Le salon géopolitique de Passion-Histoire

Bonjour,
Le membres du salon souhaitent probablement exposer leur analyse au sujet de ce conflit. A moins qu'ils ne souhaitent poser des questions.
Les « causes » sont déjà discutées sur un autre fil. Et c'et d'ailleurs un excellent fil.
Parlons ici du conflit (hormis les causes bien sûr).

Je commence la discussion.
Le président ukrainien Volodymyr Zelensky a annoncé jeudi être arrivé à Washington, où il doit s’entretenir avec son homologue américain Joe Biden et des représentants politiques, assurant vouloir faire de l’aide à la défense aérienne « une priorité » de ces discussions.
Volodymyr Zelensky s’est d’abord rendu au Congrès, où les élus débattent d’une possible nouvelle aide militaire et humanitaire pour son pays en guerre. Zelensky doit rencontrer des chefs de file des partis républicain et démocrate, au moment où il tente de convaincre les États-Unis de l’aider à passer « la ligne d’arrivée » face à la Russie.
Les tractations sont particulièrement difficiles à la Chambre des représentants, désormais aux mains des républicains, où certains élus conservateurs (notamment Kevin McCarthy) refusent de débloquer davantage de fonds.

C'est une guerre bizarre qui ressemble plus à la grande gierre qu'à la seconde guerre mondiale, où l'artillerie compte beaucoup, où les gains de territoire sont faibles et où l'aviation joue un rôle réduit. A noter l'apparition massive des drones dans ce conflit . Nous ne savons pas grand chose tant la propagande des deux côtés est intense et nous empêche d'avoir une vision claire. Ce serapour l'après guerre.

Je donne dans le désordre trois éléments d'information (ou d'opinion) :

1) ‌D’après un récent sondage de la chaîne CNN, seuls 45 % des Américains soutiennent l’envoi de fonds supplémentaires au pays est-européen. Le décrochage est particulièrement prononcé chez les républicains, majoritaires à la Chambre des représentants. La part de ceux qui trouvent que les États-Unis en font « trop » pour l’Ukraine a presque triplé entre le printemps 2022 et l’été 2023, passant de 17 % à 44 %, selon l’Institut Pew.
2) Six experts français plaident pour l’intensification du soutien européen à l’armée ukrainienne par le lancement de programmes ambitieux de production de matériel militaire.
https://www.la-croix.com/debat/Guerre-U ... 1201283537
3) La contre-offensive lancée par l'armée ukrainienne au début du mois de juin avance très lentement.

Ces "experts" devraient avoir remarqué que depuis quelque mois chaque pays membre de l'UE commence à jouer une partition personnelle concernant l'affaire ukrainienne et puis c'est aussi de circonstance au regard de l'état de l'armée française que de demander un renforcement de la production d'armements.
On connait les incantations d'une "Europe de la défense" en France depuis le début des années 1950, sauf que personne n'en veut vraiment dans l'UE. Il suffit de lire les objectifs militaires nationaux donnés par la Pologne récemment...

Si les Américains deviennent plus prudents sur l'aide offerte au régime de Kiev, c'est peut-être un signe qu'ils ne croient plus à la victoire, ce qui serait fort surprenant au regard des sommes d'argent colossales et du matériel militaire offert à Kiev (du jamais vu depuis la Seconde Guerre mondiale), ils ne vont pas laisser tout partir en fumée.
Ou bien c'est plutôt une posture ponctuelle dans une période pré-électorale.
Car cela fait vingt ans qu'ils pratiquent une politique de roll back à l'encontre de la Russie, pourquoi stopperaient-ils maintenant ?

Pour soutenir, il faut du matériel, du matériel, les Européens n'en ont guère et ont envoyé les armes dont ils ne se servaient plus. Des munitions, il n'y en a que très peu. Il n'y a guère que la Bulgarie qui peut fabriquer les obus de 152 au standard soviétique. Les autres n'ont que peu de munitions de 155 standard Otan.

Maintenant, il ne vous a pas échappé qu'il y a des présidentielles l'an prochain aux EU. Les années électorales sont peu propices à de grands chambardements politiques ou militaires. Premier cas, les démocrates gagnent et rien ne change, second cas, les républicains l'emportent et je doute qu'ils conservent la même politique que Biden. Il sont plus isolationnistes que les démocrates et pourraient être tentés par des nédociations.

La contre offensive est un échec, ça ressemble plus à Verdun qu'à la Blitzkrieg. Octobre arrive et la raspoutitsa aussi. Les opérations vont donc s'interrompre.

Depuis plusieurs mois, Zelensky demande avec insistance la livraison des missiles ATACMS. Biden a refusé. Mais il n'est pas impossible qu'il change d'avis dans quelques semaines (ou dans quelques mois).




Il est trop tôt pour dire si cette "contre-offensive" est un échec. Elle sera un échec si la situation reste figée. Elle sera un "demi-échec" si l'armée ukrainienne prend le contrôle de Tokmak. Elle sera une réussite si l'armée ukrainienne prend le contrôle de Melitopol. Cette dernière hypothèse (Melitopol) est improbable dans les 6 mois à venir.
Pendant l'automne les opérations vont s'interrompre. Elles reprendront en décembre si la température baisse suffisamment pour geler le sol.



Thierry Breton, commissaire européen au Marché intérieur, garantit à l’Ukraine que le soutien de l’Europe en armement et munitions sera à la hauteur de ses demandes pour réussir sa contre-offensive face à l’armée russe.
https://www.leparisien.fr/international ... IOKYEQ.php
Thierry Breton a notamment en charge le secteur de la défense et l’aide militaire à l’Ukraine. Il affirme la volonté de l’Union européenne « d’accélérer les volumes et les cadences de production » de munitions et d’armes et confirme « qu’un million de munitions de gros calibre » devra être fourni « dans les douze mois qui viennent ».
L'ancien ministre français de l'Economie rappelle que l'Europe s'est engagée à fournir « dans les douze mois qui viennent un million d'armes de gros calibre : 155 mm, 152 mm, 122 mm, 120 mm, c'est-à-dire des calibres aux normes Otan et aux normes des anciens pays du bloc soviétique car ces armements sont encore utilisés par les Ukrainiens ».
Thierry Breton rappelle aussi le déblocage par l'UE d'une enveloppe de 500 millions d'euros pour fournir à l'Ukraine des munitions en quantité suffisante. «C'est la première fois qu'on se coordonne pour fabriquer, ensemble, des armements et des munitions. L'Europe de la défense avance à vitesse grand V», estime-t-il.

De nombreux journaux américains, citant des spécialistes militaires et diplomatiques, considéraient il y a deux semaines qu'elle était un échec. Devant la mauvaise humeur de Kiev l'administration Biden a dû communiquer dans tous les sens pour expliquer que le gouvernement américain ne pensait pas cela.
Mais effectivement, c'est un peu tôt pour être certain.
Cela dit, vous citez Breton qui explique que dans douze mois les "européens" seront prêts à fournir des armes à Kiev, cela veut dire qu'ils ne misent pas trop sur un succès de cette contre-offensive.


Vous faites parfois la différence entre les discours et la réalité ?
Citez-nous une entreprise fabriquant des armes qui soit "européenne" ou qui dépende de l'UE (dans ce cas elle serait publique) ?

Le projet ASAP (Act to Support Ammunition Production) a été décidé avant le lancement de la fameuse "contre-offensive" ukrainienne. Je pense que les deux sujets sont indépendants.
https://www.lemonde.fr/economie/article ... _3234.html
L'armée ukrainienne aurait grand besoin de munitions même si elle n'avait pas souhaité lancer la contre-offensive.
Les chefs d'Etat en Europe ont compris que cette guerre risquait de durer assez longtemps. Le projet ASAP est indispensable dans une perspective de guerre longue.




Thierry Breton ajoute à son discours une petite phrase symbolique : « L'Europe de la défense avance à vitesse grand V ». C'est de la communication. Je n'y ai pas prété attention. En revanche le plan ASAP me semble un plan sérieux.

Oui, donc aucune entreprise "européenne" fabriquant des armes et des armées nationales qui se refont des stocks nationaux. La commission leur achètera ensuite des munitions, avec l'argent du contribuable.
On ne peut donc pas vraiment observer une "Europe de la défense" qui se développe...

[/quote]Pour fabriquer des munitions, il faut des usines et des machines, tout cela est fort long à mettre en place. Les obus sont un peu plus compliqués à fabriquer que le 75 de 1914. Les fameux missiles dont vous parlez ne changeront pas la donne, ils ont une portée plus longue et permettraient de frapper l'intérieur de la Russie, sur le terrain, ils ne changeront rien. A titre informatif, un obus de 155 coûte 4000 euros.




Hélas, La Palice est mort,
Il est mort devant Pavie ;
Hélas, s'il n'était pas mort,
Il serait encore en vie

J'ignore si vous savez ce qu'est la raspoutitsa, c'est la période de la boue due aux pluies d'automne. Durant la guerre germano-soviétique, les opérations s'arrêtaient parce qu'il était impossible de manoeuvrer, Même si 80 ans sont passés, que le réseau routier est meilleur qu'à l'époque, une offensive ne se conduit pas sur les routes, la manoeuvre impose de passer par des champs. Donc arrêt momentané qui permet aux adversaires de se refaire un peu.