Au sujet de la preuve de la fraude, n'oublions pas que le Conseil des gardiens de la révolution a constaté qu'il y avait eu un taux de participation supérieur à 100% dans 50 bureaux de vote (les plaintes de l'opposition concernaient en tout 174 bureaux de vote), tout en estimant que le résultat n'en avait pas été faussé. Un esprit clair tire rapidement les bonnes conclusions sans avoir besoin d'un rapport détaillant les fraudes de l'épaisseur d'un annuaire téléphonique
Les fractures se sont multipliées au sein des institutions de la République islamique et du clergé, elles sont devenues très visibles. Ce constat est sans doute plus important que la question de la preuve de la fraude électorale. La controverse au sujet de la fraude a suffit à discréditer dans un certaine mesure les institutions actuelles. Désormais affaibli, le régime est en proie aux secousses provoquées par des affrontements internes (aux institutions politiques et religieuses). La réforme risque de venir plus sûrement du régime lui même que d'une contestation populaire. Réforme vers une république islamique plus démocratique ou réforme dans le sens du millénarisme de Ahmadinejad.
Il y a l'exemple de Montazeri posté par Narduccio qui est intéressant. D'autres exemples, nombreux, datent du mois de juin.
Certains officiers des bassiji et des pasdaran avaient refusé de participer aux opérations de répression. De l'autre côté, certains clercs du camp Ahmadinejad se sont déchainés. Par exemple, l'ayatollah Mesbah Yazdi a produit fin juin une fatwa autorisant la mise à mort des candidats réformateurs (toutefois son rang dans le clergé chiite l'empêche d'être une source de jurisprudence sans l'accord d'un grand ayatollah).
Les frontières de chaque camp sont floues pour le moment. Finalement, on trouve des partisans de chacune des causes dans toutes les institutions (bien que certaines sont plus franchement contestataires telle l'Assemblée des experts présidée par Rafsanjani). Rafsanjani avait fait mine de menacer Khamenei de destitution en brandissant l'arme du 111e principe de la Constitution. Sa fille avait d'ailleurs été arrêtée par la police et retenue prisonnière pendant la plus grande partie des troubles. Le Président du Majlis d'Iran, Larijani, avait lui aussi déploré que le sommet de l'Etat en faisait trop en faveur du camp du Président sortant. Il semble d'ailleurs qu'il avait menacé de demander des comptes pour les victimes de la répression au cours des premiers jours du mouvement.
A part cela, une chose pourrait entretenir la contestation parmi le public. Il s'agit des cérémonies de deuil à la mémoire des martyrs (chahid) morts au cours de manifestations. Il y a des commémorations tous les 3, 7 et 40 jours. Cet engrenage avait d'ailleurs entretenu la flamme de la contestation lors de la Révolution islamique. La grève générale du bâzâr de Téhéran du mois de juin a cependant été un échec, ce qui laisse encore une fois penser que pour l'instant le danger de réforme qui pèse sur Khamenei est tapi dans l'ombre du pouvoir.