Citation:
« La Turquie a perdu », analyse un diplomate de l’OTAN : « Erdogan a dû accepter Rasmussen en échange de colifichets. Surtout, il a montré son vrai visage : Rasmussen n’avait ni le pouvoir légal d’empêcher la parution des caricatures, ni d’interdire la télévision kurde. Cela va refroidir l’ardeur des défenseurs de l’adhésion de ce pays à l’Union ». À l’Élysée, on ne cachait pas sa joie face à une telle erreur de manœuvre.
Oui, en effet, et Erdogan, coutumier des négociations style chantage et passage en force, a atteint les limites de sa propre stratégie.
Cette histoire amène aussi à se poser la question de fond: qu'est-ce que "l'islamisme modéré"?
Lisant la presse américaine, on a l'impression qu'Obama, outre l'importance géostratégique de la Turquie par rapport aux opérations militaires en Irak et Afghanista, cherche un nouvel allié musulman modéré, aux fins de triangulation (se rapprocher des musulmans modérés afin d'isoler les extrémistes). L'Arabie séoudite ne remplit pas tout à fait ces conditions--sous une amitié de surface, elle est perçue aux US comme soutenant en secret des fractions islamistes extrémistes.
La Turquie est vue par certains démocrates comme un pays laic, politiquement stable, démocratique et respectant les droits de l'homme, religieusement modéré et ayant de bonnes relations avec Israel, qui pourrait être le champion idéal des US dans le monde islamique.
Pour attirer dans son camp cet allié précieux qui lui ouvrirait la clé du monde musulman, BO semble prêt à lui livrer l'UE en pature. Après tout, les Européens sont pays conquis: de vieux alliés sûrs qui sont depuis longtemps dans le camp occidental et ne risquent pas d'en changer. La Turquie, elle, n'en fait pas encore totalement partie et reste à conquérir...
Lisant certains articles de journalistes US, on a même l'impression que l'administration Obama pourrait compter sur ce pays doté d'une armée considérable pour une aide militaire directe et importante sur ses présents terrains d'opération au MO, en particulier en Afghanistan.
Je pense personnellement qu'Obama nage en pleine illusion sur la Turquie, mais après tout, c'est sur de telles illusions qu'a généralement opéré la politique étrangère US par le passé...