pierma a écrit:
Je souscris totalement à cette opinion. A quoi sert d'avoir des militaires et des policiers dans nos rues s'ils ne sont pas formés et équipés pour intervenir ?
Pour l'instant, ils avaient une double "mission". Une première mission dissuasive, mais centrée surtout sur le "petit" terroriste d'occasion qui perd ses moyens en voyant une patrouille. La seconde est de rassurer les citoyens par leur présence. J'ai lu pas mal d'articles consacrés aux déclarations de Marc Trévidic, ancien juge de 2006 à 2015 au pôle anti-terroriste de Paris. Il a un langage de fermeté en réclamant plus de moyens. Mais, apparemment, il pense qu'il est plus facile d'agir et d'intervenir en amont. Dans cette logique, les patrouilles dans les rues ne servent pas à grand chose et elle détournent des moyens de là où ils seraient plus efficace.
Citation:
Vous aviez prédit en septembre un attentat de masse. Que faut-il faire maintenant ?
« Nous avons besoin de bras, dans le renseignement, la justice, la police, mais pas de lois supplémentaires. C’est un mal français. À chaque attentat, on fait une loi. Qui ne sert à rien. Il faut fluidifier le passage du renseignement vers le judiciaire à propos d’individus dangereux pour qu’on cherche des preuves contre eux et qu’on les arrête. Quand vous avez un tel potentiel de personnes radicalisées, il faut se mettre à niveau. »
Après chaque attentat, on découvre que les suspects étaient identifiés, voire même fichés « S » par le renseignement. Mais à quoi cela sert-il ?
« Le renseignement identifie un individu en voie de radicalisation. Mais l’enjeu est de passer au judiciaire, de réunir des preuves qui permettent de l’arrêter. C’est notre système. Alors à moins que l’on change de régime, que l’on sorte de la démocratie, il fonctionne comme cela… La fiche S, c’est une alerte. Que tout le monde soit averti quand le gars passe une frontière, revient de Turquie, de Syrie. Je le répète : si vous mettez en face le nombre de fonctionnaires de police spécialisés et le nombre de radicalisés, il y a moins d’un fonctionnaire par cible. »
Laurent Wauquiez (LR) exige la création de centre de rétention pour djihadistes présumés. Qu’en pensez-vous ?
« Ça n’a aucun sens. Et puis notre constitution ne l’autoriserait pas. Ou alors on crée des Guantanamo en France. Non, ce n’est pas la solution. »
L’enquête s’oriente vers la Belgique. Après Londres, qui a fourni des bataillons à al-Qaida, y a-t-il un problème spécifique à Bruxelles ?
« C’est la question épineuse des foyers de salafisme. Il y en a en France aussi. Dans ces quartiers, on a quelques mosquées, des salles de prière improvisées où se prêche la mauvaise parole. Selon moi, il faut taper dans le tas. Arrêter les imams aux discours de haine, infiltrer ces quartiers-là. Éviter les concentrations, faire que les populations soient plus éclatées sur le territoire. C’est toujours le problème quand on crée non pas des zones de non-droit, mais d’un autre droit, des zones de droit islamique, si vous voulez. Pour ceux qui sont sous le coup de procédures judiciaires, il faudrait leur interdire de revenir dans leur ancien quartier. »
Vous critiquez le regroupement des radicaux dans les prisons...
« Si vous faites cela, vous décidez qu’ils resteront salafistes. C’est l’inverse de la déradicalisation. Je ne sais pas à quoi on joue en France sur le sujet. »
Vous avez souffert des limites de la coopération judiciaire (attentat de la rue des Rosiers, moines de Tibhirine…). Que faut-il améliorer dans l’échange de renseignements ?
« Dans le renseignement, la cohésion s’est améliorée dans l’espace Schengen. Dans le passé, certains étaient frileux ; aujourd’hui, tout le monde a peur des djihadistes de Daech, donc les infos passent. Si on élargit à la Turquie, par exemple, la fiabilité est loin d’être absolue. Ni la stratégie, ni les intérêts en jeu… Le problème, c’est qu’il n’y a pas que l’Europe, mais cela engage tous les pays qui gravitent autour de Daech, de l’Irak, de la Syrie. »
je pense que la différence d'approche est dû à une grande différence géopolitique. Israël n'est pas prêt de pacifier ses relations avec ces voisins. En fait, il y aurait plutôt un durcissement des positions de l'opinion publique israélienne. Donc quelques millions d'israéliens continueront à vivre pendant des décennies à coté de quelques millions de palestiniens. A moins de vouloir faire un génocide, Israël n'a pas les moyens de juguler la menace.
En France, le vivier de gens susceptible de basculer dans le djihadisme serait d'environ 100 000 personnes. Dans une masse de 5 millions de musulmans et de 60 à 70 millions de français. Sur ces 100 000 personnes, seules quelques milliers vont basculer dans une démarche menant au terrorisme. Bref, avec des moyens appropriés, on pourrait éradiquer la mouvance djihadiste en France (voire en Europe) et mettre l'essentiel des fauteurs de troubles en prison. D'après le juge Trévidic, et j'ai cru comprendre qu'il se fait le porte parole d'une partie de ses confrère, on a choisi une voie sécuritaire en mettant des gens en arme visbles dans la rue. Et certains hommes politiques demandent le renforcement de cette politique. Alors que la bonne solution, à ces yeux, serait de faire en sorte que l'on surveille mieux les milieux radicalisés et que l'on arrive à mettre les gens hors d'état de nuire avant qu'ils aient mis leurs menaces à exécution. J'ignore quelle solution apportera les meilleurs résultats, mais personnellement, je préfèrerais que l'on arrive à interpeller les terroristes chez eux au petit matin, plutôt que dans la rue au moment où ils ont commencé à mettre leurs projets à exécution.