Retour sur la principale tare de la Russie, le déraillement et la myopie nationalistes :
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Une dérive dont se soucie peu le Kremlin, davantage occupé à muscler un puissant réseau : les brigades de jeunes. Sa plus belle création ? Les Nachi (« les Nôtres »), fondés en 2005, au lendemain des révolutions géorgienne et ukrainienne et destinés à contrer toute manifestation pro-occidentale. Blouson et tee-shirt rouges de rigueur, « commissaires » attitrés, camps d’été, chants patriotiques… tout fleure bon les temps soviétiques. Et les « blousons rouges » s’activent. Leur nouvelle cible ? Les tout jeunes, âgés de 8 à 15 ans et baptisés Michki (« les Oursons »). « On les recrute dans les écoles ou sur les aires de jeu des immeubles, raconte leur responsable, Ioulia Zinova. Une pratique dénoncée par les familles. « Ma sœur de 14 ans, à laquelle on avait promis une visite de Moscou, s’est retrouvée dans un rassemblement pro-Poutine sur la place Rouge, sans rien comprendre », se désole l’étudiant Igor.
Dans sa croisade patriotique, le pouvoir bénéficie aussi d’un renfort appréciable : l’Église orthodoxe. […] Retransmission télévisée des messes adoubant le successeur Dmitri Medvedev, eau bénite répandue sur le nouveau missile sol-air S400, excommunication des prêtres soutenant Mikhaïl Khodorkovski, l’oligarque emprisonné devenu l’ennemi du régime… […] Quant à la guerre éclair contre les frères orthodoxes géorgiens, elle ne suscite aucun regret. […] Les troupes géorgiennes ont été entraînées par des Américains protestants et des généraux israéliens ! »
La lune de miel entre le patriarche et Poutine ? […] « Alexis II est un ancien du KGB, comme Poutine, et donc son serviteur », prétend Mikhaïl Ardov, prêtre dissident depuis 1993. En tout cas, les croyants affluent. Et composent, désormais, les deux tiers de la population, soit deux fois plus qu’à la chute de l’URSS. […]
Sauf que, dans la grande soupe idéologique du Kremlin, surgit un invité surprise : Staline. Pas franchement en phase avec le culte tsariste et la religion orthodoxe. Il n’empêche, le Petit Père des peuples jouit d’un retour en grâce. Poutine, dont le grand-père, jadis cuisinier, a mitonné les plats du sanglant dictateur, a donné son feu vert. Voilà donc Staline blanchi dans les manuels scolaires. On y évoque un « manager efficace » et « rationnel ». « Utilisez les ouvrages que l’on a rédigé pour vous ! » a lancé l’an passé Vladislav Sourkov, le numéro deux de l’administration présidentielle, devant une assemblée de professeurs d’histoire dubitative. Parmi eux, Igor Doloutski, enseignant depuis trente ans dans un lycée de la banlieue de Moscou. Son ouvrage a longtemps servi de référence avant de disparaître des cartables des écoliers au début du second mandat de Poutine. Motif : antipatriotique. Le professeur y mentionnait, il est vrai, la « grande terreur » et les « 40 millions de victimes » de l’ère stalinienne. […] « Une de mes élèves m’a révélé qu’elle estimait Staline parce qu’il avait toujours poursuivi son but, raconte-t-il. Vous voyez, j’ai perdu : le pays produit de bons patriotes. »
2008, Le Point 1888, 62-63
Assassinats racistes, embrigadement et scolarisation militaristes, propagande révisionniste, relents xénophobes (y compris antisémites), ça évoque la montée de l'extrême droite contre les démocraties libérales dans l'Europe des années 1930.
Sauf que les démocraties sont encore plus riches et plus libérales, qu'elles ont conquis l'Europe centrale et s'incrustent en Europe orientale. Mais la Russie dispose de l'arme nucléaire.
Reste que la similitude phonique entre
Nachi et nazis est glauque. "Heil Poutine" ?