pierma a écrit:
La gauche n'a jamais compris ce qu'était une entreprise. Mais ce n'est pas le seul problème : il n'y a pas d'investisseur financiers français prêts à mettre de l'argent dans l'industrie.
Je me souviens d'un documentaire sur la vallée de l'Arve (le long de l'autoroute blanche) dite la vallée du décolletage, où on fabrique (encore) tout ce qui est visserie pour l'industrie, en particulier pour l'automobile. Certains se sont diversifiés et vont jusqu'à fabriquer des clips plastique et autre.
On avait donc 5 ou 6 patrons, des vieux de la vieille qui avaient commencé avec une décolleteuse dans une grange, qui dirigeaient désormais une boite de 500 personnes, et qui faisaient le même constat : il n'y a pas un Français ou une banque d'affaire française pour leur racheter. (Alors qu'ils partent en retraite.)
Le capitalisme français est malade, tout simplement. Et donc ils vendent... à des fonds de pension américains ou asiatiques, dont la stratégie est toute tracée : on restructure pour dégager plus, ça va pour quelques années, ensuite on délocalise ou on ouvre une succursale pour les nouvelles fabrications.
Ils sont où, les premiers de cordée ?
Bof, c'est un peu l'histoire des manufactures mulhousiennes après 1870... Pendant environ 1 siècle, le modèle de entrepreneuriat était simple : Les patrons faisaient 7 ou 8 gamins. Les jeunes étaient poussés vers les études et vers l'exploration de la vie industrielle. Ceux de la première génération firent leurs études à Paris, puis allèrent voir à Manchester comment faisaient les anglais. Le patriarche choisissait dans la famille son successeur à la tête de l'usine. Il est arrivé que ce soit un neveu ou un cousin qui avait plus la fibre des affaires que les propres enfants. En fait, ils créèrent quelque chose de très proche du modèle de l’aristocratie, sauf que les postes de responsabilités allaient au plus méritant.
Puis, arrive 1870, ce qui va casser le modèle. Déjà, une bonne partie de la bourgeoisie mulhousienne va faire le choix de rester français. Donc, ils doivent quitter la ville. Ils sont nombreux à émigrer à Paris. D'autres font le choix de Bâle, allant chaque jour à leurs usines en Alsace et rentrant le soir. Ensuite, pour diverses raisons, ils font le choix de transformer leurs entreprises en Sociétés Anonymes. En partie pour éviter la confiscation, mais aussi parce que la famille étant éclatée entre 3 pays, la France, l'Allemagne et la Suisse, il devient compliqué de gérer les affaires au sein de la famille. Petit à petit, la place des familles des fondateurs s'est diluée jusqu'à disparaitre. Parfois, seul le nom est resté.
Certaines familles ont ouverts plusieurs usines voulant jouer le jeu de la distribution entre les marchés allemands et français. Donc, on a installé des usines avec les procédés mis au point à Mulhouse dans les vallées vosgiennes coté français. Mais aussi dans la Franche-Comté et en Bourgogne. Les informations techniques circulaient entre Mulhausen et les usines françaises dans les 2 sens, ce qui ne plaisait pas aux administrations, aussi bien françaises qu'allemandes. Ce qui explique qu'en 1914, la plupart des organes dirigeants des usines mulhousiennes ont été remplacées par des allemands "de l'intérieur" proches de l'armée, puis que l'usine et les machines ont été déplacées en territoire vieux-allemands. En principe pour éviter les incursions de l'armée française...
On dirait que l'histoire se répète...