Narduccio a écrit:
Les Kurdes existent ... donc le Kurdistan pourrait exister.
Loin de moi l'idée de dénier aux Kurdes un éventuel État, j'étais bien sûr dans la perspective d'un dirigeant américain amené à choisir entre des indépendantistes d'obédience vaguement marxiste proche d'un groupe désigné terroriste par sa propre administration et un allié de longue date relais essentiel de sa politique au M-O.
Narduccio a écrit:
Des raisons de géopolitique ont fait qu'à une certaine époques les décideurs (ceux qui avaient les moyens de peser sur les choix stratégiques du moment) n'ont pas voulu que ce pays naisse. Aurait-il vécu, qu'elle place aurait-il pris dans la région... Nous ne le saurons jamais. Les divers pays de la région, tout en réprimant leurs populations kurdes, ont favorisé l'émergence de mouvements nationalistes kurdes chez leurs voisins à certaines époques.
Oui, il suffit de suivre les soutiens de la famille Barzani, de Staline à Netanyaou, pour comprendre la difficulté à sortir des rapports de force mis en place à la chute de l'empire ottoman.
Narduccio a écrit:
En fait, la plupart des pays, tout en prônant un "nationalisme arabe", ont tout fait pour recourir aux anciennes méthodes des colonisateurs qu'ils fussent les ottomans ou les occidentaux : diviser pour régner et donner du pouvoir aux minorités pour surveiller l'essentiel des populations.
Je ne comprends pas très bien l'idée du diviser pour régner, d'abord parce que le point de vue du colonisateur extérieur est différent de celui du gouvernement devenu indépendant et devant gérer sa population de manière à ne pas apparaître comme un sur-pouvoir. En Égypte, longtemps pays-phare du nationalisme arabe, je ne vois pas trop quelle minorité aurait été privilégié, les Coptes ont gardé un statut plutôt mineur. En Irak et en Syrie, on a des situations différentes je vous l'accorde mais qui me paraissent le fruit de rapports autrement complexes que la décision de "diviser pour régner". En Syrie, les Sunnites n'ont pas été exclus du pouvoir et ont toujours gardé la haute main sur l'économie, traversé de coups d’État le pays a connu pas mal de dirigeants avant le père Assad, tous sunnites, certains d'origine kurde. J'ai du mal à voir un schéma typique, une méthode, mais plutôt une question d'opportunités derrière le fait que Assad et Hussein appartenaient à des minorités religieuses (encore qu'en Irak, les Sunnites sont à peine minoritaires et, comme en Syrie, sont surreprésentés dans les classes supérieures de la société).
Narduccio a écrit:
Bref, personne n'a cherché à intégrer les différentes composantes de ces pays hétéroclites comme cela fut le cas en France, en Angleterre ou en Allemagne ...
Vous êtes un peu dur, pour prendre l'exemple de la Turquie, elle a largement effacé sa diversité religieuse, les descendants de Chrétiens ignorent même souvent qu'ils le sont, il y a peu de populations aussi mélangées que celles de la Turquie et pourtant ils sont pour la plupart persuadés d'être Turcs! La question kurde se pose avec acuité j'en conviens, mais même dans cette population la turquisation est importante. La guerre en Syrie me semble avoir démontré l'existence d'une identité syrienne, la passivité de la majorité des Sunnites face aux appels au soulèvement en 2012 me semble indiquer qu'au-delà de la méfiance face au caractère islamiste d'une partie de plus en plus importante des révolutionnaires, il y a aussi l'adhésion à l'idée d'une révolution dirigée depuis l'extérieur, d'un projet non-syrien. Cette idée, très tôt mise en avant par le gouvernement a, de toute évidence, connu une certaine popularité dans l'opinion et pas seulement parmi les minorités et témoigne, à mon avis, d'un sentiment d'identité syrien qui a été trop minoré dans notre compréhension des événements et qui explique en partie le décalage permanent entre l'analyse "occidentale" de la situation et la réalité du terrain.