Méandre a écrit:
Ca sert à rien le nucléaire militaire, ce n'est que des problèmes pour la population d'un petit pays comme le notre, personne fait confiance à personne, tout est sous contrôle, les grandes puissances étrangères n'ont de cesse de prévoir des scénarios catastrophes, et, on nous blâme d'une situation qui n'est que le reflet d'une sclérose de fonctionnaires paranoïaques. Excusez moi de cet excès, mais je ne suis pas sûr qu'il y est priorité sur la protection de la population. A vrai dire, içi, on protège une idée, celle d'un pays qui a la folie des grandeurs dans les miroirs de Versailles et qui se pavane à jouer les châtelains. Alors le nucléaire militaire français, s'il est dans le même état que nos centrales...Non merci.
S'il est dans le même état que nos centrales, je reste, comme Narduccio, très rassuré.
Dire que l'arme nucléaire ne sert à rien pour la France, c'est méconnaître son histoire. Elle nous a peut-être évité des provocations ou des invasions soviétiques en Europe occidentale. Parce que si les Soviétiques pouvaient tester ou douter de la volonté des USA ou de la Grande-Bretagne de mourir pour le continent européen, la France a toujours manifesté sa volonté d'en découdre nucléairement dès l'effondrement de la RFA. C'est-à-dire qu'elle envoyait les premières bombres en cas de défaite dans la bataille d'Allemagne. C'est-à-dire que l'URSS se trouvait dans le choix de rester partiellement vitrifiée sans répondre (avec un lourd handicap pour remporter la guerre) ou répondait. Et si elle répondait, c'était sur toute la France - après quoi les centres vitaux de la Russie étaient anéantis et la guerre, perdue aux profits des Anglo-Saxons - ou sur tout le monde - et toutes les places technologiques du monde étaient vitrifiées, avec une défaite pour tous les belligérants.
L'arme nucléaire française a servi durant la guerre froide.
Elle ne sert à rien aujourd'hui et a considérablement été réduite. Sauf que si nous en avions besoin dans le futur, ça coûte moins cher d'entretenir et de renouveller celles que nous avons que d'en redévelopper de futures à partir de rien.
Quant à savoir si nous en aurons besoin dans le futur, tout ce qu'on peut dire est que
"l'avenir dure longtemps" (de Gaulle) et que la France a déjà pensé ne plus avoir besoin d'armes entre 1918 et 1939.
Un peu d'histoire :
Citation:
Après le Conseil du 4 mai 1962.
« C’est impressionnant de penser que l’on pourrait tuer vingt millions d’humains. »
Il me répond tranquillement : « Précisément, nous ne les tuerons pas, parce qu’on saura que nous pourrions le faire. Et, à cause de ça, personne n’osera plus nous attaquer. Il ne s’agit plus de faire la guerre, comme depuis que l’homme est l’homme, mais de la rendre impossible, comme on n’avait jamais réussi à le faire. Nous allons devenir un des quatre pays invulnérables. Qui s’y frotterait s’y piquerait, et s’y piquerait mortellement. La force de frappe n’est pas faite pour frapper, mais pour ne pas être frappé.
AP. — La bombe a bel et bien frappé, à Hiroshima et Nagasaki.
GdG. — Elle n’aurait pas frappé, si les Japonais en avaient possédé une. Et il fallait bien qu’elle frappe la première fois. Pour mettre le Japon à genoux, il fallait lui fournir la preuve que cette bombe était une réalité terrifiante et imparable. Et il fallait que cette bombe mette fin à la Seconde Guerre mondiale, pour que la perspective de son emploi dissuade d’en entreprendre une troisième. Sans quoi, on n’aurait jamais cru à ses vertus.
« Il faut juger tout cela à la lumière de l’Histoire. Les bombardements de Dresde et de Leipzig ont fait plus de morts que les deux bombes atomiques. Les trois cent mille morts d’Hiroshima ont épargné bien davantage de Japonais, qui auraient été écrasés sous des bombes ordinaires. Et surtout, ils ont épargné les dizaines de millions de morts d’une autre guerre mondiale, qui n’aurait pas manqué de suivre de peu la précédente. Les morts par bombardements classiques auraient été des morts inutiles. Les morts d’Hiroshima ont été des morts… nécessaires. (Il a cherché le mot, puis a fini par ne plus retenir que celui qui avait dû lui venir d’emblée.)
AP. — Et les morts de Nagasaki ?
GdG. — Ça, je reconnais que c’est plus discutable. Truman n’a attendu que trois jours pour lancer sa seconde bombe, sans avoir laissé aux Japonais le temps de se retourner. Il aurait pu leur envoyer un ultimatum à huit jours.
AP. — Des centaines de milliers de morts, des femmes, des enfants, des vieillards carbonisés en un millième de seconde, et des centaines de milliers d’autres mourant au cours des années suivantes dans des souffrances atroces, n’est-ce pas ce qu’on appelle un crime contre l’humanité ? »
Le Général lève les bras. Ce n’est pas son problème : « Nagasaki n’est peut-être pas très défendable. Mais sans Hiroshima, l’armement nucléaire n’aurait pas fait plus d’effet qu’un revolver à eau. Truman a eu du cran. Il en fallait. »
Alain Peyrefitte, C’était de Gaulle, tome I