Le salon géopolitique de Passion-Histoire

Bonjour,

il semble y avoir désormais un consensus pour lutter contre l'Etat Islamique parout ou il est représenté, donc aussi dans le conflit Syrien; Or il me semble avoir entendu que la position de la France était de combattre l'état Islamique mais de ne pas aider Bachar El Hassad, qui combat aussi l'Etat Islamique. il me semble y avoir une contradiction, mais si je suis le seul à la voir, c'est qu'il n'y en a pas..

Qu'en pensez vous?

Merci

Je pense comme vous, il y a une contradiction énorme. Elle existe d'ailleurs depuis 1945 (j'en parle dans la rubrique Monde, dans le fil Billard à trois bandes).

Sur l'éternel double jeu saoudien et les créatures djihadistes que Riyad/Frankenstein créé et qui lui échappent :
http://www.geopoliticalmonitor.com/saudi-arabia-islamic-state-iraq-hard-place/

Quand l'EI menaçait Assad et l'axe chiite, tout allait très bien. Mais maintenant que l'EI a des prétentions au Califat universel marginalisant les Seoud, l'organisation devient soudain dangereuse et terroriste...

Depuis le début du conflit en Syrie, la France a toujours combattu les Islamistes... C'est d'ailleurs à l'origine des atermoiements de la France (et des Occidentaux) pour soutenir militairement le Conseil national syrien présidé depuis deux ans par le chrétien Georges Sabara. Les occidentaux avaient peur que les armes fournis à l'Armée syrienne libre, ne tombe entre les mains des djihadistes. C'est d'ailleurs ce qui s'est passé.

Le problème est que depuis trois ans, les rebelles syriens soutenus par la France, combattent à la fois Bachar et les Islamiques. De fait, attaqués sur deux fronts, ils reculent et perdent du terrain (sans compter les défections au profit des Islamistes).

Ce sont les rebelles syriens soutenus par la France qui ont été massacrés par des djihadistes francophones l'année dernière (reportage d'Envoyé Spécial sur France 2).

La France est alliée à des pays islamistes (Arabie Saoudite, Qatar) qui financent une kyrielle de groupes islamistes dans le monde, certains devenant ouvertement djihadistes, d'autres terroristes.
Au-delà des divisions innombrables au sein de cette mouvance - "internationalistes" (djihadistes) vs "nationalistes" (Hamas, Talibans), wahhabites, takfiristes, Frères musulmans... -, il y a un socle commun, islamiste, fait d'une vision extrême de l'islam et porté par des pays bien réels (les pétromonarchies du Golfe).
La France, comme l'Occident dans son ensemble à la suite des Etats-Unis, est l'alliée de ce courant depuis la Seconde Guerre Mondiale. On peut retourner le problème dans tous les sens, on est du mauvais côté de la barrière. On ne peut pas indéfiniment lutter contre des groupes qui sont créés ou financés par des pays "alliés", c'est le tonneau des Danaïdes...

Oui, tout à fait, s'il y a contradiction, elle est bien là. La France combat les Islamistes en Syrie, mais fait des affaires avec le Qatar.
En fait, elle fait la différence entre les terroristes et les hommes d'affaires/politiques....

Jusqu'à preuve du contraire, la France ne combat pas les islamistes en Syrie... Depuis trois ans, elle a surtout détourné son regard des islamistes syriens. Pour faire du bruit, la France répète à l'envi qu'il faut soutenir les rebelles "démocrates" sachant pertinemment que ceux-ci n'existent à peu près plus sur le terrain depuis un an. En 2013, le très sérieux Jane's Defence Weekly montrait déjà que 80% des rebelles syriens étaient islamistes (divisés eux-mêmes en différentes mouvances).

Une coalition de 10 pays arabes a été mise en place pour lutter contre l'EI: l'Arabie saoudite, Bahreïn, les Emirats arabes unis, le Koweït, le Qatar, Oman, l'Egypte, l'Irak, la Jordanie et le Liban.

Les premiers bombardements américains contre l'EI ont eu lieu en Syrie. Le virage à 180° de Washington ne manque pas de sel : il y a un an jour pour jour, les Américains voulaient bombarder les troupes d'Assad, offrant indirectement un boulevard à l'EI. L'âge de raison ?

Dans le même temps, le PKK turc a appelé les Kurdes de Turquie à aller se battre contre les djihadistes tandis que 130 000 réfugiés kurdes syriens sont à la frontière pour passer en Turquie.

Quel foutoir... Tous les pays de la planète peuvent une nouvelle fois dire merci à l'Arabie Saoudite pour avoir créé un monstre qui lui a échappé.

Le vice-président US, Joe Biden, a publiquement accusé ses alliés d'avoir permis la montée de l'EI :
http://rt.com/news/192880-biden-isis-us-allies/

US Vice-President Joe Biden has accused America’s key allies in the Middle East of allowing the rise of the Islamic State (IS), saying they supported extremists with money and weapons in their eagerness to oust the Assad regime in Syria.
America’s “biggest problem” in Syria is its regional allies, Biden told students at the John F. Kennedy Jr. Forum at the Institute of Politics at Harvard University on Thursday.
Our allies in the region were our largest problem in Syria,” he said, explaining that Turkey, Saudi Arabia and the UAE were “so determined to take down Assad,” that in a sense they started a “proxy Sunni-Shia war” by pouring “hundreds of millions of dollars and tens of thousands of tons of weapons” towards anyone who would fight against Assad.

Il accuse l'Arabie Saoudite, la Turquie et les Emirats Arabes Unis (intéressante omission du Qatar) d'avoir créé un conflit chiite-sunnite en Syrie pour abattre Assad. Le fait n'est évidemment pas nouveau mais, ce qui l'est, c'est que des dirigeants américains en parlent publiquement.