Tonr a écrit:
Tout d'abord, dans un monde globalisé, les problèmes graves qui se posent à nous et dont on doit s'occuper en priorité ne se limitent pas au territoire national, ni même à l'UE. C'est une approche francocentriste périmée et complètement inadaptée au XXIe siècle que de poser que les problèmes géographiquement proches sont nécessairement les plus importants.
Pourtant, et d'évidence, ne vous semble-t-il pas plus important et prioritaire pour le gouvernement français de (tenter de) pacifier avant toute chose nos "banlieues sensibles" que les faubourgs de Kaboul ? Gouverner c'est aussi hiérarchiser.
Tonr a écrit:
Ensuite, poser que "des moyenageux désargentés" ne sont pas à craindre pour les occidentaux, c'est un autre raisonnement simpliste: les talibans ne sont pas si désargentés que ça d'une part, l'argent rapporté par le pavot est loin d'être négligeable, et de plus le financement du terrorisme est internationalisé, même en Afghanistanl;
Je ne vous le fais pas dire. Seulement a-t-on seulement cherché à tarir efficacement, dans l'intervalle des attentats du 11/9 (et en réalité même bien avant), les sources de financement du terrorisme sans lesquels ce dernier serait en tout état de cause bien moribond ? Relisons ce qu'en disait déjà Alain Chouet (ancien chef du service "renseignement de sécurité" de la DGSE): "Non seulement - je vous renvoie ici à différents rapports du Trésor américain -
rien de sérieux n’a été entrepris pour tenter d’enrayer le substrat financier et encore moins le substrat idéologique de la violence jihadiste, mais en désignant Al-Qaïda comme l’ennemi permanent contre lequel il faut mener une croisade par des voies militaires et sécuritaires totalement inadaptées à sa forme réelle, l’on a pris une mitrailleuse pour tuer un moustique."
Tonr a écrit:
ensuite , il est historiquement absurde de penser que des peuples moyenâgeux ne peuvent pas être dangereux de ce fait même. De tels peuples ont constamment mis en échec des armées modernes; c'est ce qui s'est passé au Vietnam, en Afghanistan avec les Soviétiques; c'est ce qui est en train de s'y passer de nouveau.
Là encore, personne n'affirme que ces peuples ne peuvent se révéler de redoutables combattants sur
leurs territoires et sphères d'influence, et pour cause. Mais c'est ainsi faire la démonstration par l'absurde de l'inanité du concept de guerre prolongé, c'est à dire clairement d'occupation (sous prétexte de pacification), depuis justement les précédentes guerres du Vietnam et d'Afghanistan qui manifestement n'ont pas su servir d'exemple à nos grands stratèges !
Non, ce que je conteste évidemment est la grille de lecture dominante qui tend à vouloir démontrer, de plus en plus difficilement il est vrai, que les gardiens de chèvres pachtounes représentent une menace grave, avérée et imminente au sein de
nos territoires occidentaux. Alors que, rappelons-le, les individus liés aux actions terroristes islamistes en Europe sont bien souvent le fait d'autochtones naturalisés de naissance. Ce qui vient ruiner la démonstration selon laquelle, justement aussi du fait de la mondialisation et je vous rejoins, la menace soit à considérer principalement comme extérieure. Ce qui est une tarte à la crème. Alors après, effectivement, que pose le problème que ces mêmes individus cherchent à s'aguerrir à l'extérieur du territoire national au vue de commettre à leur retour des actes terroristes est à prendre en considération. Mais là est essentiellement du ressort de la POLICE judiciaire et de l'anti-terrorisme, non des régiments d'infanterie de l'armée ! Cela rejoins aussi d'autres considérations, touchées du doigt ci et là sur ce forum, et qui consiste à s'interroger sur la pertinence de continuer d'admettre en notre sein des individus qui visiblement conchient bientôt nos valeurs, nos principes, et nos us et coutumes ? Mais là est un autre débat au contenu fort polémique, n'est-il pas.
Tonr a écrit:
Vous persistez à ne pas comprendre que le Pakistan, puissance nucléaire, est un château de cartes, miné de l'intérieur par les talibans pakistanais qui ont noyauté des portions entières de l'Etat et de la société. Et que la frontière séparant ce pays de l'Afghanistan n'est qu'une fiction, puisque le même peuple pachtoune vit des deux côtés.
Je persiste à comprendre que le gouvernement américain à jouer en son temps les djihadistes fondamentalistes contre son grand ennemi soviétique, et qu'il aurait mieux valu, compte tenu des potentialités qu'elles recouvraient, s'abstenir à l'époque d'un tel soutient et calcul. Mais les américains ont de tout temps échoué à comprendre la psychologie des foules arabo-musulmane et la religiosité dans laquelle elles s'inscrivent, comme le confirme l'aventure en Iraq où les malheureux incultes pensaient naïvement être accueillis en libérateurs. Ils ont depuis été cruellement démenti à leur fort préjudice (puisque, selon vous, ils n'auraient même pas profité de la manne pétrolière. Quand bien même nous aurions des informations discordantes sur ce point). Je persiste à comprendre par conséquent que Ben Laden et ses semblables furent des marionnettes à la solde de la CIA, cela avant qu'ils ne se décident évidemment à s'émanciper et mordre la main de leur maître. Nous sommes bien entendu ici au coeur des imbroglios résultants des retournements d'alliances des uns et des autres et des aléas de l'Histoire en perpétuelle fluctuation, et qui est certes une approche sensée et raisonnable des événements historiques et du jeu normal des rapports de force.
Ce qui n'est pas contradictoire tout de même avec l'idée que les français, et plus largement les européens, doivent maintenant se poser la question de l'intérêt
réel qu'ils ont à suivre leur allié américain dans cette région du monde (allié qui se détourne de plus de ses supplétifs, mit en évidence par la présidence Obama), au-delà justement de démontrer leur suivisme et leur servilité à leur égard. Et donc, sous prétexte de lutte anti-terroriste ? Mais c'est une grossière fumisterie qu'il convient de démystifier, puisqu'il est prouvé à présent que le terreau de l'islamisme radical à visé terroriste est situé en Arabie saoudite essentiellement, c'est à dire celle-la même qui bénéficie de la plus totale protection politique et militaire de l’hyper-puissance américaine. Et pas contre n'importe quoi: en échange du monopole sur l’exploitation des hydrocarbures. Nous sommes face à ce qu'il convient de nommer un double discours politico-médiatique. Et je ne crois pas que la France en particulier ait vocation à se faire instrumentaliser par qui que se soit, fusse-t-il son allié historique.
Tonr a écrit:
Si les talibans pachtounes afghans réussissent de nouveau à créer un Etat islamique en Afghanistan, l'instauration d'un Etat islamique au Pakistan est quasi-certaine. Si l'idée que des talibans possédent l'arme nucléaire ne vous parait pas préoccupante, tant mieux pour vous. Il est heureux pour l'avenir de la planète que les dirigeants occidentaux ne pensent différemment.
Je recherche activement la source, mais je crois savoir que J.P. Chévènement avait rappelé lors de la remise de son rapport au Sénat sur la prolifération nucléaire que les américains avaient fourni au début des années 2000 des codes d'activation afin de sécuriser l'arsenal nucléaire pakistanais. Si tel est le cas, votre argument est donc caduque. De plus qui peut croire qu'en cas d'effondrement imminent du pouvoir central, militaire, les occidentaux et en premier chef les Etats-Unis n'interviendraient pas instantanément au vue d'exfiltrer les vecteurs mise en cause. Qui les en empêcherait ? Ne doutons pas d'ailleurs que tout cela soit dors et déjà planifié en haut lieu.
Tonr a écrit:
Enfin, votre compréhension des questions de politique tant nationale qu'internationale se réduit toujours, en fin finale, à une version ou à une autre de la théorie du complot. C'est le cas ici, c'est le cas dans pratiquement toutes vos analyses--et ce genre d'obsession réccurente nuit considérablement à leur crédibilité.
Si je comprends bien, dès lors que l'on cherche à mettre en évidence des doubles jeux et des stratégies indirectes entre puissances, ce qui est tout de même le propre de la géopolitique, on est systématiquement affublé de cette sentence à but disqualificatif: théorie du complot. Il n'y a rien de plus grotesque pardonnez-moi.