Si l’on considère que le résultat probable d’un accord en 2025 pourrait être :
gel de la ligne de front + éventuellement quelques avancées territoriales russe, voire la ligne du Dniepr,
neutralisation « à l’autrichienne » de l’Ukraine restante,
pas de disparition de l'Etat ukrainien ni de changement de régime en Ukraine car ni les États-Unis ni l’Ukraine ne pourraient signer une telle clause,
Alors au contraire les analyses lues sur ce même fil (et que je me permets de citer ci-dessous) me semblent démontrer qu’un 3ème round est absolument inévitable.
Essayons donc
Citation:
de comprendre le point de vue russe et d'entrer dans une compréhension globale et neutre du problème.
Quels sont les enjeux et les objectifs de la Russie dans cette guerre ?
Les objectifs ont été clairement annoncés par Poutine en février 2022 :
Citation:
J’ai pris la décision de mener une opération militaire spéciale.
Son objectif est de protéger les personnes qui ont été soumises à des abus et à un génocide par le régime de Kiev pendant huit ans. Et à cette fin, nous nous efforcerons de démilitariser et de dénazifier l’Ukraine et de traduire en justice ceux qui ont commis de nombreux crimes sanglants contre des civils, y compris des citoyens de la Fédération de Russie.
Voilà donc les objectifs : démilitariser, dénazifier, juger les coupables (ukrainiens) de crimes contre les civils.
Quant aux enjeux, si je reprends les analyses des connaisseurs sur ce même fil :
Citation:
Moscou n'abandonnera pas, cette lutte est existentielle pour la Russie
Un enjeu existentiel donc, digne de 1941. La Russie joue sa survie face à un
Citation:
régime de Kiev nationaliste - donc anti-russe -
(« nazi » selon Poutine), dont le projet d’adhérer à l’OTAN constitue une menace vitale, et qui cherche à piéger l’Occident dans une "surenchère permanente".
Quels objectifs l’accord décrit plus haut permettrait-il d’atteindre ? Aucun.
Commençons par la démilitarisation. On peut imaginer qu’une forme plus ou moins complète de démilitarisation fasse partie d’un accord. Mais tant que le régime « nazi » sera en place à Kiev, il cherchera à n’en pas douter à contourner ou annuler cet accord, quels que soient les contrôles qui y seront prévus.
De plus, un accord signé par les E.-U. ne constituerait aucune garantie pour la Russie car ils n'ont pas de parole :
Citation:
Par l'élargissement constant de l'OTAN en Europe centrale et orientale - au mépris de la parole donnée - les E.-U. ont adopté une politique agressive à l'égard de Moscou.
Inversement, d’ailleurs, les E.-U. pourraient considérer que la signature de la Russie n’a pas plus de valeur en 2025 qu’en 1991 lorsqu’elle a garanti les frontières de l’Ukraine. Autant dire que l’accord signé ne vaudra pas grand-chose pour les 2 parties.
La démilitarisation est donc un leurre, au moins tant que le régime actuel reste en place en Ukraine.
Sans démilitarisation, la même menace existentielle continuera de peser sur la Russie, c’est simplement la frontière qui se sera déplacée. A l’est de cette frontière, ce seront toujours des territoires russes (ayant choisi de rejoindre la Russie en vertu du « droit de choisir » annoncé par Poutine en 2022) qu’il faudra protéger.
De manière encore plus évidente, l’objectif de dénazifier l’Ukraine ne serait pas atteint, et les criminels évoqués dans le discours de 2022, au premier rang desquels se trouve probablement le gouvernement ukrainien, ne seraient pas traduits en justice.
Ajoutons que
Citation:
Cette guerre a été trop couteuse pour Moscou pour revenir avec une demi-victoire.
et
Citation:
Il y a un précepte chez les asiatiques qui est le concept de perdre la face
Je ne sais pas si Poutine est asiatique, mais assurément, terminer ce coûteux conflit sans avoir rempli 2 des 3 objectifs annoncés serait perdre la face.
Dans ces conditions, comment imaginer que la Russie se satisfasse de la situation créée par cet accord, alors que son existence même est en jeu ?
Le point d’achoppement est donc le régime ukrainien. En fait, la seule garantie à la hauteur de l’enjeu « existentiel » pour la Russie serait le contrôle complet du territoire ukrainien, soit par annexion complète, soit par la mise en place d’un régime vassal, à la biélorusse. Aucune de ces deux options ne peut être atteinte (me semble-t-il) via un accord en 2025.
D’où la nécessité d’un round 3. Sa nature et son échéance relèvent de la prospective, mais il est évident que la Russie n’a pas les moyens militaires d’une nouvelle « opération spéciale » à court terme. Elle devrait donc privilégier d’abord la vassalisation. Celle-ci ne pourra guère s’obtenir par des élections libres en Ukraine, mais d’autres moyens existent. Une partie de ces moyens a été judicieusement (quoiqu’ironiquement) évoquée dans ce fil, au sujet de Zelensky :
Citation:
Espérons pour lui qu'il ne finisse pas comme Diem.

On peut aussi surtout, pour rester en Ukraine, se souvenir des ennuis de santé de Viktor Iouchtchenko. La Russie a montré qu’elle n’hésite pas à utiliser des moyens non conventionnels pour châtier des criminels.
Évidemment, il ne pourrait s’agir là que d’une composante s’inscrivant dans un plan plus complet, mais la Russie a également montré qu’elle sait utiliser des moyens d’action autres que militaires.
A moyen terme, d’autres actions sont possibles. Si par exemple la neutralisation et la démilitarisation de l’Ukraine s’avèrent effectives, elle ne constituera plus une menace, mais sera au contraire une proie facile.
L’arrivée de Trump au pouvoir ouvrira certainement des opportunités dans les 4 ans qui viennent : qui sait, par exemple, ce que sera l’OTAN en 2028 ?
Et rien de tout cela n’intervient à moyen terme, n’oublions pas que la Russie joue sur le long terme. C’est pour cela que je parlais de 5 à 10 ans.
Citation:
Même si elle ne peut plus se permettre les sacrifices humains consentis lors des deux guerres mondiales, il est peu probable que la Russie abandonne, même dans 15 ans.
Citation:
Le gros avantage de ces nations [Russie et Chine] est qu'elles ne voient pas l'avenir à brève échéance alors que le nôtres voient rarement plus loin que la prochaine élection.
(sur ce dernier point, le terme « nation » me fait tiquer, mais la chose est vraie pour les dirigeants)