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 Sujet du message: Re: Etat islamique et conflit en Syrie
MessagePosté: Dim 4 Oct 2015 23:40 
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Bon le lien ne fonctionne pas, ultime tentative:

http://www.defense.gouv.fr/irsem/public ... -regionale

_________________
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 Sujet du message: Re: Etat islamique et conflit en Syrie
MessagePosté: Lun 5 Oct 2015 22:35 
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Artigas a écrit:
Paul Ryckier a écrit:
Artigas a écrit:
Bonsoir, j'essaie de mettre le lien:

http://www.defense.gouv.fr/irsem/public ... -regionale


Je trouve que le moteur "rechercher" est temporairement hors service...

Cordialement, Paul.


Bonsoir Paul, je tente à nouveau de mettre le lien:

http://www.defense.gouv.fr/irsem/public ... -regionale


Artigas,

de nouveau ça donne "module non trouvée"
J'ai essayé de nouveau avec "rechercher" et il donne de nouveau "fonction temporairement désactivée"
J'ai alors cherché dans le "INSERM" alors j'ai vu toutes les entrées mais votre article n'est pas là...
Et quand on tape sur "Notes de Recherche stratégiques" vous recevez "page not found"
Doit-on inscrire avec nom et mot de passe pour avoir acces?

Cordialement, Paul.


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 Sujet du message: Re: Etat islamique et conflit en Syrie
MessagePosté: Mar 6 Oct 2015 08:19 
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Bonjour Paul.

Pour pouvoir consulter l'article de l'irsem, vous tapez dans Google le titre de l'article intitulé La révolution syrienne: un soulèvement populaire inachevé obstrué par la géopolitique régionale.

Bien amicalement.

_________________
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 Sujet du message: Re: Etat islamique et conflit en Syrie
MessagePosté: Mar 6 Oct 2015 21:36 
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carlo68 a écrit:
-Soulèvement des tribus sunnites contre le pouvoir: je ne vois pas trop le caractère spécifiquement tribal du soulèvement [...] Les tribus ne sont clairement pas le vecteur premier du soulèvement syrien.

C'est pourquoi je me réjouis toujours de conserver ce vieil article de 2012 sous la main : http://www.jamestown.org/single/?no_cache=1&tx_ttnews[tt_news]=39452
carlo68 a écrit:
notons d'abord que certaines tribus regroupent des sunnites et des chiites, ensuite les tribus, y comprit les sunnites, sont restées soit attentistes, soit pro-gouvernementales, on se souviendra du clan sunnite Berri d'Alep qui sera la première victime de l'offensive rebelle de 2012.

Pour aller plus loin, des clans ou des individus sunnites sont ralliés au régime, soit parce qu'ils en sont récompensés, soit parce qu'ils dénoncent la rébellion (djihadiste ou non) et la guerre civile, arguant que le pays allait mieux avant.

Des individus non sunnites ont rallié la rébellion par progressisme. Je ne sais pas si beaucoup ont survécu ou s'y sont maintenus après les combats contre les djihadistes et les entourloupes d'Erdogan.
carlo68 a écrit:
Les rebelles (ASL, Nusra, Daesh) s'attaquent partout aux structures traditionnelles (le fait d'être sunnites ne protègent pas les adeptes du soufisme, qui voient leurs sanctuaires détruits et leurs leaders décapités).

Les talibans agissent de même en Afghanistan. La clé des tribus est leurs patriarches, qui peuvent concurrencer les djihadistes en négociant des compromis pour éviter la guerre. Les djihadistes les assassinent pour désorganiser les tribus et en récolter les survivants mécontents. Sans base tribale, les sunnites n'ont aucune raison de se ranger comme des soldats loyaux derrière leurs suzerainetés patriarcales. Je pense que cette anarchie sociale et politique accélère la décomposition du sunnisme, qui devrait finir par avoir le choix entre le nihilisme djihadiste sunnite et l'individualisme libéral, à la fin de quoi le libéralisme finira par effacer un totalitarisme sunnite auto-destructeur.
carlo68 a écrit:
-Les sunnites pauvres sont les acteurs principaux du soulèvement: j'aurai tendance à être relativement d'accord avec cette affirmation, qui doit être précisée.

Les laissés-pour-compte du régime sont les membres de ses tribus les moins loyales et les plus suspectes de trahison, comme en Irak, en Syrie, en Arabie saoudite...
carlo68 a écrit:
Sunnites pauvres, sans doute, des campagnes, en grande partie, mais ce n'est pas non plus une chouannerie défendant son terroir.

Les zones tenues par les rebelles sont obstinément celles majoritairement peuplées par des Syriens arabes sunnites. Ce n'est pas tant qu'ils défendent des territoires où la démographie les avantage, tout comme elle avantage les non sunnites et les Kurdes chez eux, mais ils revendiquent également un pouvoir politique, avec tous les privilèges socio-économiques attenants, et un honneur de communautés bafouées depuis plusieurs générations, dominées par des communautés minoritaires et, qui plus est, à domicile... La Syrie arabe sunnite est comme la "colonie" des Syriens non sunnites. C'est une guerre d'indépendance territoriale, politique et sociale, doublée chez certains rebelles syriens d'une guerre de conquête des territoires et tribus kurdes et non sunnites. Ce sont presque les non sunnites qui se retrouvent en lutte pour leur indépendance, sans parler évidemment des Kurdes syriens qui luttent pour leur indépendance contre les Arabes syriens, sunnites ou non, ainsi que contre les Turcs voisins.
carlo68 a écrit:
-Le gouvernement syrien est un gouvernement extrémiste alaouite: d'abord Bachar El Assad est marié à une sunnite. Il fête l'Aid chaque année dans une mosquée sunnite en compagnie des principaux leaders de cette communauté, ce qui fait techniquement de lui un sunnite. [...] De toute évidence, l'"extrémisme" alaouite de Assad doit être quelques coudées en dessous de celui d'un extrémiste nazi...

Comme je l'ai écrit dans mon précédent message, le régime syrien est extrémiste ; politiquement extrémiste, sur le modèle soviétique qui l'a inspiré, pas religieusement extrémiste.
carlo68 a écrit:
Par contre nous avons joué un rôle majeur dans la "construction" de la guerre civile: nous avons adouber un Conseil national syrien sorti du néant, nous le considérons comme le seul interlocuteur valable. Nous avons affirmé dans de nombreuses réunions internationales ce qui reste notre credo: pas de négociations avec Assad, première étape déjà tracée et préalable à toute discussion: son départ. Sur ces positions maximalistes nous avons permis la légitimation de groupes armés très divers, par "sélection naturelle" il s'est avéré que les plus extrémistes étaient ceux qui réussissaient le mieux. Que les plus extrémistes étaient les plus disciplinés, les autres relevant au pire du banditisme, et au mieux s'assuraient un ancrage local, incapables d'action d'envergure.

Qui plus est, l'Occident a contribué à l'armement des rebelles. Cela dit, armer une rébellion ennemie contre un régime ennemi au point de permettre un équilibre pour que les belligérants s'entre-massacrent efficacement et longtemps peut arranger l'Occident. Je doute que les gouvernements occidentaux aient poussé jusque-là leur intelligence cynique et leur perspicacité machiavélique.


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 Sujet du message: Re: Etat islamique et conflit en Syrie
MessagePosté: Mar 6 Oct 2015 21:48 
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Artigas,

un grand merci. Comme ça ça marche...
J'ai lu l'article avec grand intérêt et j'ai beaucoup appris.

Mais l'article date de 2012, entretemps on a des nouvelles évolutions?
Une question, et je dois dire dans mon innocence et dans mon ignorance dans les spécificités du conflit...:

C'est par la Turquie que les opposants du régime sont "approvisionés en "matériel"?
Si la Turquie coupe l'approvisionement, les opposants et Daech sont dépourvu d' "alimentation" et le conflit se dégonfle...naturellement en faveur du régime, les Iraniens et les Russes? Mais ça "l'Occident" ne veut pas...?

Où est-ce que je suis trop ignorant et innocent..? :)

Cordialement, Paul.


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 Sujet du message: Re: Etat islamique et conflit en Syrie
MessagePosté: Mer 7 Oct 2015 06:01 
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Artigas a écrit:
Pour pouvoir consulter l'article de l'irsem, vous tapez dans Google le titre de l'article intitulé La révolution syrienne: un soulèvement populaire inachevé obstrué par la géopolitique régionale.

L'extrait suivant me paraît bien résumer ce que le régime a fait du conflit depuis 2012 :
Citation:
Le détournement du soulèvement populaire en une guerre civile sectaire où s’affronteraient une majorité sunnite, islamiste et salafiste à des minorités affaiblies et persécutées depuis des siècles dans cette région, était pour le gouvernement al-Assad la meilleure stratégie à adopter et à mettre en place. Il s’agissait pour lui d’éviter de perdre toute sa crédibilité et de s’assurer que ses invocations menaçantes de « tremblement de terre » régional se révèleraient être justifiées.

La pari de Bashar al-Assad semble en effet avoir été gagné dans la mesure où la situation de la Syrie aujourd’hui est catastrophique, que toute action de la part de la communauté internationale reste bloquée, entre autre, par un double véto russe et chinois, et que la « Révolution syrienne » s’est belle et bien transformée en une lutte armée apparemment sans issue.

L'article me paraît néanmoins refléter des espérances françaises, avec une sorte de transfert sur un "peuple syrien" qui "est un", aspirant au libéralisme à l'instar des révolutions françaises successives, et un déni récurrent de toute logique tribale ou généalogique.

Derrière l'agit-prop du régime, qui a resserré les non sunnites et les pacifistes derrière lui contre des rebelles présentés comme va-t-en-guerre, je pense que la perception du régime d'un conflit inter-tribal correspondait à une réalité plus profonde.

D'ailleurs, si l'on excepte les djihadistes, les confessions mystiques servent davantage à revendiquer des particularismes nationaux, ethniques ou tribaux ou claniques que de réels désaccords spirituels : les soi-disant hérésies catholiques (cathares, vaudois, protestants bohémiens, allemands, hollandais, anglicans, et jusqu'à l'orthodoxie du monde romain dominé par les Grecs) ou sunnites sont avant tout des manières d'éconduire des prétentions hégémoniques considérées comme étrangères ; je veux dire que si la majorité des Arabes et des Turcs étaient, par exemple, chiites, l'Iran et les actuels alaouites syriens pourraient tout aussi bien être sunnites. Les religions sont des étendards politiques commodes pour marquer sa différence communautaire et son indifférence politique, traduisant un désaccord et un mépris envers des étrangers dominateurs.
Paul Ryckier a écrit:
C'est par la Turquie que les opposants du régime sont "approvisionés en "matériel"?

* Turquie, sous contrôle d'Erdogan, pour ce qui ne vient pas d'Irak.

* Irak, avec les tribus sunnites hostiles au gouvernement chiite de Bagdad et les anciens baasistes irakiens, qui regroupaient souvent des personnes issues des tribus arabes non chiite d'Irak (ce qui faisait de l'Irak une sorte de Syrie inversée sur les plans sunnites/chiites durant et après la guerre froide ; les deux États, qui pourtant auraient dû s'adosser idéologiquement sous la houlette soviétique, ne se supportaient pas).
Paul Ryckier a écrit:
Si la Turquie coupe l'approvisionement, les opposants et Daech sont dépourvu d' "alimentation" et le conflit se dégonfle...naturellement en faveur du régime, les Iraniens et les Russes? Mais ça "l'Occident" ne veut pas...?

Les tribus sunnites de Syrie chevauchent les frontières libanaises, jordaniennes et irakiennes. En fait, les frontières d'Orient ressemblent aux européennes d'avant les révolutions nationales : elles ne respectent pas les autonomies et indépendances communautaires et il sembleraient que les communautés d'Orient se livrent, comme en Afrique, des conflits pour se retrouver chacune maîtresses chez elles, voir chez leurs voisins mineurs. L'Orient et l'Afrique vivent ce que l'Europe a vécu du catharisme aux premières guerres flamandes jusqu'à aujourd'hui, des conflits et tensions sécessionnistes qui finissent par dessiner des frontières nationales, selon le souhait des autochtones et non d'un lointain prince étranger et de ses troupes occupantes.

Donc, ces tribus syriennes s'approvisionnent aussi chez leurs "cousins" jordaniens, irakiens et libanais, qui les soutiennent par solidarité tribale, la tribu étant une communauté qui compte pour l'instant beaucoup plus que la nation arabe, les États arabes actuels ou les confessions mystiques. Je me demande même si les tribus rebelles syriennes ne descendent pas (patrilinéairement, les ancêtres féminins y étant abondamment brassés) des Arabes ayant envahi les Syriaques au VIIe siècle, et si le conflit n'est pas une guerre entre tribus descendants des anciens Syriaques et celles issues des anciens envahisseurs arabes. Les Syriens doivent le savoir beaucoup mieux que nous. Je l'écris parce que lorsque des constructions impériales disparaissent, on voit souvent d'anciens conflits inter-communautaires qu'on croyait éteints ressusciter soudainement.

En ce qui concerne Erdogan, c'est plus compliqué. Il m'a semblé qu'il tentait d'enrôler, au début du conflit, sous sa propre bannière les opposants parqués en Turquie. Il a cherché à conditionner l'armement des rebelles réfugiés chez lui à leur subordination, mais ces derniers ont, naturellement me semble-t-il, repoussé l'offre de protectorat turc ou néo-ottoman d'Erdogan (les massacres des Jeunes Turcs ont bel et bien enterré le sultanat multinational...), qui les a alors laissés désarmés.

Erdogan est acoquiné aux Frères musulmans et, par eux, à Al-Qaeda, ce qui en fait un ennemi objectif du reste du monde.


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 Sujet du message: Re: Etat islamique et conflit en Syrie
MessagePosté: Mer 7 Oct 2015 20:59 
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Un grand merci Géopolis pour vos commentaires. Et oui vous n'avez pas que la Turquie, vous avez aussi les autres états rivérains d'oµ on peut avoir l'approvisionnement...et oui les affinités des clans sont peut-être plus importantes que le reste...
De plus que je lis concernant le cas, de plus ça me semble que je suis ignorant des vraies situations.
Et ça devient aussi difficile par la propagande des deux cotés où on ne peut guerre distinguer ce qui est vrai et ce qui est distribué pour convaincre le public du droit d'agir de l'un ou l'autre coté...
Je me souviens dans le temps de l'invasion d'Iraq pour les "weapons of mass destruction" la mort de Dr Kelly (j'étais alors sur le forum d'histoire du BBC, maintenant fermé et j'ai suivi l'affaire de près) et le conflit des services de renseignement qui n'avaient pas détecté des "weapons of mass destruction" chez Saddam Housein et la version de Tony Blair, conflit entre le gouvernement et la BBC...
http://www.theguardian.com/politics/201 ... 0-years-on

Mais ici c'est hors de sujet...en tous cas Géopolis je vous remercie pour avoir éclairci un peu l'énigme (pour moi) géopolitique syrienne.

Cordialement, Paul.


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 Sujet du message: Re: Etat islamique et conflit en Syrie
MessagePosté: Jeu 8 Oct 2015 15:35 
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Geopolis a écrit:
Les talibans agissent de même en Afghanistan. La clé des tribus est leurs patriarches, qui peuvent concurrencer les djihadistes en négociant des compromis pour éviter la guerre. Les djihadistes les assassinent pour désorganiser les tribus et en récolter les survivants mécontents. Sans base tribale, les sunnites n'ont aucune raison de se ranger comme des soldats loyaux derrière leurs suzerainetés patriarcales. Je pense que cette anarchie sociale et politique accélère la décomposition du sunnisme, qui devrait finir par avoir le choix entre le nihilisme djihadiste sunnite et l'individualisme libéral, à la fin de quoi le libéralisme finira par effacer un totalitarisme sunnite auto-destructeur.


Je suis assez d'accord avec vous. Je remarquerai deux choses:
-Le projet sunnite des djihadistes combatants en Syrie (Daesh, mais aussi Nosrat, Front Islamique) est un projet "moderne", international soit frères musulmans soit salafiste. Il est indifférent aux réalités locales, aux traditions, il n'est pas contre-révolutionnaire, il est d'essence révolutionnaire, il s'agit d'un projet de société totalitaire (je ne suis pas sûr que le mot nihilisme soit vraiment approprié).
-Que représentent aujourd'hui les tribus en Syrie? Je ne suis pas sûr qu'il s'agisse d'un acteur si central, on parle de 15% de la population qui dépend encore du lien tribal, vous avez peut-être d'autres chiffres mais l'urbanisation des Bédouins a diminué notablement l'importance des liens tribaux. Hafez a cependant freiné le mouvement anti-tribus qui avait été un des fer de lance des gouvernements nationalistes depuis 1950, les sheikhs sont devenus les clients de l'Etat et un moyen de contrebalancer l'influence des Frères et de contrer les Kurdes. Mais je ne suis pas convaincu qu'en Syrie l'influence tribale soit encore si vive, de toute manière les tribus sont très divisées et même en leur sein sur la position à adopter.

Geopolis a écrit:
Les zones tenues par les rebelles sont obstinément celles majoritairement peuplées par des Syriens arabes sunnites.


A vrai dire les Sunnites restent majoritairement dans des zones toujours tenues par l'armée, Lattaquié par exemple a vu sa population doubler depuis le début de la guerre, essentiellement des Sunnites.

Geopolis a écrit:
Ce n'est pas tant qu'ils défendent des territoires où la démographie les avantage, tout comme elle avantage les non sunnites et les Kurdes chez eux, mais ils revendiquent également un pouvoir politique, avec tous les privilèges socio-économiques attenants, et un honneur de communautés bafouées depuis plusieurs générations, dominées par des communautés minoritaires et, qui plus est, à domicile... La Syrie arabe sunnite est comme la "colonie" des Syriens non sunnites. C'est une guerre d'indépendance territoriale, politique et sociale, doublée chez certains rebelles syriens d'une guerre de conquête des territoires et tribus kurdes et non sunnites. Ce sont presque les non sunnites qui se retrouvent en lutte pour leur indépendance, sans parler évidemment des Kurdes syriens qui luttent pour leur indépendance contre les Arabes syriens, sunnites ou non, ainsi que contre les Turcs voisins.


Les Sunnites ont bien sûr des droits politiques en Syrie, le processus qui a amené les Alaouites au pouvoir est simple: cette minorité plutôt pauvre s'est élevé par le mérite dans une armée désertée par la bourgeoisie sunnite, la famille d'Hafez n'avait pas l'argent pour offrir à un fils intelligent l'université, il est entré dans l'armée de l'Air qui lui a payé ses études. Ils ont commencé à devenir nombreux parmi les officiers et l'un d'entre eux a pris le pouvoir: Hafez. Ce dernier est un officier ambitieux et aussi Alaouite, il s'appuie sur des Alaouites mais Tlass son principal compagnon d'arme est un sunnite. Quand Hafez se débarrasse de Salah Jedid, proche de l'URSS, il met de côté des Alaouites comme Makhus...
Le pouvoir syrien n'est donc pas si simple qu'une clique alaouite au service de Moscou. Nous avons aujourd'hui des groupes maximalistes sunnites (qui ne représente pas l’entièreté des membres de cette confession, sans doute même loin de la majorité) qui s’oppose à un gouvernement qui représente des minorités, mais aussi la majorité sunnite ou sinon, il lui aurait été impossible de se maintenir dans ces villes très largement sunnites que sont Alep ou Damas. Les Sunnites n'ont jamais vu leur pouvoir socio-économique fondamentalement remit en cause par le pouvoir syrien "alaouite", l'épouse d'Assad est un bon exemple des liens créés avec la bourgeoisie sunnite.

Geopolis a écrit:
Comme je l'ai écrit dans mon précédent message, le régime syrien est extrémiste ; politiquement extrémiste, sur le modèle soviétique qui l'a inspiré, pas religieusement extrémiste.


Les mots doivent tout de même garder un sens. Vous parlez d'inspiration soviétique, elle me parait assez maigre, un parti communiste toléré à côté du Baath. C'est un régime autoritaire comme il y en a eu tant dans le tiers-monde, sponsorisés par l'ouest ou par l'est, un régime plutôt nationaliste. Je ne vois vraiment pas en quoi il est politiquement extrêmiste, le régime soviétique était extrêmiste avec un projet de société pré-défini. En Syrie, si on a appliqué une planification inspirée du socialisme, si il y a dans le chef du Baath, une volonté de progressisme "révolutionnaire", ce n'est pas non plus la table rase. Hafez et son fils sont plus des opportunistes que des extrémistes. Hafez comme Saddam ont commencé leurs carrières respectives en se débarrassant d'alliés sincères de Moscou.

Geopolis a écrit:
Qui plus est, l'Occident a contribué à l'armement des rebelles. Cela dit, armer une rébellion ennemie contre un régime ennemi au point de permettre un équilibre pour que les belligérants s'entre-massacrent efficacement et longtemps peut arranger l'Occident. Je doute que les gouvernements occidentaux aient poussé jusque-là leur intelligence cynique et leur perspicacité machiavélique.


Je prendrais trois images vues dans des reportages ces derniers temps:
-Le premier est un micro-trottoir déjà ancien d'une journaliste de la BBC à Damas (2012?), elle interviewait des jeunes en train de manger dans la rue, des étudiants et leur demandait pourquoi ils soutenaient Bachar. Regards un peu surpris, la réponse fuse, vous pensez que nous pourrions faire cela si les rebelles gagnaient (nous étions en plein ramadan)?
-Ensuite cette interview récente d'un réfugié syrien quelque part dans les Balkans, sa mise un peu "hipster" et son smartphone dernier cri ont attiré l'attention du reporter. Qui est-il, simplement un jeune Syrien de la classe moyenne supérieure qui veut terminer ses études en Europe avec des amis, impossible d'avoir un visa pour l'UE, alors il a payé pour entrer illégalement...
-Images d'un marché de Lattaquié filmées par une chaine anglaise: moins de femmes voilées que sur le marché de la gare du Midi un dimanche matin à Bruxelles.
En Syrie je ne suis pas sûr qu'actuellement on défende les gens qui ont envie de vivre comme nous.

Geopolis a écrit:
Erdogan est acoquiné aux Frères musulmans et, par eux, à Al-Qaeda, ce qui en fait un ennemi objectif du reste du monde.


Et la Qatar et l'Arabie Saoudite? Acoquinés à qui? Les Frères sont grosso-modo devenu une organisation qatarie, Al-Qaeda ce n'est pas la même chose mais c'est dans le golfe que l'organisation trouve de quoi se financer. J'entendais Jack Lang parler de l'influence de la France sur l'Arabie Saoudite au travers des programmes culturels, de jeunes artistes retournaient chez eux et n'étaient bien sûr plus les mêmes, pourtant la Syrie sous influence "soviétique" est plus proche de nous culturellement que ces pays du Golfe avec lesquels nous avons les meilleures relations depuis des décennies. Des pays comme la Turquie, grisés de leur puissance d'être nos alliés, grisés en fait par ce sentiment d'impunité que nous leur procurons, entretiennent le chaos chez leurs voisins et nous crache littéralement à la figure (Erdogan a eu 1 heure et quart de retard au repas préparé en sa faveur par le roi des Belges à Laeken, du jamais-vu...).
Nous avons créé des Etats gâtés, sociopathes et j'ai bien peur que ce qui continuera à en sortir s'éloignera de plus en plus de votre idée du "libéralisme".


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 Sujet du message: Re: Etat islamique et conflit en Syrie
MessagePosté: Jeu 8 Oct 2015 21:20 
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carlo68 a écrit:
-Le projet sunnite des djihadistes combatants en Syrie (Daesh, mais aussi Nosrat, Front Islamique) est un projet "moderne", international soit frères musulmans soit salafiste. Il est indifférent aux réalités locales, aux traditions, il n'est pas contre-révolutionnaire, il est d'essence révolutionnaire, il s'agit d'un projet de société totalitaire (je ne suis pas sûr que le mot nihilisme soit vraiment approprié).

Leur internationalisme est moderne, leurs combattants dépassent les clivages généalogiques archaïques. Par contre, leurs chefs ne seraient pas exempts de préjugés ethniques dans leurs rivalités internes, ayant tendance à favoriser leurs clans et compatriotes par rapport à ceux qui leur sont étrangers.
carlo68 a écrit:
Mais je ne suis pas convaincu qu'en Syrie l'influence tribale soit encore si vive, de toute manière les tribus sont très divisées et même en leur sein sur la position à adopter.

Ça ne se révèle que lorsque les conflits partisans se recoupent avec les solidarités tribales, comme en Irak, en Syrie, au Liban et au Yémen, voire ethniques, comme en Libye.
carlo68 a écrit:
A vrai dire les Sunnites restent majoritairement dans des zones toujours tenues par l'armée, Lattaquié par exemple a vu sa population doubler depuis le début de la guerre, essentiellement des Sunnites.

Ce serait difficile à expliquer par des médias occidentaux qui se contentent d'asséner qu' "Assad tue son peuple".
carlo68 a écrit:
Le pouvoir syrien n'est donc pas si simple qu'une clique alaouite au service de Moscou.

Je dirais : une clique de Syriens opportunistes resserrés autour de familles alaouites au pouvoir se servant de Moscou. ;)
carlo68 a écrit:
Les mots doivent tout de même garder un sens. Vous parlez d'inspiration soviétique, elle me parait assez maigre, un parti communiste toléré à côté du Baath.

J'entends que le régime fut formé par Moscou dans ses doctrines militaires et répressives, comme en Irak et en Algérie.
carlo68 a écrit:
Je ne vois vraiment pas en quoi il est politiquement extrêmiste, le régime soviétique était extrêmiste avec un projet de société pré-défini.

J'entends par extrémisme l'usage de la brutalité pour imposer une doctrine politique, y compris religieuse.
carlo68 a écrit:
Hafez et son fils sont plus des opportunistes que des extrémistes. Hafez comme Saddam ont commencé leurs carrières respectives en se débarrassant d'alliés sincères de Moscou.

D'accord avec vous : comme à Moscou, les idéologies affichées sont d'abord des tartufferies destinées à maintenir des coteries au pouvoir. Ça n'a pas empêché quelques progrès socio-politiques, d'ailleurs, sinon ça n'aurait pas fonctionné aussi longtemps.
carlo68 a écrit:
En Syrie je ne suis pas sûr qu'actuellement on défende les gens qui ont envie de vivre comme nous.

[...] la Syrie sous influence "soviétique" est plus proche de nous culturellement que ces pays du Golfe avec lesquels nous avons les meilleures relations depuis des décennies. Des pays comme la Turquie, grisés de leur puissance d'être nos alliés, grisés en fait par ce sentiment d'impunité que nous leur procurons, entretiennent le chaos chez leurs voisins et nous crache littéralement à la figure [...]
Nous avons créé des Etats gâtés, sociopathes et j'ai bien peur que ce qui continuera à en sortir s'éloignera de plus en plus de votre idée du "libéralisme".

Je partage votre avis, mon pragmatisme préfère un Assad qui protège avant tout sa famille puis ses soutiens syriens que l'ensemble de ses adversaires, Occidentaux compris. Nos alliés objectifs en Orient sont tous ceux qui s'opposent à l'intégrisme sunnite, étatique, partisan ou clérical. Je suis au pire pour une neutralité occidentale, au mieux pour un soutien logistique, voire militaire, au régime syrien, même en tenant compte des hostilités passées de la Syrie au Liban.

Je pense que plus vite les Arabes sunnites accepteront d'abandonner leur souveraineté et leurs appétits sur les territoires d'Orient qui ne sont plus sunnites ni arabes, mieux le monde et l'Orient s'en porteront, les Arabes sunnites les premiers, d'ailleurs.

Les Arabes sunnites et assimilés se rendent compte qu'ils ont leurs propres colonisés : Zanzibar, les esclaves mauritaniens, les noirs soudanais, les Sahraouis, les Kurdes, les Arabes chiites... Toutes ces populations se soulèvent chez elles et contestent leur suzeraineté. Ils devront digérer toutes ces indépendances, de gré ou de force. Et de lourds conflits civils s'amorcent pour des émancipations domestiques : laïcs, femmes, indifférents au clergé musulman et aux patriarcats bédouins.

À mes yeux, ce sont là les véritables révolutions qui bousculent le monde arabe, et je qualifierais de contre-révolutionnaires les djihadistes en ce qu'ils s'y opposent.


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 Sujet du message: Re: Etat islamique et conflit en Syrie
MessagePosté: Ven 9 Oct 2015 11:29 
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