Il faut reconnaître que les pouvoirs publics sont plus prompts à imposer des contraintes plus ou moins réalistes aux entreprises qu’à se les appliquer à eux-mêmes. (et je ne parle pas des 35 heures à l’hôpital…)
Je ne sais pas quels scénarios prennent en compte les protection de centrales nucléaires, mais l’impression que cela donne est qu’il n’y a aucune limite au risque dont on veut se prémunir (il me semble que pour les digues du Rhône on prend en compte la concomitance entre une crue millénale et un séisme…). Et pourquoi mettrait-on des limites, puisque c’est EDF qui va payer...
Un exemple sur les barrages que je connais mieux, puisque vous faites référence (probablement) aux « révélations » d’Envoyé Spécial en septembre 2018 sur le barrage de Vouglans sur l’Ain.
Pour les grands barrages (comme celui-là), la loi oblige l’exploitant à étudier les scénarios de rupture et à fournir les éléments aux pouvoirs publics qui s’en servent pour élaborer les Plans Particuliers d’Intervention (PPI). (entre parenthèses, on sait que le séisme est une cause mineure voire anecdotique de rupture de barrages dans le monde et a fortiori en France. Au Japon, lors du séisme de 2011, un seul barrage a rompu alors que des dizaines ont été secoués par le séisme)
Les scénarios à étudier sont fixés par l’administration de manière conservative :
- rupture totale et instantanée du barrage (à l’instant t, le barrage est présent et plein ; juste après, lemur d’eau est là mais il n’y a plus le barrage)
- majoration de 15 % des hauteurs d’eau calculées
- minoration de 13 % des temps d’arrivée de l’onde de submersion
- évidemment prise en compte des effets de rupture en cascade.
Après tout, c’est raisonnable de prendre des hypothèses conservatives pour ce type d’événements.
(Hypothèses conservatives qui relativisent évidemment les « seulement quelques centimètres » qui protègent les centrales nucléaires)
Sauf que d’une part, l’administration est incapable de communiquer clairement sur le sujet (la prestation du représentant de la préfecture dans le reportage suscité est particulièrement mauvaise) ; laissant le champ libre aux activistes qui ne manquent pas d’inverser le raisonnement en prétendant que, puisqu’EDF a étudié ce scénario, c’est qu’il est possible, et même (puisqu’on nous cache tout) probable.
Et que d’autre part, bien que tous ces éléments aient été fournis à la fin des années 90, certaines préfectures que je ne nommerai pas n’ont toujours pas élaboré les PPI de ces ouvrages… (et en sont restées à la réglementation précédente)
(ah et sinon Narduccio je me permets de corriger, ce n’est pas la vallée de la Rioja mais de la Roya

…)
Un autre exemple de cette tendance (faites ce que je dis…) a été bien sûr la gestion du stock de masques et in fine la décision de 2013 de refiler le bébé aux entreprises…
Mais ceci dit, autant gérer des stocks (de masques, de tenues, etc) ne devrait pas me semble-t-il être un problème dimensionnant, autant je rejoins Narduccio sur le fait que la définition du « bon » niveau d’aléa pour le dimensionnement du système hospitalier pour les cas graves et urgents est un casse-tête. Là, il s’agit de maintenir non seulement du consommable mais aussi du matériel et surtout des compétences.
D’autant que la plupart des pointes habituelles sont réparties dans l’espace et dans le temps alors que la COVID a affecté de manière quasi simultanée l’ensemble du territoire.
On peut trouver anormal que le système se grippe lorsque 5000 personnes sont en réanimation (d’ailleurs s’est-il vraiment grippé?). Plus difficile est de dire quel serait le bon chiffre : 7000 ? 10000 ? 20000 ? 60 millions ? Veut-on avoir du matériel et des infirmiers formés pour les soins intensifs et qui n’en font que 50 %, 20 %, 10 % du temps ? On a beau se dire que la santé n’a pas de prix, on voit quand même qu’il y aura une limite, non seulement en termes d’efficacité, mais de coût acceptable.