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 Sujet du message: Re: Iran : ça bouge !
MessagePosté: Mer 24 Jan 2018 14:27 
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pierma a écrit:
Beaucoup se jouera sur la capacité des universités des deux pays à attirer les futurs diplômés. Actuellement les USA attirent des étudiants du monde entier, mais les Chinois développent très vite leur réseau universitaire, souvent en partenariat avec des universités occidentales.

Et j'ajouterai que ces derniers mois les chinois sont en train de surprendre beaucoup de monde au niveau des technologies, de la recherche scientifique fondamentale ou appliquée.

De nombreux scientifiques américains et européens s'inquiètent des progrès des scientifiques chinois sur le monde quantique, la robotique, les technologies spatiales, et encore bien d'autres...

Après, je ne dirais pas que l'hégémonie chinoise serait préférable à l'hégémonie américaine... bien au contraire.

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 Sujet du message: Re: Iran : ça bouge !
MessagePosté: Mer 24 Jan 2018 20:11 
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Skipp a écrit:
Après, je ne dirais pas que l'hégémonie chinoise serait préférable à l'hégémonie américaine... bien au contraire.

Si vous avez aimé l'impérialisme américain, vous allez adorer l'impérialisme chinois ! :roll:


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 Sujet du message: Re: Iran : ça bouge !
MessagePosté: Dim 18 Mar 2018 12:25 
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Personne n'a mentionné la permission laissée aux Iraniennes de tomber le voile...


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 Sujet du message: Re: Iran : ça bouge !
MessagePosté: Ven 20 Avr 2018 11:01 
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J'aime bien penser que l'Histoire repasse les mêmes plats, et que l'Empire perse l'emporte sur le projet néo-ottoman d'Erdogan.

Il y a des signes que l'Iran se désislamise à grands pas et que les institutions politiques sont rongées par une désaffection profonde et massive. Quand la Perse se libéralisera, l'Orient (notamment arabe et sunnite) tremblera.

En attendant, elle participe à la réaction du monde contre le sunnisme - dès lors qu'il fut perverti par le zèle des turcs fraîchement convertis -, commencée au XIe siècle. (En Orient, toutes les causes sont perdues par leurs extrémistes...) Est-ce par conscience de cela que le prince saoudien MBS prend les devants en bousculant son obsolète royaume ?
Citation:
Il y a plus de deux mille cinq cents ans, l’Iran s’appelait la Perse, et devenait le premier véritable empire de l’Histoire, s’étendant de l’Inde jusqu’à la mer Égée. Son fondateur, Cyrus le Grand, écrivait la première déclaration des droits de l’homme, dans laquelle étaient – déjà ! – évoquées la liberté de culte, l’égalité des citoyens et l’abolition de l’esclavage. C’est lui qui, en 539 avant notre ère, libéra le peuple juif de Babylone, lui permettant de retourner à Jérusalem pour y reconstruire son temple. […] Un passé qui dérange dans une République islamique qui, de manière ambiguë, tente de s’en inspirer tout en le vouant aux gémonies.

La fin de Daech en Syrie et en Irak a signé la victoire de l’Iran. Premier pays étranger à combattre sur le terrain les soldats du califat, la République islamique peut aujourd’hui se targuer d’avoir créé au Moyen-Orient un corridor de Téhéran à Beyrouth. Au grand dam de son principal rival régional, l’Arabie saoudite, bien décidée à briser cet « axe chiite ». « L’Iran chiite est en réalité en train de reconstituer l’Empire perse », fulmine un haut diplomate arabe. Pourtant, le 29 octobre, le pouvoir judiciaire a ordonné la fermeture de toutes les routes conduisant au tombeau de Cyrus le Grand pour empêcher que des centaines d’Iraniens s’y réunissent. […] Armé de bulldozers, le funeste ayatollah Khalkhali, chef des tribunaux révolutionnaires iraniens, s’est mis en tête l’idée folle de détruire le mausolée de Cyrus le Grand et la cité de Persépolis, avant d’en être empêché par les autorités locales, aidées de la population.

Dans les manuels scolaires, la partie consacrée à la Perse préislamique s’est réduite comme peau de chagrin. Les rois et leur dynastie ont été dénigrés. […] Les autorités islamiques ont également tenté d’éteindre les traditions comme le norouz (nouvel an perse) ou le chaharshanbe suri (mercredi du feu). […]

Après avoir été envahie par les Arabes, au VIIe siècle, la Perse a durablement influencé le monde musulman. Elle lui a offert ses plus grands poètes (Hafez, Ferdowsi) et des joyaux, comme Ispahan, la « ville qui vaut la moitié du monde ». […] Islamisée, elle a conservé sa langue, le persan, idiome de l’amour et des plaisirs, sauvegardé au fil des siècles grâce à la poésie. […] La veille du dernier mercredi de l’hiver, la jeunesse se précipite toujours dans les rues pour allumer des feux de joie et célébrer l’arrivée du printemps. Le 20 mars, toutes les familles iraniennes se réunissent autour du haft sin (sept objets commençant pas le son « s ») pour fêter le norouz. […] « Regardez comme les frontières actuelles de l’Iran se sont réduites par rapport à celles de l’Empire perse, lance, amère, cette étudiante de 25 ans. Depuis l’arrivée de l’islam, on a perdu notre civilisation et notre grandeur. » L’un de ses camarades porte autour du cou un pendentif représentant un homme ailé. Il s’agit du Farvahar, l’ange gardien de la religion zoroastrienne, premier monothéisme de l’Histoire, né dans la Perse antique. Cet emblème, aujourd’hui arboré par de nombreux jeunes Iraniens, est le symbole d’un irrésistible retour de l’identité perse, qui ne laisse d’autre choix aux autorités que celui de s’en accomoder.

Depuis quelques années, les signes de l’Iran préislamique fleurissent à nouveaux aux quatre coins du pays. Des lanciers achéménides surgissent sur les murs d’appartements privés. Des colonnes ioniennes de Persépolis soutiennent l’entrée de bâtiments flambant neufs. Les noms Pasargades, Cyrus et Parsian désignent les plus grandes banques, centres commerciaux et hôtels du pays. À Téhéran, sur un mur, sous le traditionnel slogan « Mort à l’Amérique », lancé par l’ayatollah Khomeyni, figure une fresque représentant des femmes et des soldats perses, tout droit issue du « Livre des rois » de Ferdowsi. Soutenus par le président modéré Hassan Rohani, les sites historiques sont davantage mis en valeur. Et les victoires de l’Iran au Levant, même sous l’étendard de la République islamique chiite, font à nouveau vibrer la corde nationaliste des Iraniens. « Notre civilisation est tout de même beaucoup plus ancienne que celle des Arabes », souligne Sassan, provoquant la joie des étudiants.

2017, Le Point 2364-2365, 134-135


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 Sujet du message: Re: Iran : ça bouge !
MessagePosté: Ven 20 Avr 2018 14:15 
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Geopolis a écrit:
Personne n'a mentionné la permission laissée aux Iraniennes de tomber le voile...
Pour la bonne raison que ce n'est pas autorisé. Cela peut valoir deux ans de prison : http://www.lefigaro.fr/flash-actu/2018/03/07/97001-20180307FILWWW00289-iran-2-ans-de-prison-pour-avoir-ote-son-voile-en-public.php


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 Sujet du message: Re: Iran : ça bouge !
MessagePosté: Ven 20 Avr 2018 14:51 
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Barbetorte a écrit:
Geopolis a écrit:
Personne n'a mentionné la permission laissée aux Iraniennes de tomber le voile...
Pour la bonne raison que ce n'est pas autorisé. Cela peut valoir deux ans de prison : http://www.lefigaro.fr/flash-actu/2018/03/07/97001-20180307FILWWW00289-iran-2-ans-de-prison-pour-avoir-ote-son-voile-en-public.php



ON a eu le débat en France sur des lois obsolètes qui étaient dans nos Codes, mais que l'on appliquait plus. En fait, si j'ai bien suivi, il y a eu une contestation de la part de nombreuses jeunes iraniennes qui se sont dévoilées. Dans un premier temps, le pouvoir a réagit en faisant arrêter les jeunes femmes et en les mettant en prison. Mais, devant l'ampleur du mouvement, il semble que le gouvernement baisse les bras et laisse faire.

Alors, effectivement, la loi n'a pas été changée. Peut-être qu'elle le sera, peut-être qu'elle ne le sera pas. Il est possible que cette loi devienne une loi obsolète ... Il est possible que le pouvoir réagisse dans quelque temps ... Donc, effectivement, ce n'est pas autorisé, comme les françaises qui n'avaient pas le droit de porter un pantalon (cette loi obsolète n'a été supprimée de notre code que depuis quelques années). Effectivement, il y a des iraniennes qui ont été condamnées pour cela (mais, il parait qu'elles ont été libérées depuis). Mais, actuellement, une iranienne peut sortir tête découverte sans faire l'objet de poursuites, car autrement, il faudrait enfermer des dizaines de milliers d'iraniennes dans les grandes villes du pays. Il faut rester vigilant et voir comment les choses évoluent

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Une théorie n'est scientifique que si elle est réfutable


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 Sujet du message: Re: Iran : ça bouge !
MessagePosté: Dim 22 Avr 2018 00:01 
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Avant d'intervenir, je me suis lancé dans une petite recherche pour savoir ce qu'il en était.

Il est exact que la police des moeurs s'est un peu relâchée et que les femmes sans voile ne sont plus systématiquement arrêtées. Mais s'il y a provocation, elle ne laisse pas faire.

L'article du Figaro dont j'ai donné le lien date du 7 mars. C'est tout récent. Il relaie un communiqué officiel du parquet de Téhéran. Une femme ayant ôté son foulard en public pour protester contre l'obligation du port du voile a été condamnée à 24 mois de prison, dont trois fermes il y a moins de deux mois. " Elle a encouragé la corruption morale en public " commente le procureur général qui a décidé d'interjeter appel pour demander une condamnation à 24 mois fermes.

Celle dont l'image a été mondialement diffusée, Narges Hosseini, montée sur un coffret électrique avec son voile au bout d'un bâton, est toujours incarcérée. Elle est libérable sous caution, une caution d'un montant de 90 000 € qu'elle est incapable de payer.

Il est peut-être un peu tôt pour annoncer que les Iraniennes sont désormais autorisées à sortir en public sans voile et pour parler de loi tombée en désuétude à l'instar de celle qui interdirait en France aux femmes de porter le pantalon.

Cette histoire de pantalon est un marronnier. Il n'y a jamais eu de loi sur le sujet mais simplement un règlement de police en vigueur sur le département de la Seine, ce qui n'est pas tout à fait la même chose. Elle a fait l'objet d'une question ministérielle au Sénat en 2012 :
Citation:
Question écrite n° 00692 de M. Alain Houpert (Côte-d'Or - UMP)
publiée dans le JO Sénat du 12/07/2012 - page 1534

M. Alain Houpert attire l'attention de Mme la ministre des droits des femmes, porte-parole du Gouvernement, sur les dispositions, toujours en vigueur, de la loi du 17 novembre 1800 interdisant aux femmes de porter le pantalon. En effet, cette loi - la loi du 26 brumaire an IX - précise que « Toute femme désirant s'habiller en homme doit se présenter à la Préfecture de police pour en obtenir l'autorisation ». Cette interdiction a été partiellement levée par deux circulaires de 1892 et 1909 autorisant le port féminin du pantalon « si la femme tient par la main un guidon de bicyclette ou les rênes d'un cheval ». Si elles ne sont plus appliquées aujourd'hui, leur portée symbolique peut heurter nos sensibilités modernes, c'est pourquoi il lui demande si elle envisage de les abroger.

Réponse du Ministère des droits des femmes
publiée dans le JO Sénat du 31/01/2013 - page 339

La loi du 7 novembre 1800 évoquée dans la question est l'ordonnance du préfet de police Dubois n° 22 du 16 brumaire an IX (7 novembre 1800), intitulée « Ordonnance concernant le travestissement des femmes ». Pour mémoire, cette ordonnance visait avant tout à limiter l'accès des femmes à certaines fonctions ou métiers en les empêchant de se parer à l'image des hommes. Cette ordonnance est incompatible avec les principes d'égalité entre les femmes et les hommes qui sont inscrits dans la Constitution et les engagements européens de la France, notamment le Préambule de la Constitution de 1946, l'article 1er de la Constitution et la Convention européenne des droits de l'homme. De cette incompatibilité découle l'abrogation implicite de l'ordonnance du 7 novembre qui est donc dépourvue de tout effet juridique et ne constitue qu'une pièce d'archives conservée comme telle par la Préfecture de police de Paris.


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 Sujet du message: Re: Iran : ça bouge !
MessagePosté: Sam 9 Fév 2019 12:23 
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Ce régime totalitaire ressemble de plus en plus aux États communistes avant 1989. Il en est de l'islam d’État comme du communisme d’État : il est devenu une façade imposée par des brutes, que la révolution libérale enverra valdinguer à mesure que les libertés individuelles s'affirmeront.
Citation:
Œufs géants du Nouvel An posés sur le trottoir, chandails enroulés autour des troncs d’arbre ou encore récits persans épiques peints sur les murs, le long des avenues de la capitale fleurissent chaque jour les créations modernes et éphémères de jeunes artistes iraniens. Depuis l’élection du président Hassan Rohani, en 2013, de nombreuses galeries d’art ont vu le jour dans le pays. Au cœur du musée d’Art contemporain, on a même exhumé des sous-sols une collection exceptionnelle d’œuvres occidentales ayant appartenu à l’impératrice Farah Pahlavi. Parmi la soixantaine de toiles du XXe siècle figurent des Monet, Gauguin, Warhol ou encore Pollock, qui avaient été soigneusement cachées à la révolution. En cette veille de ramadan, une nouvelle exposition est aujourd’hui inaugurée dans le centre de Téhéran. Un jeune peintre iranien y expose ses œuvres, dont l’une représente quatre nuances d’un Donald Trump pour le moins agacé. Hasard du calendrier, le président américain, pour son premier déplacement à l’étranger, en Arabie saoudite, vient de désigner l’Iran comme ennemi numéro un et a appelé à « isoler » ce pays, « principal soutien », selon lui, du « terrorisme mondial » (…)

Les regards se tournent maintenant vers l’entrée de la galerie. Deux jeunes ont pris possession du trottoir et entament, guitare à la main, les notes du tube mondial « Creep », du groupe britannique Radiohead. […] La scène a de quoi surprendre. Il est interdit de jouer de la musique en public en Iran, à moins de bénéficier d’une autorisation officielle. Or, depuis la révolution de 1979, celle-ci n’est que très rarement accordée par le gouvernement, qui plus est lorsqu’il s’agit de musique occidentale, toujours officiellement considérée comme « impure ». Elle est pourtant extrêmement prisée de la jeunesse iranienne (70 % de la population a moins de 35 ans), l’une des plus éduquées et pro-occidentales de la région, bercée depuis son plus jeune âge par les chaînes satellites. Depuis le changement de président, le ministère de la Culture et de la Guidance islamique est moins avare en autorisations de concert. (…) Les artistes investissent également les rues des grandes villes, notamment Téhéran, pour y interpréter des titres traditionnels persans, mais aussi de plus en plus de tubes plus familiers de l’Occident. La scène du jour est d’autant plus singulière que le bassiste n’est pas un homme mais une femme. Dodelinant de la tête au rythme du tube planétaire, la musicienne aux longs cheveux bruns paraît possédée. Portant une jupe noire fendue laissant entrevoir ses jambes, elle fixe son partenaire sans le quitter du regard. S’il est formellement interdit aux femmes de chanter ou de danser devant un public mixte en Iran, il reste rarissime d’apercevoir une Iranienne jouer de la musique occidentale en public. Les nombreux passants ne s’y trompent pas et, enchantés par la scène, s’arrêtent pour savourer l’instant. « C’est vraiment magnifique ! » s’enthousiasme à deux reprises un piéton, en immortalisant la scène avec son smartphone. Sans attendre, je brandis à mon tour mon portable pour capturer l’instant.

Visiblement ravi de l’attention qui lui est portée, le duo enchaîne avec un autre morceau. Postée par mes soins sur les réseaux sociaux, la vidéo provoque rapidement le buzz. En à peine quelques heures, elle a déjà été visionnée plus de 100 000 fois ! (…) […] Mais, de tous les messages que je reçois, le plus étonnant est celui d’une jeune femme de 27 ans, envoyé via Instagram. « Bonjour, je m’appelle Mahsa, la bassiste dont vous avez diffusé la vidéo. Merci de votre soutien et de votre sensibilité. » Je n’en crois pas mes yeux… La rockeuse m’a retrouvé ! Je ne peux que bénir les réseaux sociaux !

Enchanté par cette rencontre virtuelle inespérée qui, une fois n’est pas coutume, fait suite à une rencontre réelle, je décide d’engager la conversation : « Vous arrive-t-il souvent de jouer ainsi dans la rue ? » Et la jeune bassiste de me répondre instantanément : « Nous jouons chaque jour depuis maintenant un an, sauf durant le ramadan et le mois sacré de Moharram [qui commémore le martyre de Hussein, troisième imam chiite]. C’est la seule chose qui me permette de gagner ma vie. » (…) S’adonner à sa passion en public, qui plus est en République islamique, n’est pas sans risque. Un jour, une femme en tchador se poste nez à nez devant elle et lui hurle au visage : « Tu n’as pas honte ? Tu es en train de commettre un péché ! » Pour seule réponse, Mahsa, qui porte un piercing sur l’arcade droite, lui adresse un grand sourire et continue à jouer, comme si de rien n’était. Et sa pourfendeuse de s’en aller comme elle était arrivée. Une autre fois, la musicienne reçoit la visite d’agents de la paix, qui la pressent de mettre fin à son concert en plein air. Invoquant la « tranquillité des voisins », les policiers attendent tout de même que la jeune femme achève son morceau. L’histoire ne dira pas s’ils l’ont apprécié. « À n’en pas douter, la situation s’est vraiment améliorée pour les musiciens en Iran », se réjouit Mahsa, en évoquant une scène qui l’a particulièrement marquée. Un matin, un groupe d’écoliers en rang croisent son chemin et s’arrêtent devant la bassiste, captivés par son interprétation. « C’était l’extase, se souvient-elle. Un tabou est tombé. Voir des gens prendre plaisir à écouter ma musique m’apporte de la joie et une paix intérieure. » Mise en avant sur les réseaux sociaux, parfois en tant que symbole de l’amélioration de la condition des femmes en Iran, la musicienne refuse d’endosser tout rôle politique. « La musique est mon travail, et les sentiments qu’elle me procure n’ont rien à voir avec le fait d’être une femme, car je suis avant tout un être humain, peu importe mon sexe, insiste-t-elle, en me priant de ne pas instrumentaliser son histoire. Chacun doit simplement accomplir ce qu’il aime au plus profond de lui-même. »

D’autres artistes ont pourtant eu moins de chance que Mahsa. En avril 2014, sept Iraniens, dont trois femmes, font sensation en se filmant sur les toits de Téhéran, sans voile, en train de chanter et de danser sur l’air de « Happy », le tube de Pharrell Williams. Publiée sur YouTube, la vidéo est vue plus de 1 million de fois à travers la planète. « Nous voulions dire au monde entier que la capitale iranienne fourmille de jeunes pleins de vie afin de changer l’image très dure [de l’Iran] que véhiculent les médias », expliquait à l’époque, au site Iranwire Kiana, l’une des interprètes féminines de « Happy ». […] Dans la vidéo, la jeune femme avait retiré son foulard islamique, dévoilant une magnifique chevelure brune et bouclée. Pas de quoi rendre « happy » les conservateurs iraniens, effrayés à l’idée que la culture occidentale ait déjà envahi le pays ! Dès le mois suivant, ils ont arrêté les sept danseurs, qui n’ont été libérés qu’après s’être livrés à une « confession » à la télévision d’État, dans laquelle ils ont été contraints d’affirmer avoir été trompés dans cette vidéo qui n’était pas censée d’après eux être rendue publique. Désignés coupables de « diffusion illégale d’un film » et de « relations illicites », les sept jeunes ont été condamnés à des peines avec sursis (de six mois à un an de prison, ainsi qu’à 91 coups de fouet). Sur Twitter, pourtant officiellement interdit en Iran, les frondeurs ont néanmoins reçu un soutien pour le moins inattendu.

Armin Arefi, Un printemps à Téhéran, in Le Point 2422, 66-67

Le fameux clip en question : https://www.youtube.com/watch?v=N-BC6Mkfbqo


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 Sujet du message: Re: Iran : ça bouge !
MessagePosté: Mer 13 Mar 2019 21:52 
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La révolution libérale enverra peut-être, dans un avenir indéterminé, valdinguer l'islam d'Etat à mesure que les libertés individuelles s'affirmeront. En attendant, la réalité est ce qu'on peut lire ces jours-ci dans la presse, par exemple dans Le Parisien :
Citation:
Iran : 10 ans de prison supplémentaires et 148 coups de fouets pour l’avocate des droits des femmes

Nasrin Sotoudeh, 55 ans, purge déjà une peine de prison de cinq ans. Sa condamnation intervient après la nomination d’un radical à la tête de la justice iranienne.

L’avocate iranienne Nasrin Sotoudeh, célèbre militante des droits humains qui purge déjà une peine de prison de cinq ans, a été condamnée lundi à dix années d’emprisonnement supplémentaires et 148 coups de fouet. Son mari Reza Khandan, qui a confirmé la sentence mardi, a précisé qu’elle avait été condamnée pour « incitation à la débauche ».

Il a précisé que son épouse était condamnée au total à 33 années de prison, en plus des cinq ans qu’elle purge déjà depuis juin à la maison d’arrêt d’Evin, près de Téhéran, pour sept chefs d’accusation mais seule la peine la plus longue s’applique.

Les 148 coups de fouet lui seront infligés parce qu’elle s’était présentée une première fois devant le tribunal sans le voile islamique obligatoire pour les femmes dans l’espace public. Lundi, elle avait décidé de ne pas se présenter devant les juges, estimant que les conditions d' « un procès équitable » n’étaient pas réunies.

L’affaire en cours inclut selon son époux des poursuites pour « conspiration » et « propagande contre le système » politique de la République islamique, appartenance à une organisation de défense des droits humains interdite, participation à une campagne pour l’abolition progressive de la peine de mort en Iran ou encore « atteinte à l’ordre public ».


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 Sujet du message: Re: Iran : ça bouge !
MessagePosté: Jeu 14 Mar 2019 01:53 
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C'est toujours quand ils sentent leur pouvoir en danger que des tyrans de ce genre piquent des crises répressives.


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