucune équivoque par des scrutins incontestables. Vous le niez, mais c'est la réalité. Les faits sont têtus.
Je vous ai déjà dit mon avis là dessus par rapport au Mali, je pense que cette frange occidentalisée, loin d'être majoritaire étant donné que c'est le parti islamiste Nahda qui a remporté les élections, et ce modèle démocratique imposé en Tunisie découle de l'énorme influence occidentale exercée sur ces régions. Le jour elle diminuera, ces gens se tourneront vers leur modèle plus traditionnel.
Barbetorte a écrit:
Mais si, ils ont droit au chapitre. Si vous aviez suivi les dernières élections présidentielles, vous auriez remarqué qu'il y avait deux candidats communistes révolutionnaires à qui on a accordé le même temps d'antenne sur les réseaux publics de radio et de télévision : liberté d'opinion, liberté d'expression. En 1969 ou 1974 il y avait eu un candidat royaliste. Lorsqu'il faut prendre des mesures législatives, on consulte les diverses tendances politiques et, s'il y a lieu, les organisations intéressées non politiques. Il y a débat, possibilité d'amender le projet présenté puis vote. On adopte le choix de la majorité et la minorité doit s'incliner pour l'évidente raison qu'on ne peut pas décider une chose et son contraire. Pure question de logique. Mais cela se fait dans le respect des principes fondamentaux. Il est exclu que la majorité impose des dispositions contraires à ces principes. Il est malheureux que je doive vous rappeler ce B-A BA.
Ne soyez pas si idéaliste et utopiste par rapport à la démocratie. De nombreuses voix s'élèvent en Occident (certes encore minoritaires) notamment à l'extrême droite qui réclament un changement systémique de l'Occident et qui se refusent à prendre part aux élections si ce n'est par un vote contestataire. Leur critique du modèle démocratique ne passe jamais dans les médias officiels. En Occident il est très difficile d'être anti-démocratique, si ce n'est pour être traiter de "totalitaire" comme s'il n'y avait absolument aucun modèle intermédiaire.