Gevaudan a écrit:
Oui mais on peut se poser la question de savoir pourquoi ces ethnies musulmanes ne se sont pas associées plus tôt avec leur cousin d'Afghansitan, notamment durant la période de dégel de 1956 à 1964 ?
D'un côté, la frontière soviétique devait être aussi poreuse que le rideau de fer en Europe, considérant les centaines de milliers de troupes et garde-frontières mobilisés sur l'ensemble des frontières du bloc soviétique.
De l'autre côté, l'URSS intervenait diplomatiquement et politiquement en Afghanistan pour socialiser le pays (depuis les années 1930 et jusqu'à son retrait militaire en 1989).
A l'époques, les ethnies ne valaient pas tellement plus que les religions, c'est-à-dire qu'elles ne comptaient pour presque rien devant l'engagement dans les grands blocs géopolitiques du moment : pro-occidental, pro-soviétique, non alignés véritables. Être Tadjik ou Ouzbek, c'était un vieux souvenir d'avant 1917. Être musulman, c'était un exotisme.
Alain Peyrefitte illustre très bien cet état d'esprit au sujet d'une phrase de De Gaulle, qui passait alors pour un politologue archaïque et conservateur :
Citation:
GdG. — Les seules réalités internationales, ce sont les nations. La Russie boira le communisme comme le buvard boit l’encre. »
J’ai rapporté cette phrase à notre meilleur « kremlinologue », mon aîné du Quai d’Orsay. Il s’est esclaffé en se tapant sur les cuisses : « Mais il n’a rien compris ! Le Russe, ça n’existe plus, la Russie a disparu. Il n’y a plus que l’Union soviétique. Il n’y a plus que l’homo sovieticus. Pendant trois générations, on a fait du lavage de cerveau, et le fond de la culture russe a disparu; il n’en reste plus rien. Tous sont devenus des robots soviétisés. »
Tout le monde pensait comme le kremlinologue. Le monde, jusqu'aux universités occidentales, était interprété par des élites intellectuelles presque toutes acquises à une grille de lecture marxiste de l'Histoire. La religion et les ethnies n'y représentaient plus
RIEN, sinon des conservatismes primitifs et ultra-réactionnaires perdurant dans l'aire pro-occidentale et le Tiers-Monde.
Ce n'est qu'après 1991 qu'on s'est mis à réaliser (et encore, pas pour tous les intellectuels, surtout français) que tous ces folklores perduraient à l'échelle de la planète et pas seulement sous l'oeil des ethnologues en Amazonie ou dans le Kalahari.
On peut même penser après coup qu'ils s'étaient parfois drapés du marxisme pour perdurer et dominer durant la guerre froide(indépendantismes, hypocrisies crypto-nationalistes et conservatrices...).
Pour revenir à votre question, l'ensemble des Soviétiques qui avaient survécu aux gigantesques épurations "révolutionnaires" avaient enterré tous leurs folklores au fond de leurs mémoires, solidarités ethniques et religieuses comprises. Chaque Soviétique avait un intérêt
VITAL à penser, parler et vivre comme le décrivait le kremlinologue mentionné par Peyrefitte.