Voici les propositions après le dernier round de discussions en Floride entre les émissaires US, les ukrainiens et les européens :
La réunion entre l’Ukraine et les émissaires Witkoff et Kushner, représentants de facto des desiderata conjoints de Trump et du Kremlin, s’est visiblement au début mal passée, selon de nombreux témoignages depuis le dimanche.
Deux jours éprouvants pour Zelensky, deux jours de pression continue pour tester jusqu’où il peut plier.
Lundi, les Européens sont arrivés en renfort et avec un texte.
Un communiqué diplomatique commun a été publié, signé par les principaux dirigeants européens, et rendu public par le gouvernement britannique.
Source officielle : voir liens en bas de texte.
A : Ce texte décrit de facto une architecture de sécurité post-cessez-le-feu, conditionnelle et dissuasive.
1. Soutien militaire durable
Garantie d’une assistance militaire continue et reconnaissance du droit de l’Ukraine à maintenir des forces armées allant jusqu’à 800 000 soldats en temps de paix.
Implicite : pas de démilitarisation ukrainienne.
2. Forces internationales sous leadership européen
Création de forces internationales dirigées par l’Europe, dans le cadre d’une coalition des volontaires, avec soutien américain.
Leur déploiement sur le territoire ukrainien est clairement envisagé.
C'est une rupture nette avec les lignes rouges russes.
3. Contrôle du cessez-le-feu
Mise en place d’un mécanisme de monitoring piloté par les États-Unis avec des observateurs internationaux incluant un système d’alerte précoce, l'enregistrement des violations, la procédure de réaction.
Pas un cessez-le-feu “aveugle”.
-Voir plus bas ma réflexion sur ce choix d'implication des Etats-Unis.
4. Reconstruction de l'Ukraine et question des actifs russes
Engagement sur la reconstruction, les investissements, les accords commerciaux. Les actifs russes restent gelés dans l’UE.
Pas de chèque en blanc à Moscou.
5. Réaction automatique en cas de nouvelle agression
Obligation de réponse coordonnée en cas de reprise des hostilités : militaire, renseignement, diplomatique et économique.
C’est un embryon de garantie de type article 5, sans l’appeler ainsi.
6. Ancrage européen
Garantie d’un soutien total à l’adhésion de l’Ukraine à l’UE. L’Ukraine sort définitivement de la zone grise européenne.
Ce que dit vraiment ce texte (au-delà des politesses).
Le communiqué est diplomatiquement enveloppé de formules de courtoisie envers les États-Unis et Trump.
Mais le fond est une alternative crédible à l’OTAN est en train de se structurer, ensuite, la balle est renvoyée à Moscou.
« Il appartient désormais à la Russie de démontrer sa volonté réelle de parvenir à un accord. »
Autrement dit : l’Ukraine a montré ses lignes de compromis. L’Europe a posé des garanties. À Moscou de sortir du déni.
L'Europe a écrit noir sur blanc ce que “sécurité sans OTAN” pour l'Ukraine pourrait dire concrètement.
C'est une architecture "de contention de la Russie", pensée pour durer.
Le rapport de force ne s’effondre pas du côté ukrainien, mais je n'ai aucun doute qu'il ne se passera rien de bon à Miami ni à Moscou.
B : Le point 3, "le monitoring piloté pas les États Unis" et mon interprétation de cette proposition globalement "très asymétrique".
Attention, c'est juste une opinion...cela vaut ce que cela vaut...
L'Europe organise ici la coresponsabilité.
L’Europe finance, entraîne, structure des coalitions hors-OTAN, monte des garanties de sécurité, prépare la réponse militaire et économique.
Les États-Unis tiennent l’outil de surveillance et d’alerte. Ils ont, en effet, les capacités ISR globales (satellites optiques, radar, SIGINT), capacités de fusion du renseignement en temps réel et des systèmes d’alerte précoce (missiles, aviation, frappes profondes).
L’Europe ne peut pas, à court terme, remplacer seule ce dispositif, même si elle progresse (satellites français, allemands, italiens, capacités UK).
Mais, ce n'est pas, me semble-t-il , la raison majeure...C’est plus un choix politique calculé, avec plusieurs couches.
Washington ne pourra pas dire qu’il ne savait pas.
Chaque violation documentée engage politiquement celui qui observe.
C'est un risque calculé :
accepter que les États-Unis tentent parfois de temporiser, de minimiser, de gagner du temps.
Ce risque est aussi encadré, car l’Europe a déjà bâti les mécanismes d’action en parallèle. Nous ne sommes pas non plus aveugles.
C’est une architecture volontairement asymétrique :
l’Amérique surveille,
l’Europe agit,
la responsabilité reste partagée.
L’Europe n’attend pas l’Amérique, mais l’oblige à être comptable.
Surveiller, c’est savoir. Savoir, c’est répondre.
Sources :
La déclaration contenant ces six points a été publiée par le chancelier allemand Merz, la Première ministre danoise Frederiksen, le président finlandais Stubb, le président français Macron, la Première ministre italienne Meloni, le Premier ministre néerlandais Schoof, le chef du gouvernement norvégien Støre, le Premier ministre polonais Tusk, le Premier ministre suédois Kristersson, le Premier ministre britannique Starmer, le président du Conseil européen Costa et la présidente de la Commission européenne von der Leyen.
https://www.gov.uk/.../joint-statement-on-ukraine-15...
https://www.consilium.europa.eu/.../lea ... ent-on.../Et
https://europa.eu/.../ecpc.../pdf/state ... 790_en.pdf