Caesar Scipio a écrit:
Il n'y a aucun biais de ma part dans cette qualification.
J'ai fait vite, voilà tout, en utilisant le vocable communément utilisé. J'aurais pu développer en disant que la civilisation, la culture et l'identité européennes, c'est l'hellénisme en particulier dans sa synthèse universaliste du christianisme, Rome, un substrat germanique, le tout transformé par l'humanisme universalisme et laïc issu de la Renaissance et des Lumières.
Et on est aujourd'hui, pas au temps de l'Inquisition.
Voilà.
Et ca, c'est un fait historico-culturel incontestable. Les civilisations existent. View de l'interieur, elles regorgent de nuances, de différences. Vu de l'extérieur, pas l'ombre d'un doute, sauf à filer des syllogismes.
Et je relève que, globalement, ces aires culturelles/civilisationnelles sont une des principales lignes de faille des rapports humains.
C'est tout à fait exact. Cependant ce n'est pas la seule, la lutte des classes est elle aussi une réalité dont le caractère tangible est de plus en plus évident. Au vu des options prises parce qu'il faut bien appeler l'oligarchie (et ses valets politiques du grand Centre que vous évoquez dans une autre discussion), il devient de moins en moins improbable que les clivages socio-économiques soient un facteur de déstabilisation politique et, à terme, de terrorisme. Par terrorisme, je n'entends pas les casseurs professionnels (autonomes, alias les "totos") des récentes manifestations, mais des groupes structurés et meurtriers comme notre Histoire en a produits.
Pour évoquer des cas concrets (observés dans mon entourage), leur voisin musulman relou à la piété démonstrative (voire agressive) est moins perçu comme une menace primordiale à mesure que la situation matérielle se dégrade, que ces gens soient salariés précaires et épisodiques ou bien allocataires du RSA/AAH. Disons que le danger à court terme réside plus dans la diminution croissante des ressources et, pour les salariés, de leurs conditions de travail (très peu d'illusions sur leur sort, surtout avec ce qui a filtré de la loi El Khomri ; ou encore les mères célibataires révulsées par la baisse imminente des APL).
Bref, la thématique de la bataille culturelle ne recoupe pas celle, plus urgente, du maintien des conditions de vie (déjà fort dégradées). Il est d'ailleurs significatif que les discours ouvertement anti-immigrés (et plus précisément musulmans) ne consistent plus à dire "les étrangers volent le pain des français" (la dernière occurrence sur une affiche de campagne remonte au milieu des années 2000, à ce que j'ai vu) tout bonnement parce qu'il y a une conscience graduelle que, même sans immigration, l'économie telle qu'elle est structurée n'offrirait pas davantage de pain aux français.
J'aimerais souligner un dernier point : nos universités ont formé depuis plusieurs décennies un bataillon d'intellectuels objectivement superflus dans le cadre d'une économie industrielle (oui, c'est un euphémisme et même une manière polie de désigner leur utilité sociale réelle). Des diplômes souvent ronflants servent de légitimité à un sentiment de supériorité qui est l'un des fondements de l'agitation militante (une sorte de coutume du milieu), essentiellement à l'Extrême-Gauche et dans une perspective révolutionnaire. Jusque récemment, ces gens finissaient par rentrer dans le rang, troquant leurs chimères subversives pour adhérer à l'économie capitaliste et au salariat. Ils trouvaient alors à s'employer dans la fonction publique, dans des postes administratifs du privé, ou encore dans des secteurs des médias ou de la culture (au sens large). Filières qui permettaient de se loger plus ou moins confortablement, manger à sa faim, et ne pas trop se poser de questions quant à son avenir - sans parler du statut gratifiant offert par les "professions intellectuelles".
Or, soit ces filières d'insertion sont périmées, soit elles ne sont plus suffisamment rémunératrices (je songe notamment à la presse ou à la traduction). Autrement dit : il n'y a plus de rang dans lequel rentrer pour les contestataires. Parmi eux s'en trouvent - et j'ai pu le constater de visu et avec effroi - des individus sincèrement convaincus d'appartenir à un genre d'élite qui mérite des égards, et qui estiment être brimés par une société qui ne reconnaît pas leur valeur. D'où un discours parfois belliqueux contre le pays, ses institutions et même son peuple, et qui n'est pas sans m'évoquer les récits de radicalisation djihadiste que j'ai pu lire depuis plus d'un an. Manière de dire que je crois qu'on tient parmi eux les candidats au terrorisme d'Extrême-Gauche qui me paraît inévitable et beaucoup plus attractif qu'autrefois vu qu'en face, on ne propose rien d'autre qu'une paupérisation inexorable.