Pour compléter le fil sur la gouvernance de notre grand voisin d'outre Rhin, je voudrais ouvrir un débat sur la stratégie de ce pays de 80 millions d'habitants au centre de l'Europe.
De 1945 à 1990 tout était simple : pour éviter de passer sous le joug soviétique, la RFA comptait sur l'alliance américaine. Elle en payait le prix militaire (une armée nombreuse et bien équipée) et diplomatique (une défense étroitement subordonnée à l'OTAN, un total alignement sur les États Unis dans les instances internationales du FMI aux jeux olympiques). Parallèlement, elle était parvenue à rassurer ses voisins occidentaux en s'engageant dans la construction européenne (d'ailleurs à la demande des États Unis) et dans un partenariat étroit avec la France. Bref un pays pacifique, centré sur l'industrie et le commerce, à la stratégie défensive sur le plan militaire et partenariale pour le reste ...
En 1990, le contexte géopolitique a changé radicalement. L'Allemagne n'est plus un front face au bloc soviétique (évanoui). Il me semble que sa stratégie était pourtant restée marquée par son passé : cherchant avant tout à rassurer ses partenaires, elle est restée dans l'OTAN et l'UE, tout en développant des liens économiques étroits avec les pays d Europe centrale et ceux issus de l'URSS...Elle a toujours conservé un profil bas au plan international même si ses entreprises n'ont pas eu peur du marché chinois ...
L'élection de Trump a eu un effet positif : Berlin s'interroge sur la pertinence de sa subordination à Washington. Mais peut elle aller plus loin et concevoir sa stratégie de moins en termes historiques (rassurer des pays qui n'ont pas oublier 1940) mais plus en termes géographiques ? À cela s'ajoute le Brexit qui va priver l'UE d'une puissance politico-militaire (et atlantiste) majeure ...
Peut on imaginer que l'Allemagne prenne ses distances vis à vis des États Unis ? Ce serait un grand changement. Il reste difficile à envisager car de nombreuses institutions allemandes sont farouchement americanophiles (l'armée mais aussi les Banques) et rien ne nous dit que Trump sera toujours à la maison blanche dans 2 ans ...un président moins caricatural saura resserrer des liens pas encore rompus.
Se rapprocher de la Russie ? peut être mais les voisins orientaux de l'Allemagne (Pologne et pays baltes) ne le souhaitent pas ...Berlin peut il se disputer avec eux ? Et l'opinion publique allemande est méfiante à l'egard de Poutine et de sa démocratie limitée ...
Reste un champ naturel d'action : l'UE. Principal membre de l'UE par sa démographie et ses contributions financières (brute et nette), mais surtout inspirateur de sa politique monétaire (via la BCE) et budgétaire, en lien discret mais étroit avec la commission et le parlement, la République fédérale devrait naturellement voir sa position centrale renforcée dans une UE un peu moins occidentale... Seul obstacle sur cette route : la volonté d E Macron de proposer un chemin français à l UE...
Deux options : soit le couple franco allemand se réactive et alors une relance de l'UE sera plus facile...soit l'Allemagne joue cavalier seul et Attend que Macron se décourage ...
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