Le salon géopolitique de Passion-Histoire

C'était une référence humoristique à la notion que les truands sont en quelque sorte des supercapitalistes.
Car les prébendes et chasses gardées de la tribu Trabelsi dépassent de beaucoup le simple népotisme "ottoman'' pour relever purement et simplement de la mafiaisation socio-économique.
La famille Trabelsi, quelque chose comme 9 ou 10 garçons, et une seule fille, l'épouse de Ben Ali, étaient initialement une tribu de petits voyous de la banlieue de Tunis, vivant de petits trafics et de petits délits, qui ont pu accéder aux très grosses affaires suite à la liaison providentielle de leur soeur, coiffeuse, avec Ben Ali.
Le chef du clan était connu--des documents wikileaks le rapportent entre autres--, pour se rendre à certains de ses rendez-vous d'affaires avec un pistolet , qu'il posait bien en vue sur la table pendant les négociations, afin que ses partenaires comprennent bien à qui ils avaient affaire.
Ceci est plus proche du crime organisé que du simple népotisme.

Je vois pas mal de raisons pour ne pas croire en un retour de l'Islamisme.

- La révolution n'a eu strictement aucune origine islamique.
- La laïcité est dans la culture même Tunisienne.
- Les Tunisiens sont majoritairement bien éduqués, et sont peu enclins à croire au surnaturel
- Les Tunisiens sont majoritairement jeunes. La religion étant une réaction traditionnelle, ils seront assez peu attirés.
- Ils connaissent les ravages de la religion.

Par contre pour les autres pays du Maghreb c'est souvent différent. Je pense à l'Égypte en particulier.
Il faut se dire : heureusement que c'est les Tunisiens qui ont fait cette révolution en premier, et pas les Égyptiens.

Je pense que la Tunisie remplie amplement toutes les conditions nécessaires à la naissance d'une vraie démocratie à l'occidentale. Les actions de ces derniers jours, confirment ce fait, même si certains Tunisiens sont sceptiques.

Si cette révolution se termine bien, la Tunisie fera un décollage économique sans précédent. Le développement de ce pays a été freiné pendant des années par la corruption. Celle-ci écartée, avec le niveau d'éducation de ce pays, je suis à peu près certain que ce pays va nous surprendre.

Je ne suis pas d'accord : l'islamisme est précisément un mouvement moderne, qui attire les jeunes et a peu de chose à voir avec les traditions, ou le surnaturel - rappelons-le : l'islam est avant tout du législatif. Mais c'est vrai qu'il semble ne pas faire souche en Tunisie, même si de plus en plus de filles portent le voile.

De plus, un bon point contre l'islamisme est que Ben Ali est réfugié en Arabie Saoudite. Il sera difficile de convaincre la population de copier les usages du pays qui tient leur dictateur en réserve.

Attention là aussi : l'article premier de la constitution tunisienne proclame toujours : La Tunisie est un Etat libre, indépendant et souverain ; sa religion est l'Islam, sa langue l'arabe et son régime la république.Mais c'est vrai que la Tunisie n'a jamais eu de velléités pour considérer le coran et les hadiths comme une source de loi (comme l'Égypte dans les années 70 et l'Algérie dans les années 80).

La révolution a ceci de particulier qu'elle semble s'être passée comme les révolutions romantiques du XIXe siècle : ceux qui l'ont faites sont jeunes, instruits, plutôt des classes moyennes (pas des crève-la-faim). Bref, des révolutionnaires avant que les communistes ne décrètent d'autres règles. Cela semble de bon augure pour établir un régime parlementaire. De plus, la Tunisie a l'avantage d'être un petit pays, sans grande tension ethnique, et il n'y a a priori pas de vraie menace extérieure.

Donc, toutes les conditions sont réunies pour une vraie transition démocratique. Si un régime islamiste s'instaure tout de même, je pense qu'il ne faut plus rien attendre du monde arabe avant quatre ou cinq générations .

cest vrai que la tunisie a bonne reputation :
a - religiosite moderee
b - femmes liberees (enfin relativement)
c - economie developpee (enfin relativement)
d - jeunesse eduquee


bon ca doit pas empecher de regarder
a - les islamistes tapis dans lombre
b - les benalistes desireux de rester en place
c - les militaires algeriens qui doivent souhaiter lechec de la democratisation
e - l'europe qui a lair de pas trop savoir quoi faire

Un article qui dévoile le niveau 'incroyable atteint par la mise en coupe réglée de la Tunisie par le clan Trabelsi/ben Ali, qui détiendrait environ 40% de l'économie tunisienne.
Comme je le disais, ça va bien au delà du népotisme ordinaire: personne, des plus petits commerçants de bazar aux plus grosses entreprises internationales, n'échappait aux prédations des Trabelsi/ben Ali. Et certains d'entre eux n'étaient pas simplement corrompus, ils étaient carrément mafieux.

http://www.lefigaro.fr/international/20 ... -en-or.php

J'ai dîné hier soir avec un industriel français qui emploie 200 personnes en France et ... 4000 en Tunisie !!!

Son diagnostic est nuancé. La révolution s'est faite dans le calme car chacun avait compris que le système Ben Ali était allé trop loin. Les problèmes commencent aujourd'hui. Par exemple on voit des syndicats apparaître dans les usines et la productivité déjà faible s'effondrer (baisse de 75% environ de la production). On peut craindre une flambée des salaires surtout si un gouvernement démagogique appuie les syndicats. Dans ce cas, ce sera la fin de l'industrie textile tunisienne déjà menacée par la concurrence asiatique.

J'en tire une conclusion toute personnelle : non seulement les investisseurs qui délocalisent détruisent l'emploi en France - mais en plus ils ne se limitent pas à tirer parti de bas salaires, ils profitent aussi de l'absence de droits des salriés qui résulte de la dictature.

Merci pour ces infos d' "insider", aigle.
Vu ce qui se passe en Chine et ailleurs, on peut se demander si, à ce stade de son développement pour s'exprimer en termes marxistes , le capitalisme mondialisé n'a pas plus d'affinités économiques avec les dictatures qu'avec les démocraties.
Pendant longtemps, beaucoup ont considéré que capitalisme et démocratie étaient inséparables. cette ère est révolue apparemment.

Oui et non. Ce serait un débat intéressant à mener. Je pense qu'en fait, c'est très lié au niveau technologique des entreprises. La haute technologie suppose un échange d'informations. Il faut que l'information circule. Or, les dictatures répugnent à laisser l'information circuler librement. Donc, haute technologie et dictature semblent ne pas pouvoir coexister. Tandis que dictature et bas salaires, donc travail de faible qualité semblent être fortement associés.

Bien vu et bien dit : tout cela semble assez bien correspondre aux leçons de l'expérience des trente dernières années en effet.

J'ai quelques doutes ; l'avenir nous le dira. Mais je pense que la Chine nous démontrera que démocratie et technologie ne sont pas forcément liées.